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[CYCLE] LE DÉCALOGUE – 4 : tu honoreras ton père et ta mère

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À l’occasion de la ressortie en version restaurée des dix parties du Décalogue de Kieslowski distribuées par Diaphana, retour sur l’une des œuvres fondatrices du cinéma est-européen post-Walesa, un monument de dix heures réalisé par l’un des plus grands metteurs en scène de son temps. Fort de thèmes variés naviguant entre social et religion, nous chroniquerons l’intégralité des épisodes à quatre mains, avec chaque jour un nouvel article. Étude au cas par cas au sein d’une analyse suivie plus large : nous découvrirons l’auteur derrière le patchwork, la pensée derrière le drame humain.

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Avec « Tu honoreras ton père et ta mère« , Kieslowski raconte la relation entre un père et sa fille – celle-ci est bouleversée quand la jeune femme découvre une lettre de sa mère, cachée dans un tiroir. Les blessures du passé refont surface tandis que le régime quotidien se voit renversé. Ce quatrième épisode évoque autant les conventions familiales que le flou relationnel qui peut entourer la vie commune : il était difficile d’évoquer l’inceste sans tomber dans la subversion, mais c’est bien avec la poésie qu’on lui reconnaît que Kieslowski s’est attaqué à ce sujet tortueux.

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LE DÉCALOGUE 4 – Tu honoreras ton père et ta mère

Chaque épisode du DÉCALOGUE semble être rythmé par une relation centrale et décisionnaire des articulations narratives qui se feront autour d’elle. Comme l’indique le commandement associé à ce quatrième volet, Tu honoreras ton père et ta mère, il s’agit ici du lien parental, et plus particulièrement père-fille. C’est le véritable ciment du métrage, dont le ressort principal est d’ailleurs la mise en danger de ce rapport familial. Plus qu’un prétexte, c’est donc un moteur.

Le lien de la parentalité est au cœur de toutes les spiritualités – Kieslowski, dès les premières secondes de cet épisode, questionne la nature même de ce lien. L’ambiguïté constante qu’il formule vis-à-vis de ce rapport pourra perturber, elle est en effet tout sauf chrétienne : en réécrivant le regard de l’engeance, il fait de l’amour filiale une sensualité quasi-œdipienne. LE DÉCALOGUE 4 n’est pas un film sur l’inceste, mais il n’hésite pas à l’évoquer de façon frontale.

« Un père est un père, un amant est un amant – les deux sont incompatibles, il n’y a pas d’ambivalence. Que se passerait-il si, soudainement, cette affirmation était remise en question ? »

Le metteur en scène illustre, d’une certaine manière, la fluctuation du regard en fonction des conventions sociales. Un père est un père, un amant est un amant – les deux sont incompatibles, il n’y a pas d’ambivalence. Que se passerait-il si, soudainement, cette fonction était remise en question ? Tout prendrait un autre sens, et le regard changerait. Kieslowski ne tend pas à remettre en cause le bien-fondé de cette morale génétique, mais davantage à démontrer ses propres paradoxes : un homme vivant avec une jeune femme qui n’est pas sa fille est-il son père ou son amant ?

Lorsque l’incertitude est trop prononcée, le chaos apparaît. Les personnages hésitent se craignent, avant de finalement fuir devant une vérité perturbante. C’est la destruction du doute qui efface le malaise : faire le choix d’une admiration par rapport à une autre, balayer les virages et continuer le chemin qui les avait menés jusqu’ici. D’une certaine façon, ils rejettent et embrassent le passé d’un même mouvement.

Comme d’habitude chez Kieslowski, la fonction du symbole est centrale. Cet obstacle se retrouve matérialisé sous la forme d’un objet. Tel un MacGuffin sentimental, la lettre incarne tous les doutes, les solutions et les réponses des personnages qu’elle concerne. C’est un Chat de Schrödinger filmique – fermée, elle est un mystère et pose des questions ; ouverte, elle donne ses réponses, mais celles-ci sont irréversibles, ineffaçables.

« La lettre incarne tous les doutes, les solutions et les réponses des personnages qu’elle concerne. C’est un Chat de Schrödinger filmique – fermée, elle est un mystère et pose des questions ; ouverte, elle donne ses réponses, mais celles-ci sont irréversibles, ineffaçables. « 

LE DÉCALOGUE 4 évoque la vérité, sa quête et son importance. S’il est de coutume de faire de la recherche de sens un corollaire de celle de cette-dite vérité, Kieslowski fait lui, l’inverse. Et si, le sens se trouvait dans son rejet ? Et si c’était dans la non-réponse que l’on trouvait le bien-être ? Ce n’est pas tant la définition d’honorer que Kieslowski oppose à sa sphère sociale, mais celle de père et de mère. Qu’est-ce que serait un parent, finalement ?

C’est dans le regard que se transmettent les clés – les yeux qu’un personnage pose sur un autre. Ils seront tantôt mélancoliques, tantôt sensuels, tantôt admiratifs, tantôt rancuniers. Parfois, ils seront même juges, comme ceux de ce personnage fantôme qui semble hanter les nœuds narratifs de chaque épisode et qui, par sa simple apparition, décidé indirectement du dénouement. S’agit-il d’une conscience, d’un dieu ? Ou est-il Kieslowski lui-même qui, en Créateur, donne physique à sa morale philosophique ?

Les mots deviennent fumée, les amours malsains deviennent cendre. On pourrait penser que rien n’évolue, car la situation ne change pas – mais seulement d’un point de vue externe. Ces perturbations auront pourtant permis l’installation du calme et de la confiance : le point d’orgue est ni amère ni pessimiste, et c’est une surprise quand on regarde l’ensemble du DÉCALOGUE. Ce n’est peut-être pas un hasard que ce soit cette conclusion anarchiste qui aboutisse à ce relatif bien-être – Kieslowski remet à nouveau en question les conventions, mais il ne les rejette pas : pour lui, tels un phénix, elles seraient destinées à renaître de leurs cendres ; plus solides et plus saines.

KamaradeFifien

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Affiche du cycle de films LE DÉCALOGUE

Titre original : Jeden Dekalog
Réalisation : Krzysztof Kieslowski
Scénario : Krzysztof Kieslowski
Acteurs principaux : Maja Komorowska, Wojciech Klata, Henryk Baranowski
Pays d’origine : Pologne
Sortie FR : 29 juin 2016
Sortie POL: 1988
Durée : 10 parties de 50 min
Distributeur : Diaphana Distribution

[toggler title= »Synopsis » ]Les dix commandements vus par Krzysztof Kieslowski : Un seul Dieu tu adoreras, Tu ne commettras point de parjure, Tu respecteras le jour du Seigneur, Tu honoreras ton père et ta mère, Tu ne tueras point, Tu ne seras pas luxurieux, Tu ne voleras pas, Tu ne mentiras pas, Tu ne convoiteras pas la femme d’autrui, Tu ne convoiteras pas les biens d’autrui.[/toggler]

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