Le cinéaste réputé Sam Mendes nous offre un faux plan-séquence de quasiment deux heures forçant l’admiration. Un pari risqué qui donne naissance à un thriller de guerre désarmant, époustouflant et explosif.
Pris dans la tourmente de la Première Guerre Mondiale, Schofield et Blake, deux jeunes soldats britanniques, se voient assigner une mission à proprement parler impossible. Porteurs d’un message qui pourrait empêcher une attaque dévastatrice et la mort de centaines de soldats, dont le frère de Blake, ils se lancent dans une véritable course contre la montre, derrière les lignes ennemies.
Que vaut ce film attendu depuis de nombreux mois par les cinéphiles ? Retour sur cette immersion totale et captivante au cœur des horreurs de 1917.
Sam Mendes est un réalisateur britannique adepte des projets impressionnants. Après American Beauty qui lui a offert un Oscar (1999), Les Sentiers de la Perdition (2002) ou encore Jarhead : La Fin de l’innocence (2008), il a largement marqué la dernière décennie avec les deux derniers épisodes de James Bond : Skyfall en 2012 et Spectre en 2015. Deux films d’une saga culte portant la marque d’un metteur en scène unique et audacieux. Mais c’est avec un faux plan-séquence de près de deux heures que ce dernier a décidé de revenir au devant de la scène.
Construit techniquement comme l’était le succulent Birdman (2014) d’Alejandro González Iñárritu, 1917 piège ses spectateurs dans un thriller de guerre effroyable au cœur du no man’s land. Plus le film avance, plus les détails se multiplient et offrent à l’action un vaste terrain de jeu pour développer l’histoire de ses deux soldats pris au centre du conflit historique.
Sam Mendes ou les dédales du conflit intérieur, une analyse sur ce réalisateur adulé d’Hollywood
« La première fois que j’ai compris la réalité de la guerre, c’est quand mon grand-père m’a raconté son expérience de la Première Guerre mondiale. Le film ne relate pas l’histoire de mon grand-père, mais s’attache plutôt à évoquer son esprit – ce que ces hommes ont subi, leurs sacrifices, et leur foi en quelque chose qui les dépassait. Nos deux protagonistes doivent participer à une mission périlleuse les conduisant à passer en territoire ennemi afin de livrer un message vital et de sauver ainsi 1600 soldats » raconte Sam Mendes quand il évoque la genèse du projet.
« Notre caméra ne les lâche jamais. Je voulais m’attacher à chacun de leurs pas et sentir leur souffle, et mon chef-opérateur Roger Deakins et moi-même avons discuté de notre envie de tourner 1917 de la manière la plus immersive possible. Nous avons conçu le film pour projeter le spectateur dans ce que nos deux jeunes héros ont vécu. C’est le projet le plus enthousiasmant de ma carrière. »
L’idée d’immerger le spectateur dans une atmosphère pesante et asphyxiante est une des forces principales de 1917. L’action se déroule sur une seule et même journée, prenant nos tripes et nos émotions de force pour suivre la vie de deux jeunes hommes condamnés à une mission où leurs vies sont remises en question continuellement. Aucune pause dans l’intrigue ne permet de reprendre notre respiration face aux événements dramatiques qui se jouent sous nos yeux.
Ces deux soldats, incarnés respectivement par George MacKay et Dean-Charles Chapman, sont aussi resplendissants que le sont les décors. Accompagnés par des acteurs de talents comme Benedict Cumberbatch, Colin Firth ou Richard Madden, ces deux jeunes comédiens font preuve d’un réalisme minutieux dans leur jeu. On aurait presque envie de voir arriver au loin Fionn Whitehead, débarquant du Dunkerque (2017) de Christopher Nolan pour les suivre dans ces moments de stress et d’émotions remarquables.
Après avoir collaboré sur un des épisodes de l’agent 007, le célèbre directeur de la photographie Roger Deakins signe ici son grand retour. Lui qui avait impressionné toute la planète cinéma avec son travail mené de main de maitre sur le Blade Runner 2049 (2017) de Denis Villeneuve. Les flammes qui détruisent un village, les explosions intempestives, le crash d’un avion dans un champ : tout est sublimé par l’image du chef opérateur anglais qui, accompagné de la partition musicale de Thomas Newman, délivre un spectacle viscéral et hallucinant.
Tout comme le proposait Spielberg il y a plus de 20 ans avec Il faut Sauver le Soldat Ryan (1998), le dernier projet de Sam Mendes traverse les événements à travers le paysage physique et mental de la guerre. Emmenant le spectateur dans un voyage fascinant, fatiguant et exaltant au cœur des atrocités de 1917. Le britannique réussi haut la main son pari, laissant derrière lui une nouvelle œuvre incontournable de sa cinématographie et évidemment un grand favori aux Oscars 2020.
Robin Goffin
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• Réalisation : Sam Mendes • Casting : Dean-Charles Chapman, George MacKay, Richard Madden, Benedict Cumberbatch, Andrew Scott, Colin Firth
• Date de sortie : 15 janvier 2020 (France)
• Durée : 1h59min
• Genre : Drame, Historique, Guerre