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[critique 2/2] LOVE

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7.8

[dropcap size=small]T[/dropcap]out a commencé par une rencontre impromptu dans le bus se dirigeant vers le grand palais à Cannes … deux vieilles dames se sont prises de sympathie pour nous et ont décidé de nous donner des invitations pour la séance de minuit du soir même (mercredi 20 mai). La séance en question était le dernier film de Gaspar Noé, que l’on disait très choquant et qu’elles ne voulaient pas aller voir. Heureuses de monter les marches et curieuses de voir ce « film érotique », nous n’avons pas hésité à prendre ces invitations. Dans la queue en bas du palais, vers 23h45, nous avons sympathisé avec un vigile qui était très étonné que deux jeunes filles aillent voir « un porno en 3D ». En tant qu’ingénues qui n’avaient pas suivies la polémique autours du film et étaient là par hasard, nous allions de surprise en surprise.

Enfin dans la salle, Gaspar Noé et ces acteurs (complètement défoncés) font leur entrée, la lumière s’éteint, le film commence… La salle du grand palais pouvant accueillir prés de 4 000 personnes, il y avait une ambiance particulière et un public très enjoué. On avait presque l’impression d’être avec un public de théâtre tant celui-ci applaudissait ou riait à l’unissons sitôt qu’une scène lui plaisait. Cette ambiance et cette expérience en 3D ont fait du film une véritable expérience de spectateur, mais aussi une agréable surprise!

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Wild bunch distribution

Effectivement c’est un beau film sur le fond puisqu’une histoire d’amour passionnelle (classique mais toujours séduisant) et sur la forme puisqu’il y a un vrai travail esthétique (et pas seulement parce que les acteurs sont très beau). Tout d’abord un léger synopsis pour vous guider sans vous spoiler. L’histoire est construite en flash back, un matin Murphy (Karl Glusman) reçoit un appel de la mère d’ Electra (Aomi Muyok) son ancienne copine, qui la cherche désespérément depuis 2 mois. Cet appel déclenche, avec l’aide de l’opium, le souvenir de leur union passé. Cette relation est principalement composée d’amour, de sexe et de drogue. Electra et Murphy sont deux jeunes un peu paumés qui vivent à Paris. Il veut être réalisateur et souhaite faire des film où l’on voit du « sexe, du sang et des larmes » parce que c’est ce qui compose la vie et ce qu’on cache par soucis de bienséance (on peut voir ici une note d’intention de la part de Gaspar Noé, qui fait le film dont parle son personnage). Elle est peintre et n’hésite pas fleureter avec le galeriste Noé (joué par Gaspar Noé lui même) pour vendre ses toiles. Ils s’aiment et ils le montrent, bien sûr les scènes érotiques sont nombreuses et parfois un peu longues, mais elles ne sont pas choquantes ou sales parce que contrairement au porno c’est aussi des scènes d’amours (on est très loin de la scène de viole « d’Irréversible »).

« Le film-choc de Cannes est donc, avant d’être une polémique pour affoler les médias, une expérience de cinéma qui met tous nos sens en éveil. »

La forme quant à elle est très travaillée, dans les cadrages, la lumière et le montage. On est heureux de voir la 3D autre part que dans un film d’action ou de science fiction, celle-ci n’est pas exagérée, elle déforme parfois un peu les corps et donne une qualité d’image particulière. Il y a des scènes où elle est particulièrement efficace, je pense évidemment à la scène d’éjaculation sur le public qui a fait rire tout le monde, mais surtout à la scène de dispute dans une boite de nuit (qui est très réussie) les faisceaux lumineux de la boite viennent caresser le visage du public, et donnent l’impression d’être sur la piste avec Murphys et Electra. La lumière est très présente, ce sont presque toujours des éclairages artificiels colorés vert, orange, bleu, rouge. Les ambiances lumineuses correspondent à des lieux ou à des moments, par exemple le même appartement est filmé dans deux éclairages différents pour souligner le décalage entre le présent (lumière claire, jaune, Murphy est un père de famille) et le passé (lumière verte, rouge, Murphy se drogue et est fou amoureux d’Electra). Ce travail sur les ambiances lumineuses est intéressant dans la mesure où il rend compte d’un état des personnages et souligne le fait que Murphys raconte cette histoire sous drogue. En cela on n’oublie pas que le film est un trip, avec une grande part de fantasme d’où l’importance du sexe et des lumières étranges. De plus c’est un récit subjectif comme le présuppose la voix off qui fait écho aux pensées intérieurs de Murphys dés l’ouverture du film.

Wild bunch distribution
Wild bunch distribution

Le film est très fragmenté, il y a une multiplication et une répétition des plans, même si nous sommes souvent confronté à de long plan séquence. Tout d’abord dans le fait que ce soit relativement les mêmes cadrages qui reviennent à plusieurs reprises. Je pense à la scène en plongé où Murphys et Electra fument après l’amour enroulés dans un drap rouge, la composition du plan est très belle. Le spectateur découvre cette scène par fragment, il la quitte et la retrouve 10 min plus tard. Le montage utilise ce procédé à plusieurs reprises. Il va par exemple commencer par montrer la fin d’une séquence, comme la séquence de rupture, et c’est seulement à la fin du film que l’on voit la séquence dans son intégralité. Ce procédé fait sans doute échos au fait que ce soit un récit en flash back de souvenirs sous drogue, donc les souvenirs n’apparaissent pas toujours au protagoniste dans leur intégralités et intelligibilités première. Tout se passe comme s’il y avait des flash back dans les flash back, et que le récit s’ordonnait au fur et à mesure de son déroulement, ce qui rend compte de la difficulté à mettre en ordre des souvenirs. Pour finir un dernier procédé de montage que je nommerais le « battement de cille », à plusieurs reprises les plans sont séparé par des noirs très courts, qui permettent de changer d’échelle de plan ou juste d’émettre un temps de pause dans la séquence. Cela participe à la fragmentation du montage et sert encore une fois les enjeux liés à la difficulté de se souvenir. Le tout étant rythmé par une musique électro très présente et réussite.

Le film choc de Cannes est donc avant d’être une polémique pour affoler les médias, une expérience de cinéma avec ses partis pris et ses enjeux, qui met nos sens en éveil, même si parmi ces enjeux il y avait sans doute la volonté de bousculer les tabous et de faire couler de l’encre. « L’empire des sens » d’Oshima 1976 qui est à mon sens plus choquant que « Love », avait lui aussi défrayé son public. L’exploration des tabous au cinéma suscite souvent l’indignation des foules, mais fait souvent face à un public séduit (« l’empire des sens » présenté par la quinzaine des réalisateur à Cannes en 1976, « la vie d’Adèle » palme d’or 2013).

Adèle

[divider]INFORMATIONS[/divider]

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[column size=one_half position=last ]la critique de MAXIME
la critique d’ADELE
la contre-critique de Pierre
CANNES 2015 : les autres films de la sélection officielle
Affiches explicites de LOVE

Titre original : Love
Réalisation : Gaspar Noé
Scénario : Gaspar Noé
Acteurs principaux : Karl Glusman, Aomi Muyock, Klara Kristin
Pays d’origine : France
Sortie : 15 juillet 2015
Durée : 2h14min
Distributeur : Wild Bunch Distribution
Synopsis : Au cours d’une longue journée pluvieuse, Murphy va se retrouver seul dans son appartement à se remémorer sa plus grande histoire d’amour, deux ans avec Electra. Une passion contenant toutes sortes de promesses, de jeux, d’excès et d’erreurs…

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[divider]EXTRAIT[/divider]

https://www.youtube.com/watch?v=lkSJeL2HErI

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