line of fire
Crédits : Studiocanal GmbH

LINE OF FIRE, chaud devant – Critique

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Écran noir. Des braises s’élèvent dans la nuit et vont rejoindre le ciel… Puis on est dans une forêt… En flammes… Le chaos… Au milieu, un ours qui essaie de s’échapper, rugissant, courant jusqu’à nous…

Non, Only The Brave n’est pas le nom d’un parfum pour des hommes qui marchent au ralenti le regard tourné vers l’horizon, vendu par une marque qui fait aussi des jeans trop chers et des montres trop grosses. C’est le titre original d’un film passé sous nos radars et sorti en 2017 aux États-Unis et directement en VOD un an plus tard chez nous. Un film inspiré d’une histoire malheureusement vraie et se révélant bien surprenant par rapport à ce qu’il pouvait laisser espérer. C’est réalisé par l’homme derrière Oblivion ou prochainement Top Gun : Maverick, interprété par une galerie d’acteurs tous impeccables et ça s’appelle chez nous LINE OF FIRE… Et ça vaut vraiment le coup d’œil.

Et qui dit biopic dit… Et bien, des genoux qui peuvent vite trembler chez nous, spectateurs. Car on connaît le programme dans ces cas-là. Ou plutôt, on le redoute. Souvent. La mention “histoire vraie” pour nous appâter, la liste d’acteurs connus et reconnus, la musique appuyée… À l’américaine, quoi ! Il y a donc en général de quoi être un peu méfiant face à cet exercice très délicat qu’est le biographical picture, autant que devant la moustache de Taylor Kitsch (contrairement à Jeff Bridges qui a tout rasé pour une fois). Il n’en sera rien. LINE OF FIRE, durant un peu plus de deux heures rondement menées, déploie une mise en scène solide évitant ou faisant oublier les quelques clichés semblant parfois pointer leur nez, au service d’un récit émouvant finalement tout simplement raconté avec sincérité. Celui des Granite Mountain Hotshots, équipe de pompiers d’élite d’Arizona, faisant face à un feu qui laissera malheureusement des traces, l’incendie en question ayant été un événement particulièrement traumatisant là-bas, un des pires dans sa catégorie…

line of fire
©Studiocanal GmbH

C’est l’été 2013 en Arizona et inutile de dire qu’il fait chaud. Alors que la nature n’attend que de rappeler qu’elle est la plus forte, nos pompiers en tenues jaunes se démènent pour que leur chef puisse enfin se débarrasser de l’autocollant trainee (stagiaire) collé au pick-up et les faire monter en grade pour pouvoir opérer pleinement. Enveloppés dans la chaleur locale étouffante, on se retrouve alors rapidement plongés dans l’action au rythme des différents incendies, choisis pour structurer la narration. S’enchaînent alors séquences d’entraînements, situations réelles, moments intimes ou encore contemplation de l’environnement en attendant de devoir aller l’affronter… Les scènes s’enchaînent avec fluidité, et alors que peuvent donc apparaître des stéréotypes déjà vus (notamment l’américain moustachu un peu lourd — qui peut même ouvrir des bières à la tronçonneuse !), l’inévitabilité et la puissance des éléments viennent recentrer et resserrer le récit sur le centre de toutes les attentions : le feu.

Kosinski, amateurs de plans bien composés, nous plonge avec efficacité dans les flammes et nous fait ressentir les épreuves traversées par ces hommes, en nous distillant aussi d’impressionnantes vues d’ensemble venant nous exposer l’étendue de la menace orangée à venir. Des plans qui se révèlent travaillés, mais finalement jamais frimeurs — à l’image de celui, au ralenti et au rythme d’AC/DC, sur les pales d’un hélicoptère qui aurait pu nous propulser tout droit dans une ambiance digne d’un Kong : Skull Island, mais dont le réalisateur fait le choix judicieux de ne pas abuser. Car au final, les moments où menace une démonstration hors de propos à base d’américains hyper balèzes sont finalement brefs à chaque fois et témoignent de la volonté de ne pas perdre de vue le sujet ni d’en faire trop. En témoigne un moment éloquent et très joli : ce lent travelling, sans coupes, jusqu’au visage du personnage de Josh Brolin, assis, avec celui de Jeff Bridges sur un porche à la nuit tombée, qui se livre à propos de l’image qui le hante depuis longtemps. À la faveur de choix tous émouvants mais sobres, le réalisateur résume toute son intention dans ces quelques instants : se mettre au service d’une histoire puissante à raconter avec le plus de respect possible.

no way out gegen die flammen
© Studiocanal Gmbh

On est donc happés par le quotidien de cette équipe essayant d’obtenir leur certification et ce sera, en parallèle de l’arc narratif du personnage de Brolin, impeccable et charismatique en chef, celui de Miles Teller qui guidera le film et en incarnera le symbole. Au début chômeur perdu et drogué, il trouvera dans ce boulot et dans l’arrivée d’un enfant de quoi se transcender et devenir quelqu’un d’autre. Ce qui donnera, grâce à l’interprétation de l’acteur principal de l’inoubliable Whiplash, de très beaux moments, le regard vidé par la drogue laissant par exemple place à celui émerveillé du père ou concerné du collègue qu’il devient. Au même titre que la présence de Jennifer Connelly, dont le rôle de femme soutenant son homme très prit par son travail pouvait aussi laisser craindre certains écueils. Bien au contraire. L’actrice, incroyable de justesse et d’émotions, parvient à exister brillamment tout au long du film, à l’image d’une mémorable séquence d’engueulade en voiture pendant laquelle il lui suffit d’un déraillement de voix ou d’une intonation pour bouleverser complètement. Enfin, la partition puissante et touchante de Joseph Trapanese, déjà à l’œuvre sur Oblivion, achève de donner au film sa dimension à la fois spectaculaire et émouvante et de le guider sur les sentiers du biopic inspiré. Un biopic au sein duquel une forme de pureté semble émaner, tous ses composants œuvrant dans le même sens pour rendre hommage à ces hommes courageux du titre original, œuvrant pour le bien commun quand il n’y a plus d’autres solutions que de se serrer les coudes face à une catastrophe plus forte que nous.

Bref, un film réellement solide qui, s’il présente certaines situations déjà vues bien souvent au cinéma, notamment en ce qui concerne la sacro-sainte famille américaine, se montre remarquable dans sa capacité à nous embarquer dans son récit terrible aux côtés de ces hommes et de leurs familles. Capable de nous faire vivre les moments les plus beaux comme les plus dramatiques l’instant d’après. À l’image de la vision qui hante le chef de l’équipe depuis des années, l’ours en flammes courant au milieu du chaos, essayant en vain de s’échapper : « La chose la plus belle et la plus terrible que j’ai vu ». On vous croit.

Simon BEAUCHAMPS

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Titre original : Only the brave
Réalisation : Joseph Kosinski
Scénario : Ken Nolan, Eric Warren Singer
Acteurs principaux : Josh Brolin, Miles Teller, Jeff Bridges
Date de sortie : 12 septembre 2018 en VOD
Durée : 1h50min
3.5

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