L’EXTRAVAGANT MR. RUGGLES
Zasu Pitts, Charles Laughton, Charles Ruggles and Maude Eburne in Leo McCarey's RUGGLES OF RED GAP (1935). Courtesy Film Forum/Photofest. Playing 4/4-4/10

L’EXTRAVAGANT MR RUGGLES – Critique

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Paris, 1908. Lord Burnstead (Roland Young) est en villégiature avec son valet, Mr Ruggles (Charles Laughton). Au cours d’une partie de poker arrosée, un riche américain du Midwest, Egbert Floud (Charles Ruggles !), « gagne » le domestique. Ruggles se voit donc contraint de le suivre aux Etats-Unis, qu’il considère comme une véritable terre de sauvages.

Marmaduke Ruggles est une caricature de valet : maniéré, guindé, traditionnel, choqué par le mode de vie à l’américaine, très éloigné de ses habitudes. L’humour du film se dégage en grande partie des nombreuses situations provoquant ce décalage, soutenues par des cadrages faisant entrer et sortir les personnages dans un tempo précis et efficace (la photographie, à côté de cela, n’est pas particulièrement remarquable).

La stature qu’adopte l’acteur Charles Laughton, raide mais aérienne, annonce la démarche de Jacques Tati et de Mr Hulot. A cette rectitude s’oppose la mobilité de son visage, particulièrement de ses yeux, qui lui permet de jouer finement sur les expressions et d’amplifier ainsi le comique issu des dialogues. Il joue beaucoup, dans un premier temps, sur le choc que représente le changement de maître et de continent, pour ensuite laisser ressortir sa bonhommie. Sa figure aux airs poupons, d’une extrême douceur, nous emballe immédiatement et l’on partage la « douleur » de son expatriation. Mais Leo McCarey emploie surtout Charles Laughton dans un registre qui restera unique dans la filmographie de l’acteur anglais. On trouve nombre de scènes dans lesquelles Laughton est libéré, clownesque, complètement imprévisible. Jusque dans une séquence de beuverie parisienne absolument mémorable !

Charles Laughton, bien loin de la noirceur de son seul film en tant que réalisateur, La Nuit du chasseur, assure à lui seul une grande partie de la comédie. Mais il est entouré de quelques acteurs qui méritent d’être cités. On connaît surtout Roland Young pour son rôle d’oncle lubrique dans l’excellent Indiscrétion. Ses répliques marmonnées à l’extrême, à peine audibles, constituent un argument comique de taille. Mary Bolland, interprétant Effie Floud, la femme d’Egbert, sortes de Jacqueline Maillan des années 30, est impressionnante ! Femme forte, s’affirmant dans le film comme dominatrice de son mari, elle incarne la vision ironique de Leo McCarey d’un féminisme inégal et caricatural. Son interprétation et sa présence créent un contraste parfait avec Charles Laughton et Charles Ruggles , qu’elle dépasse d’une tête !

Un petit bijou d’humour burlesque.

Leo McCarey livre dans L’EXTRAVAGANT MR. RUGGLES une vision très ambivalente des Etats-Unis, notamment des pionniers: d’un côté un peuple rude, au milieu duquel ceux qui se donnent de grands airs sont ridicules ; de l’autre une communauté honnête et droite, faisant fi des convenances, capable d’un humanisme Lincolnien. Les barrières sociales, qui ont réglé et encadré toute la vie de Ruggles, volent en éclat. Les portes s’ouvrent pour lui, faisant du film un voyage initiatique vers la liberté et l’achèvement de sa vie.

L’EXTRAVAGANT MR. RUGGLES, film plutôt méconnu dont on parle peu sur les bancs des écoles de cinéma, reste un petit bijou d’humour burlesque. Vous l’aurez compris, il est à découvrir ou à revoir absolument, tant il se voit encore avec délectation ! Il fait partie de ces films anciens qui ne vieillissent pas, et dont le rythme tien le spectateur d’un bout à l’autre.

Scénario
Interprétation
Burlesque
Photographie
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4.2

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Rédactrice depuis le 25.03.2015
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