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Crédits : Pathé

PROXIMA, un bel hommage aux femmes (astronautes) – Critique

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PROXIMA, le 3ème long métrage de Alice Winocour, plonge dans le quotidien d’une femme astronaute et son dilemme intime. Avec Eva Green, bluffante.

Alice Winocour dit avoir voulu « montrer la double difficulté des femmes à affronter leur culpabilité inhibante face à la construction sociale de la mère parfaite et à devoir s’adapter à un monde pensé par et pour les hommes ». Et elle y parvient parfaitement dans PROXIMA en donnant à voir Sarah (Eva Green), astronaute sur le point de partir sur la planète Mars.

Tout irait bien dans le meilleur des mondes pour cette jeune femme qui va enfin pouvoir concrétiser son rêve d’enfance, si elle n’était confrontée à la peine de laisser sa fille Stella (Zélie Boulant-Lemesle) pendant un an, le temps de la mission. La petite fille a huit ans et même si elle sait depuis longtemps que sa maman peut partir d’un jour à l’autre, c’est bien difficile pour elle d’accepter le fait que ce départ va modifier le fonctionnement de leur couple fusionnel. Car Sarah est séparée du père Thoma (Lars Eideinger) astrophysicien lui aussi, et c’est lui qui va devoir s’occuper de sa fille a plein temps.

Photo du film PROXIMA
Crédits : Pathé

PROXIMA plonge donc le spectateur dans la palette des multiples ressentis de Sarah, depuis le moment de l’annonce jusqu’au jour du départ de la fusée. Car il ne s’agit pas d’un énième film sur un vol spatial mais bien sur ce qui se passe avant, sur terre. D’autant qu’entre la préparation, l’entraînement très lourd et la mise en quarantaine qui précède le grand jour, Sarah doit aussi faire sa place auprès de ses deux coéquipiers dont Mike (Matt Dillon) macho américain de service et c’est d’ailleurs assez malin de montrer que c’est l’équipier russe Aleksei (Anton Ochievski) qui apaise les conflits entre l’américain et la française.

Bien qu’arrivée à ce stade de l’épreuve elle doit pourtant encore faire ses preuves et faire en sorte qu’on ne voit en elle que l’astronaute et non plus la femme. La force de PROXIMA est son très grand réalisme, avec un aspect quasi documentaire, mais rien de plus normal puisque la réalisatrice a fait un long travail de recherches et de rencontres de femmes astronautes. Elle a aussi tourné dans les lieux encore jamais explorés au cinéma auparavant comme Star City et Baïkonour.

PROXIMA rend un bel hommage aux femmes astronautes et aux femmes d’une manière générale, les encourageant à ne jamais être obligées de choisir entre rêves et maternité.

Le film est féministe en ce sens qu’il fera écho à de nombreuses mères et même si la démonstration est poussée à l’extrême, elle n’en demeure pas moins vraie. Car toutes celles qui partent en long déplacement professionnel éprouvent ce double sentiment. Le sentiment d’accomplissement professionnel parfois entremêlé d’une certaine fierté à avoir obtenu des responsabilités et à les assumer, ainsi qu’une petite pointe d’amertume qui empêche concentration et plénitude. Parce que, outre la fameuse charge mentale de la gestion de l’organisation pendant leur absence (même si le père est présent, il est reconnu socialement que ce sont les mères qui s’en occupent le plus souvent), il faut aussi gérer le sentiment de culpabilité et d’appréhension qui arrache le cœur quand on laisse ses enfants.

La question n’est pas de savoir si les hommes ressentent ce sentiment- le fameux Mike est également triste de quitter ses deux garçons-, car ce n’est pas le sujet. Le sujet, c’est cette joie de femme de pouvoir enfin réaliser ses rêves, qui se retrouve parfois assombrie par la tristesse de quitter ses petits. Comme le montre très bien PROXIMA dans ces moments très émouvants du tee-shirt empreint de l’odeur de Sarah qu’elle laisse à Stella où de leurs retrouvailles presque animales, peau contre peau, qui les montrent serrées l’une contre l’autre, se touchant, se reniflant, se reconnaissant.

Photo du film PROXIMA
Crédits : Pathé

Et Sarah est aussi confrontée à ses propres paradoxes : celui de refuser les traitements de faveur parce que femme -comme accepter la suggestion de Mike d’alléger ses entraînements-  tout en dérogeant au protocole en faisant assister sa fille au débriefing de l’équipe. Mais que Stella soit ou non à ses côtés, Sarah est toujours dans une forme d’intranquillité qui nuit à sa concentration. L’inquiétude – certains dialogues et situations sont d’ailleurs répétitifs et font tourner un peu le film en rond- et le chantage affectif de Stella la rongent. La caméra d’Alice Winocour est parfois assez froide, comme en écho à l’impossibilité de Sarah d’exprimer ses émotions. Obligée de rester à bonne distance de ses préoccupations intimes, car il y va de sa représentation d’astronaute. C’est son corps qui s’exprime à sa place, notamment avec cette vilaine plaie qui la fait souffrir et ne se referme pas. La métaphore de sa propre souffrance.

Car le pire pour Sarah, c’est d’accepter de ne plus faire partie de la vie de sa fille pendant cette longue période. Être en retrait de sa propre vie. Tout en envisageant qu’elles ne se reverront peut-être jamais. Les deux actrices sont parfaites : Eva Green excelle dans ce rôle à la fois très physique et très psychologique, ainsi que Zélie Boulant-Lemesle, qui incarne un personnage que la réalisatrice souhaitait « plus terrienne que la mère partie dans les étoiles, avec une forme d’étrangeté et de poésie ». PROXIMA rend donc un bel hommage aux femmes astronautes qui ont confié à la réalisatrice les photographies prises avec leurs enfants – que l’on voit au générique final- et à l’émancipation des femmes d’une manière générale, les encourageant à trouver le meilleur point d’équilibre pour concilier passion et maternité, sans jamais être obligées de se sacrifier pour l’une ou l’autre.

Sylvie-Noëlle

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Titre original : Proxima
Réalisation : Alice Winocour
Scénario : Alice Winocour, Jean-Stéphane Bron
Acteurs principaux : Eva Green, Matt Dillon, Sandra Hüller
Date de sortie : 27 novembre 2019
Durée : 1h47min
3.5
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