True Detective
Vince Vaughn est Frank Semyon dans True Detective Saison 2 © HBO

[CRITIQUE SÉRIE] TRUE DETECTIVE S02E03

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Mise en scène
6.5
Scénario
7
Casting
8
Photographie
5.5
Mystère
6
Montage
8
Note des lecteurs2 Notes
6.3
6.8

[dropcap size=small]S[/dropcap]i le meilleur du deuxième épisode se situait à la fin, c’est bien le début de Maybe Tomorrow qui vaut le détour. Dans une introduction aussi drôle que dérangeante, réminiscence de l’atmosphère onirique de Only God Forgives ou Mulholland drive, Ray Velcoro (Colin Farrell) hallucine aux portes de l’enfer.

Autant prévenir tout de suite, il sera difficile de parler de cet épisode sans vous dévoiler certains éléments de l’intrigue. Vous qui entrez ici, perdez tout espoir [de ne pas être spoilé], à moins de lire cet article sans cliquer sur les [+] qui vous dissimulent les principales étapes de l’intrigue depuis la fin de l’épisode 2 de cette nouvelle saison de TRUE DETECTIVE.

[toggler title= »Spoiler : fin de l’épisode 2, début épisode 3″ ]Chargé par le maire de Vinci d’entraver l’enquête, Ray Velcoro (Colin Farrell) se confronte au criminel Frank Semyon (Vince Vaughn) qui l’oblige à suivre la piste de Caspere. Ray débarque seul dans la résidence secondaire de l’administrateur financier qui liait les intérêts de la pègre à ceux des autorités de Vinci. Ray a tout juste le temps de noter quelques indices, qu’un intrus masqué le surprend et lui tire deux salves dans le buffet. L’épisode 2 se terminait sans que l’on sache si Ray était vivant ou mort.

Le créateur de TRUE DETECTIVE joue longtemps sur l’ambiguïté, en nous présentant Ray et son père dans l’antichambre de la mort, qui discutent des erreurs qui l’ont amené à se trouver au bord du gouffre. Dans un spasme de souffrance, Ray se réveille en état de choc dans la résidence secondaire de Caspere. Il arrache sa chemise pour constater qu’il est presque indemne, le tireur ayant employé des balles anti-émeutes.[/toggler]

Le bad-trip de Ray Velcoro nous permet d’entrer un peu plus dans la psyché de ce personnage trouble, et conforte Colin Farrell comme l’atout majeur de la deuxième saison de TRUE DETECTIVELa durée assez longue de cette scène, outre le suspens qu’elle installe, permet d’en apprendre également davantage sur l’auteur de TRUE DETECTIVE. Le parallèle avec Only God Forgives de Nicolas Winding Refn ne se situe pas seulement au niveau des thèmes traités (la rédemption, le poids de la famille, l’échec, etc.) mais également sur le plan du rythme tout autant distendu et de l’importance accordée à la symbolique.

© HBO
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La saison 1 lorgnait déjà sur la métaphysique, mais uniquement comme point d’achoppement entre les deux personnages principaux interprétés par Matthew McConaughey et Woody Harrelson, ou pour remettre en question leurs croyances en fonction des événements insoutenables auxquels ils étaient confrontés.

On touche ici un impensé de Nic Pizzolatto dans cette deuxième saison. En répétant son intérêt pour la métaphysique malgré une intrigue complètement différente, l’auteur de TRUE DETECTIVE fait preuve d’une obsession personnelle davantage qu’il ne sert son histoire. Dans la saison 1 les crises existentielles des personnages étaient directement liées à leur enquête, puisqu’ils tentaient d’élucider des meurtres rituels sur des jeunes femmes innocentes. Dans la saison 2, Ray et ses acolytes tentent de résoudre le meurtre opportuniste d’une crapule, sûrement assassiné pour récupérer son argent. Une réalité bassement matérielle qui ne permet pas de porter la symbolique de cette saison 2 au même niveau que la précédente.

Mon avis personnel sur Only God Forgives est qu’en dépit de qualités indéniables, le film est « creux » à cause d’une symbolique qui tourne à vide, indépendante de l’histoire. C’est la même impression qui se dégage au bout de trois épisodes de cette nouvelle saison de TRUE DETECTIVE. Le parallèle en dit beaucoup également sur la posture « d’Auteur » que Nic Pizzolatto voudrait acquérir. Au-delà de cette ambition légitime, quel message le créateur de TRUE DETECTIVE veut-il délivrer ?

« En répétant son intérêt pour la métaphysique malgré une intrigue complètement différente, l’auteur fait preuve d’une obsession personnelle davantage qu’il ne sert son histoire. »

Resté sur une note en suspens dans l’épisode 2 , nous éprouvions enfin de l’empathie pour Ray Velcoro (Colin Farrell), Frank Semyon (Vince Vaughn), Ani Bezzerides (Rachel McAdams) et Paul Woodrugh (Taylor Kitsch), car leur avenir était incertain. Nic Pizzolatto trouve nécessaire dans Maybe Tomorrow de baliser une nouvelle fois ses personnages par des informations supplémentaires, qui auraient très bien pu être reportées plus tard afin d’entretenir le suspens.

[toggler title= »Spoiler : back story des personnages » ]Présenter le père de Ray Velcoro comme une figure inquiétante lors de ses hallucinations entre la vie et la mort était une excellente idée, mais nous le remontrer plus tard dans l’épisode pour insister sur la relation dysfonctionnelle que Ray a avec son père était inutile.

© HBO
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Certaines grosses ficelles sont tirées sans ménagement, comme montrer le malaise de Paul (Taylor Kitsch) face à sa relation homosexuelle refoulée datant de son passage à l’armée, avant de le confronter à des hommes prostitués homosexuels… Oui on avait compris que les regarder en face lui était difficile, merci. Nous montrer cette relation plus tôt, dans le pilote ou l’épisode 2 aurait été plus subtil. Surtout vu la longueur qu’a pris l’auteur pour nous détailler la relation foireuse de Paul avec sa copine dans les deux premiers épisodes. [/toggler]

Une bonne moitié de Maybe Tomorrow est trop explicatif par rapport au précédent épisode. Sans réussir à instiller de nouveaux éléments intrigants, on perd en mystère au bénéfice de l’efficacité. Certes, l’épisode se termine sur un regain d’intérêt[spoiler mode= »inline »] grâce à une scène de course-poursuite avec le suspect[/spoiler], mais le ressort narratif apparaîtra peut être artificiel à la lumière des prochains épisodes. Arrivant de manière complètement fortuite, cette conclusion n’est absolument pas une « récompense » des efforts de nos trois enquêteurs.

Le duo Colin Farrell/Vince Vaughn marche bien, au détriment des 2 autres personnages. Au delà du scénario, on en vient à se poser des questions sur la pertinence du casting, pourtant en or sur le papier. Après 3 épisodes en leur compagnie, l’intérêt pour voir à l’écran Taylor Kitsch et Rachel McAdams se fait de plus en plus ténu.

 Taylor Kitsch est Paul Woodrugh © HBO
Taylor Kitsch est Paul Woodrugh © HBO

La décision de changer de réalisateur entre Night Finds You et Maybe Tomorrow contribue à l’impression que la saison 2 de TRUE DETECTIVE n’est pas un show mature, et continue de se chercher des fondations solides.  A peine après avoir donné le temps à Justin Lin de s’échauffer, il est remercié au profit d’un nouveau réalisateur (Janus Metz Pedersen) qui semble faire ses armes devant nous, avant de pouvoir se sentir à l’aise avec les acteurs. La direction d’acteurs a ceci de délicat qu’elle combine des techniques objectives et la création d’un lien émotionnel entre le réalisateur et ses acteurs, afin qu’ils aient confiance pour se lâcher sur le plateau. Cette relation ne peut s’acquérir qu’avec le temps, ce qui a semble-t’il manqué à Janus Metz Pedersen.

On avait parlé de la technique de direction d’acteurs utilisée dans l’épisode 2 qui consiste à leur faire manipuler un objet pour exprimer une émotion (blocking), plutôt que de leur demander de faire des grimaces forcées. Ici, Janus Metz Pedersen repart de zéro et ne retient rien de « l’apprentissage » de Justin Lin opéré entre l’épisode 1 et l’épisode 2. A part Colin Farrell et dans une moindre mesure Vince Vaughn, les acteurs interagissent comme des robots. On imagine bien que ce n’est pas faute de talent, mais plutôt d’un manque d’espace nécessaire à une véritable performance.

[toggler title= »Spoiler fin épisode 3″ ]En témoigne la bagarre entre Frank Semyon (Vince Vaughn) et un de ses acolytes récalcitrants. Après avoir tabassé le mafieux qui contestait son autorité, Frank décide de lui arracher ses dents en or. On a à peine le temps de voir la pince s’approcher, que le réalisateur passe à la scène suivante. Certes, l’ellipse est plus subtile qu’un plan frontal, mais on aurait aimé lire sur le visage de Frank l’émotion qui l’anime au moment de passer à l’acte, histoire de commencer à percer la carapace de ce personnage pour l’instant très monolithique.[/toggler]

© HBO
© HBO

L’intérêt principal de cet épisode est de voir l’intrigue s’accélérer, on sent que la machine a pris son élan et promet une tension crescendo. Le montage est bien plus fluide et offre une meilleur expérience visuelle. Maybe Tomorrow s’éparpille comme les deux précédents épisodes de la saison 2 de TRUE DETECTIVE en une myriade de sous-intrigues dont la résolution exhaustive relèverait de l’exploit. Rien que pour avoir le plaisir de nous donner tort, on veut bien suivre Nic Pizzolatto à travers Vinci sur les cinq épisodes qui nous séparent du final. 

True Detective@thomas_coispel

[bctt tweet= »L’auteur de TRUE DETECTIVE fait preuve d’une obsession personnelle davantage qu’il ne sert son histoire. »]

[divider]INFORMATIONS[/divider]

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© HBO
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[column size=one_half position=last ]Récapitulatif des épisodes

Titre original : Maybe Tomorrow
Réalisation : Janus Metz Pedersen
Scénario : Nic Pizzolatto
Acteurs principaux : Colin Farrell, Rachel McAdams, Taylor Kitsch, Kelly Reilly et Vince Vaughn
Pays d’origine : U.S.A
Sortie : 05/07/15
Durée : 59mn
Distributeur : HBO / OCS
Synopsis : Un meurtre bizarre rassemble trois enquêteurs et un criminel, qui devront chacun se frayer un chemin à travers les conspirations de Vinci

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[divider]BANDE-ANNONCE[/divider]

https://youtu.be/qdESYEFF2TQ

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