Alors que s’apprête à sortir Grave en DVD et Blu-ray, la jeune Garance Marillier débarque timidement mais décontractée dans les locaux de l’éditeur Wild Side. Son bac en poche, elle se présente devant une poignée de journalistes et bloggeurs, réunit pour parler de son expérience sur le film de Julia Ducournau. Adoptant un ton monotone et un débit lent, elle se montre surtout sincère et sans prétention, répondant de manière directe sans chercher à broder. Rencontre.
Qu’elle a été ta première réaction à la lecture du scénario ?
Je me suis dit « heureusement que c’est Julia qui le fait ». Parce que je la connais et je lui fais confiance. Je sais qu’elle ne me proposerait pas quelque chose qui n’est pas abouti.
Comment es-tu rentrée dans ton personnage, et t’en es-tu détachée après ?
C’est bête à dire, mais c’est grâce au travail, tout simplement. On a eu une grosse préparation. On a travaillé sur la corporalité, la manière de se tenir pour faire exister le personnage. Je me suis concentrée sur ça aussi pour ne pas me confondre avec mon personnage de Justine. Et pour ce qui est de s’en détacher, à la fin du tournage ma seule préoccupation, c’était de dormir.
Qu’elle a été ta principale inspiration pour ton rôle ?
Je me suis beaucoup inspirée de Wagner Moura qui joue Pablo Escobar dans la série Narcos. Il a vraiment une puissance dans son regard. C’est ce qui m’a le plus marqué la première fois que j’ai vu la série, et que j’ai essayé de reproduire ici.
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Tu as une formation musicale à la base, qu’est-ce que cela t’apporte ?
J’ai fait de la percussion donc au niveau du rythme ça m’a vraiment aidé. Et j’essaie de concilier cet héritage, qui me vient de ma famille, avec mon jeu. Parce que les paroles sont à la base des sonorités, de la musicalité. Donc quand on y est sensible, autant s’en servir.
Est-ce qu’il y a des scènes que tu appréhendais ?
Disons pour les scènes qui ont été rajoutées peu de temps avant le tournage. Comme la scène sous les draps, ou celle où je suis devant le miroir. Des scènes très intimes qui te poussent dans tes retranchements. Donc comme on a eu peu de temps pour les répéter, il y avait une légère appréhension.
Est-ce qu’il y a des scènes qui te mettent mal à l’aise quand tu les regardes.
Non, parce que je connais l’envers du décor, du coup ça ne me fait rien.
Qu’elle a été la plus dure à tourner ?
La scène du toit. Mais juste à cause des contraintes. Il neigeait, on avait froid, il était trois heures du matin, donc c’était assez dur.
Quel meilleur souvenir gardes-tu du tournage ?
La scène sous les draps. C’était un moment hyper fort pour Julia et moi. On était dans une osmose de direction. On arrivait vraiment à se comprendre et à aller au bout de son idée.
Que t’as apporté Grave ?
La palette que j’ai pu montrer. Je parle beaucoup de technique, mais c’est ce que ça m’a apporté de pouvoir jouer sur différents tableaux.
Quel avenir imagines-tu pour ton personnage ?
C’est un peu morbide, mais je pense qu’elle se mangerait elle-même. Qu’elle préférerait faire ça plutôt que de faire du mal aux autres.
Que penses-tu du message que peut renvoyer le film ?
Je trouve que c’est une belle manière de parler d’humanité, sans faire un film hyper social, mais en mélanger plusieurs genres. C’est une des forces de Julia de ne pas tomber dans le trop-plein d’explications. Ses métaphores sont sa force à elle. Et puis le message reste intemporel et universel.
Tu t’attendais à un tel succès, notamment à l’étranger, pour un film de genre ?
Non, c’est une vraie surprise. C’est bien parce que ça veut dire que le message est universel.
Ça t’a permis d’avoir des propositions ?
À l’étranger et en France oui, mais malheureusement, je ne peux rien dire pour le moment. Juste, comme je m’oriente vers des rôles et des réalisateurs exigeants, disons qu’on ne me verra pas dans des comédies de Danny Boon.
Comment as-tu vécu cette soudaine exposition, notamment au lycée ?
Forcément, avec Grave, il y a des nouveaux regards qui se sont posés sur moi. Mais je n’y fais pas attention. Surtout au lycée. J’y allais, j’avais mes cours, et je repartais.
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Comment était ta relation avec Julia Ducournau ?
On a une confiance réciproque aveugle. Ça permet d’aller toujours plus loin et de tester plein de choses. C’est une relation forte et rare. Je sais que ça ne sera pas aussi simple avec d’autres metteurs en scène.
Quels seraient les réalisateurs ou réalisatrices avec qui tu rêverais de travailler ?
Vraiment, si on parle de rêve, ça serait David Lynch et Wong Kar-wai.
Propos recueillis par Pierre Siclier