Pour son dernier film, GRETA, Neil Jordan offre à Isabelle Huppert le rôle d’une psychopathe qui harcèle la naïve Chloë Grace Moretz… et c’est complètement raté !
Isabelle Huppert en méchante folle imprévisible dans GRETA, quelle drôle d’idée ! C’est pourtant celle qu’a eue le réalisateur irlandais Neil Jordan et on sait bien que c’est loin d’être le premier. Que notre Isabelle nationale inspire à ce point les réalisateurs dans ce type de rôle enfermant de femme froide et mystérieuse, qui ne sourit jamais (Eva, Une jeunesse dorée ou Blanche comme Neige et dans une moindre mesure Elle) est incompréhensible… et qu’elle continue à les accepter, encore plus !
Et dire qu’on doit à Neil Jordan, créateur et showrunner de la récente série Les Borgias, les passionnants Entretien avec un vampire ou Michael Collins, il y a certes vingt-cinq ans !
Le film a pour ambition de montrer un personnage terrifiant, proche de celui de Annie dans Misery… Mais on vous prévient tout de suite, GRETA n’atteint pas du tout son objectif et se révèle même un mauvais film sans surprise. La mise en scène est plus pitoyable qu’efficace et la musique plus de pacotille qu’anxiogène. Les situations sont tellement prévisibles et les acteurs sont tous dans un tel sur-jeu, qu’on se demande si on n’est pas dans une parodie de ce type de film. Tout cela est tellement pathétique et grotesque que ce n’est pas l’angoisse mais bien le rire qui s’empare de nous !
Isabelle Huppert est donc Greta Hideg, une femme qui laisse des sacs à main chics dans le métro en espérant qu’on les lui rapporte. C’est ce que fait Frances (Chloë Grace Moretz), une jeune serveuse très bien élevée. Elle est si gentille, la petite provinciale venue à New York, qui vient de perdre sa mère. Elle vit en colocation avec son amie qui ne lui ressemble pas du tout, la délurée Erika (Maïka Monroe). Et elle est un peu fâchée avec son papa qui n’a pas très bien géré le décès récent de son épouse.
GRETA est tellement pathétique que ce n’est pas l’angoisse, mais bien le rire qui s’empare de nous. Et on se demande si nous ne sommes pas dans une parodie du genre !
Il ne faudra pas moins de cinq minutes pour comprendre que les deux femmes vont se rapprocher parce que l’une a perdu sa mère et que l’autre ne voit pas assez sa fille qui vit de l’autre côté de l’Atlantique. Croire que le manque de membres de la famille et la solitude puisse rapprocher nécessairement les deux femmes qui n’ont absolument rien d’autre en commun et comble leur vide affectif est un parti pris de scénaristes et un absolu non-sens auxquels on n’adhère jamais. Car dès le début Greta est si froide et distante et Frances tellement naïve et nunuche qu’il est impossible d’acheter la suite de l’histoire pendant l’heure-et-demi qui reste.
Tous les clichés de la panoplie classique du psychopathe sont si mal amenés dans le scénario qu’ils alourdissent toutes les tentatives du film à vouloir aborder le processus de harcèlement, de manipulation, d’emprise et de folie, qui ne manquait pourtant pas de piquant. Même l’histoire de Greta, distillée au fur et à mesure, n’a aucun intérêt ! Et les dialogues ne sauvent pas non plus GRETA, d’autant que la voix doublée en VF d’Isabelle Huppert… n’est même pas la sienne, privant ainsi le spectateur de cette part que l’actrice sait aussi rendre troublante.
Et quand Stephen Rea, acteur fétiche du réalisateur, fait sa courte entrée comme détective privé, on est déjà morts de rire. À sauver toutefois, une seule scène plutôt bien filmée et atteignant l’objectif de terreur de GRETA : celle dans laquelle Frances rêve qu’elle fait un cauchemar. Bref, vous qui souhaitiez avoir des frissons de terreur provoqués par la méchante Isabelle Huppert, passez votre chemin !
Sylvie-Noëlle
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• Réalisation : Neil Jordan
• Scénario : Neil Jordan, Ray Wright
• Acteurs principaux : Isabelle Huppert, Chloë Grace Moretz
• Date de sortie : 12 juin 2019
• Durée : 1h38 min