Photo du film LE DERNIER SOUFFLE
Crédits : Bac Films

LE DERNIER SOUFFLE, la mort fait partie de la vie – Critique

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LE DERNIER SOUFFLE est l’adaptation par Costa-Gavras du livre éponyme coécrit par le docteur Grange et le philosophe Régis Debray. L’accompagnement des malades en soins palliatifs et leur droit à mourir dans la dignité sont encore des sujets tabou dont les auteurs, puis le réalisateur, se sont saisis avec beaucoup de sensibilité et de douceur.

Lors d’un examen médical, le philosophe Fabrice Toussaint (Denis Podalydès, toujours aussi remarquable de profondeur) fait ainsi la connaissance d’Augustin Masset (Kad Merad, surprenant de naturel). Ce dernier est enthousiaste de pouvoir lui parler de son ouvrage sur les séniors et leur fin de vie. Il propose à Fabrice de visiter son unité de soins palliatifs et de se confronter à la vérité qu’il aime tant. La vérité sera dès lors au cœur des échanges passionnés entre les deux hommes.

Photo du film LE DERNIER SOUFFLE
Crédits : Bac Films

Costa-Gavras, rencontré à Bordeaux lors de la présentation de son film en avant-première aux côtés de Michèle Ray-Gavras, son épouse et productrice, reconnaît que son film lui a permis de « s’être un peu débarrassé de ses terreurs et fantasmes à propos de la mort ». Les deux aspects de la thématique bousculent assurément le spectateur, en résonnance avec le débat éthique qui agite actuellement la société française. Le déploiement des soins palliatifs, dont LE DERNIER SOUFFLE n’hésite pas à dénoncer le manque indigne de places, vient justement d’être annoncé comme objectif gouvernemental.

L’aide active à mourir relève plutôt, quant à elle, d’une question de conscience et donc « idéalement du choix de décider à quel moment on veut s’éteindre, quand la vie n’a plus ni sens ni saveur ». Le réalisateur assure pourtant « quand il fait un film, ne pas savoir comment il va être reçu, ni penser aux réflexions qu’il va déclencher ». Et même si la productrice souhaite montrer ce film -dont le financement s’est révélé très difficile- au Sénat et à l’Assemblée Nationale, il s’agit avant tout pour le réalisateur « d’un spectacle qui ne donne pas de leçons aux gens ».

Rendre supportable l’inacceptable et soulager le départ des mourants.

La pudeur est le maître mot de LE DERNIER SOUFFLE. Ainsi, le film montre très bien comment naît la vocation d’Augustin, qui accompagne dans ses derniers moments son amie Sidonie, interprétée par Charlotte Rampling. L’actrice avait d’abord refusé ce rôle, tant la mise en abîme est perturbante. De même Françoise Lebrun, qui a demandé à Costa-Gavras à ne pas se voir mourir à l’écran, laisse philosopher son personnage sur ce qui se passe quand on rend l’âme. Donnant brillamment à voir comment « la philosophie, pourtant pas assez enseignée dans sa raison d’être, peut aussi aider à prendre de la distance pour aborder plusieurs parties de la vie ».

Le format du film se veut dynamique et multiple, alternant judicieusement le présent et le passé. Ainsi les discussions avec les patients, Florence (Maryline Canto), l’épouse et soutien galvanisant de Fabrice ou son éditeur (Xavier Legrand) et la journaliste (Elisabeth Quin). Les flashbacks narrés par Augustin sont inspirés des situations émouvantes décrites par docteur Grange, dont le réalisateur a repris les « phrases extraordinaires issues de son expérience, qu’aucun scénariste n’aurait jamais pu écrire ». Le tournage dans une unité existante et le casting de véritables médecins et infirmières apportent une touche de vérité supplémentaire, montrant, comme le souligne Michèle Ray-Gavras « la beauté des soins palliatifs »

Photo du film LE DERNIER SOUFFLE
Crédits : Bac Films

Costa-Gavras offre au spectateur la possibilité rare de pénétrer ainsi dans l’antre de la mort, cet entre-deux qui n’est plus tout à fait la vie et pas encore tout à fait la mort. Le laissant sur le flan des parcours et des questionnements de Léa (Agathe Bonitzer), d’Estrelia (Ángela Molina) et de Mme Broquet (Hiam Abbass), à qui Augustin conseille de « permettre à son mari de partir ». Costa-Gavras pose d’ailleurs dans LE DERNIER SOUFFLE un regard plutôt circonspect sur le rôle et le pouvoir que sont suceptibles de s’octroyer les familles.

Affectées par les épreuves de leurs proches ou en colère face à l’impuissance des médecins, elles prennent parfois des décisions ne respectant pas toujours les volontés des patients. Dévoilant ainsi le dernier pan délicat du sujet de LE DERNIER SOUFFLE : l’acceptation de la fin par les familles elles-mêmes. Une acceptation qui ne pourra avoir lieu en France que « si l’éducation et la préparation à la mort deviennent une chose normale dans la société ». Le film replace ainsi la vérité du patient à sa juste place, lui reconnaissant le choix de la connaître et de ne pas la dire à ceux qui restent.

LE DERNIER SOUFFLE se révèle donc un film très émouvant, mais ô combien nécessaire pour faire société. Nul doute qu’il mettra du baume au cœur des spectateurs qui ont déjà traversé l’épreuve de la perte d’un être cher et aidera les autres à conjurer leurs peurs face à l’inévitable.

Sylvie-Noëlle

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Poulet Pascale
Poulet Pascale
Invité.e
19 février 2025 11 h 22 min

Je n’ai pas encore vu « le dernier souffle » ? J’y vais cet après-midi. Je voulais voir un peu les critiques sur ce film …. Ça m’a d’emblée freinée dans mon envie, car d’après certains critiques, ce serait un navet, à les lire ? Mais, j’y vais quand même et je jugerai après la diffusion !

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