COUVETURE scaled - [CRITIQUE] STEVE JOBS
© Universal Pictures International France

[CRITIQUE] STEVE JOBS

Mise en scène
6
Scénario
6
Casting
8
Photographie
7
Musique
6
Note des lecteurs11 Notes
5.1
6

Avant Danny Boyle, c’est David Fincher qui avait commencé à travailler sur ce second biopic centré autour de l’emblématique figure d’Apple. Nous ne saurons donc jamais ce qu’aurait été le film si le réalisateur sophistiqué et pessimiste de The Social Network était allé au bout. Car si le nom de l’anglais en remplacement demeurait séduisant, on ne peut pas s’empêcher de penser en sortant de la projection, que nous venons de voir essentiellement un film de scénariste plutôt qu’une nouvelle œuvre de Danny Boyle.

Le scénario de Aaron Sorkin nous embarque dans trois périodes différentes relatant les coulisses précédant une annonce majeure de la firme. De surcroît, nous serons invités à évoluer au plus près de l’homme au fil de ces instants de tension, où doutes, problèmes techniques et personnels ne cesseront de l’assaillir. Sur scène ou dans les loges et en dépit de quelques courts flashbacks, le film se résume donc à une succession de faces-à-faces dialogués entre tout ce beau monde : Steve Jobs, ses proches collaborateurs et sa partie intime représentée par la mère de sa fille puis sa fille elle-même. L’écriture est donc ambitieuse, nous avons rarement assisté à un biopic traité de telle façon, mais déconcertante, ne parvenant à nous capter que par intermittence. Dénué d’enjeu, le film devient intéressant lorsqu’un personnage se heurte à l’entêtement et au pragmatisme de Jobs et qu’il décide de pousser toujours un peu loin son argumentation face au roc qu’est Michael Fassbender. Il est néanmoins regrettable de devoir subir un certain rabâchage dans les discours malgré le changement de décennie.

Photo du film STEVE JOBS
© Universal Pictures International France

Cela nous amène à aborder un autre aspect clairement assumé dans la mise en scène : la théâtralité. La loge, les planches et le public également, seront les témoins de ces nombreuses joutes inégales, tantôt dénuées d’intérêt ou grimpant dans l’intensité. Hommes, femmes et décors gravitent tous autour de Michael Fassbender qui devient lui-même metteur en scène, en plus qu’acteur donnant la réplique (souvent foudroyante), véritable chef d’orchestre de chantiers que nous ne verrons jamais.
Objet étrange, STEVE JOBS l’est également formellement, parsemé par quelques touches héritées du cinéma de Boyle, soit un montage « clippesque » heureusement justifié par la narration à de rares occasions, fonctionnant comme des images mentales attaquant Steve Jobs. Le grain de pellicule de l’image, changeant au fil des époques, fait plus office de gadget geek qu’autre chose, tandis que la musique avec ses sonorités à l’orgue rappelle malgré elle Interstellar.

« Ambitieux, mais déconcertant, le STEVE JOBS de Danny Boyle ne fonctionne finalement que par intermittence. »

Il apparaît regrettable de constater, lorsque approche la fin, la manière dont le film renie tout ce qu’il avait préalablement établi. En ressortant un personnage secondaire de son chapeau, le récit ne veut pas nous quitter avec cette image froide, calculatrice et manipulatrice que nous avions de l’homme vu jusqu’ici. C’est cette lâcheté finale qui nous perd définitivement, les auteurs préférant nous laisser sur une note douce, jouant sur la fibre émotionnelle certes, mais fichtrement malvenue. La pilule ne passe pas.

Au final, on a envie de dire que nous sommes déçus d’être passé à côté du grand film sombre et ample promis non seulement par le casting mais aussi entraperçu dans les diverses bandes-annonces, après un Jobs interprété par Ashton Kutcher qui restera différemment plus mauvais. Mais c’est sans doute exactement ce que voulait être le STEVE JOBS de Danny Boyle. Une œuvre retorse et difficilement accessible, pragmatique et mystérieuse, à l’instar de l’homme qu’elle dépeint pendant plus de 2h. Un homme que l’on a l’impression d’avoir parfaitement cerné et en ce sens, l’exercice est réussi, sans n’avoir paradoxalement rien connu de lui.

Loris Quinto

D’ACCORD ? PAS D’ACCORD ?

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Affiche du film STEVE JOBS

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Titre original : Steve Jobs
Réalisation : Danny Boyle
• Scénario : Aaron Sorkin, d’après l’oeuvre de Walter Isaacson
• Acteurs principaux : Michael Fassbender, Kate Winslet, Seth Rogen, Jeff Daniels
• Pays d’origine : États-Unis
• Date de sortie : 03 février 2016
• Durée : 2h02min
• Distributeur : Universal Pictures International France
• Synopsis : Dans les coulisses, quelques instants avant le lancement de trois produits emblématiques ayant ponctué la carrière de Steve Jobs, du Macintosh en 1984 à l’iMac en 1998, le film nous entraîne dans les rouages de la révolution numérique pour dresser un portrait intime de l’homme de génie qui y a tenu une place centrale.[/column]

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