Photo du film AGENTS TRÈS SPÉCIAUX - CODE U.N.C.L.E
© Warner Bros. France

[CRITIQUE] AGENTS TRÈS SPÉCIAUX – CODE U.N.C.L.E

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Décidément, les agents secrets ont la cote en ce moment. Après le délirant Kingsman de Matthew Vaughn en début d’année, Spy de Paul Feig et en attendant la sortie du prochain James Bond, Spectre (11 novembre), voilà qu’arrive AGENTS TRÈS SPÉCIAUX – CODE U.N.C.L.E, adaptation de la série américaine Des Agent très spéciaux diffusée par NBC entre 1964 et 1968.

Le réalisateur Guy Ritchie tourne ainsi la page Sherlock Holmes, dont il réalisa deux adaptations (2009 et 2011) dynamiques et extrêmement stylisées (du pur Guy Ritchie) mais tout de même assez cadrées. Avec AGENT TRÈS SPÉCIAUX il offre un divertissement assumé, une comédie d’espionnage où l’essentiel réside dans l’ambiance et la classe qui s’en dégage. Une classe d’autant plus marquée par la nostalgie d’une époque qui en découle.

Au début des années 60, en pleine guerre froide, AGENTS TRÈS SPÉCIAUX – CODE U.N.C.L.E retrace l’histoire de l’agent de la CIA Solo et de l’agent du KGB Kuryakin. Contraints de laisser de côté leur antagonisme ancestral, les deux hommes s’engagent dans une mission conjointe : mettre hors d’état de nuire une organisation criminelle internationale déterminée à ébranler le fragile équilibre mondial, en favorisant la prolifération des armes et de la technologie nucléaires. Pour l’heure, Solo et Kuryakin n’ont qu’une piste : le contact de la fille d’un scientifique allemand porté disparu, le seul à même d’infiltrer l’organisation criminelle. Ils se lancent dans une course contre la montre pour retrouver sa trace et empêcher un cataclysme planétaire.

Photo du film AGENTS TRÈS SPÉCIAUX - CODE U.N.C.L.E
© Warner Bros. France

Comme à son habitude, Guy Ritchie se fait plaisir mais sans pour autant délaisser son spectateur. Tout part de cette reproduction de l’époque, début des années 1960, durant laquelle se déroule le film. Décors (Oliver Scholl) et costumes (Joanna Johnston, collaboratrice régulière de Spielberg) sont un délice pour les yeux. Des lunettes rondes parfaitement assorties à la longue robe blanche d’Alicia Vikander, aux costumes sur mesure d’Henry Cavill, qui interprète l’agent américain Napoleon Solo.

Mais là où Ritchie arrive à dépasser ce simple respect synonyme de crédibilité, c’est qu’on retrouve une part de ce old school au sein même de sa réalisation. Plusieurs plans et mouvements de caméra rappellent en effet ces films « à l’ancienne », et sont incorporés dans la mise en scène très moderne et propre à Ritchie. Il y a cette manière très particulière de filmer les décors de loin, passant d’un plan large à un zoom rapide sur un personnage en mouvement, mais gardant une certaine distance avec les acteurs. Le summum est atteint avec l’une des scènes finales, lors de l’intervention des agents sur une île qui regorge d’hommes armés. On pense dans un premier temps assister à une bataille façon Operation Tonnerre (4e James Bond, réalisé par Terence Young en 1965). Mais au lieu de proposer l’habituelle séquence de fusillade entre « gentils » et « méchants », Ritchie utilise un split-screen (écran partagé) aussi virtuose que celui de Norman Jewison dans L’Affaire Thomas Crown (1968), pour expédier l’ensemble avec originalité et éviter ainsi de nous lasser.

https://www.youtube.com/watch?v=eKpw8T4aItg

S’il se montre fort efficace dans le rythme général et l’enchaînement des actions, on regrette tout de même chez lui une tendance à en faire un peu trop lorsqu’il s’agit de révéler des rebondissements, remontrant à outrance des scènes sous un autre angle dans le but de faire voir des détails qui ont échappé au spectateur et aux protagonistes. Une marque stylistique qui pouvait se justifier dans les deux Sherlock Holmes, mais qui ici finit par lasser et créer des longueurs dans le film. Mais c’est justement cette habitude d’appuyer plus que nécessaire certaines choses qui fait le grand paradoxe de Guy Ritchie, capable d’agacer et de fasciner à la fois.

« Guy Ritchie parvient à s’approprier l’époque qu’il représente et son cinéma. »

Bien sûr, en bon divertissement qu’il est, AGENTS TRÈS SPÉCIAUX – CODE U.N.C.L.E ne se démarque pas par son scénario. Comme un vieux Bond, on se fiche de comprendre totalement les plans de l’entreprise criminelle et on se doute du succès à venir de la mission – les révélations vont trop vite et en ressortent confuses. Car tout est dans le visuel et l’ambiance.
L’excellente musique composée par Daniel Pemberton, bien que trop présente, accompagne à merveille le film et lui offre ce parfait mélange d’action et d’ironie et nous plonge avec délice dans les années 1960. Le résultat final est certes tellement léché qu’on y verrait parfois presque une publicité pour parfum, il n’en est pas moins efficace et d’une classe ultime.

Cela étant également à remettre à la belle distribution. Henry Cavill est la grosse surprise du film, d’autant plus depuis sa prestation sans intérêt dans le tout autant Man of Steel (Zack Snyder, 2013). Sous ses airs de mannequin inexpressif, il parvient ici à incarner à la perfection l’agent Napoleon Solo, aussi charmeur qu’un 007 – les deux personnages ont été inventé par Ian Fleming. Pas suffisant tout de même pour voir en lui l’éventuel successeur de Daniel Craig, mais pas loin. Face à lui, Armie Hammer (Illya Kuryakin) joue à fond la carte de l’agent soviétique froid et dur et ça marche. Le duo formé par les deux acteurs est un régal. Se lançant continuellement piques et défis, comme un duel de cow-boy – surnom d’Illya donné à Solo – dans un western, auquel Ritchie fait évidemment référence. Car le réalisateur développe là les origines de la série, et notamment les débuts d’une collaboration improbable et forcément conflictuelle entre un agent américaine et un agent soviétique en pleine Guerre Froide qui mènera à l’organisation U.N.C.L.E.

Enfin, entre les deux on retrouve Alicia Vikander (Gaby Teller, fille du scientifique recherché par les deux agents) qui nous ravit dans un style encore nouveau, après le film historique Royal Affair, le film fantastique Ex Machina ou encore le film sentimental Mémoires de jeunesse. A la voir danser en partie ivre en pyjama et lunette de soleil sur le nez derrière un Illya presque imperturbable, l’actrice suédoise se laisse portée par un certain humour et en ressort aussi piquante que séduisante.

Photo du film AGENTS TRÈS SPÉCIAUX - CODE U.N.C.L.E
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Au final si AGENTS TRÈS SPÉCIAUX – CODE U.N.C.L.E se contente d’être un divertissement efficace et classique, le plaisir qu’il procure est bien présent. Alliant au mieux action et humour, Guy Ritchie sait garder son spectateur attentif. Mais surtout, il prouve avec ce film la possibilité de modifier légèrement les codes et de faire correctement du « nouveau » avec de « l’ancien ». Il y a dedans une modernité affichée mais Ritchie parvient à s’approprier l’époque qu’il représente et son cinéma, allant même évoquer, volontairement ou non, quelques classiques. Plus qu’une adaptation, son film apparaît au final comme la rencontre réussie de deux périodes.

Pierre Siclier

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