À part dans son genre, LES CHIENS DE GUERRE de John Irvin dépeint moins la mission d’un commando armé en Afrique noire que la psychologie d’un mercenaire, de prime abord froid et sans grandeur.
Éternel faiseur de la série B, le réalisateur John Irvin s’est surtout illustré avec des productions comme Le Contrat avec Arnold Schwarzenegger en 1986 ou Un flic à Chicago avec Patrick Swayze en 1989. Si son œuvre n’a pas tant marqué les foules, subsistent quelques honnêtes divertissements et un film un tant soit plus curieux : LES CHIENS DE GUERRE, une réalisation entre l’actioner et le thriller politique, mené par un Christopher Walken déjà proche de la quarantaine, mais encore auréolé par le succès de Voyage au bout de l’enfer.
Sorti en 1980, LES CHIENS DE GUERRE ne révolutionne pas grand-chose sur le plan technique. La caméra bouge assez peu et le montage demeure relativement abrupt. Il trouve, en effet, davantage d’intérêt sur le fond que sur la forme. Adapté du roman éponyme de Frederick Forsyth, le récit se décompose en deux actes, avec une première partie centrée sur une mission de reconnaissance au Zangaro – une nation d’Afrique noire – et une seconde, sur l’organisation d’un coup d’état depuis les États-Unis pour renverser le dictateur à la tête du pays.
Peu glorieux
Vu de nos jours, LES CHIENS DE GUERRE pourraient comporter des éléments qui sonnent ultra-conservateurs. Dans le rôle de Jamie Shannon, Christopher Walken incarne, de prime abord, une figure de white savior. De même que le film semble positionner le modèle capitaliste des États-Unis comme un puissant pourvoyeur de démocratie. Or, ces postulats sont contrebalancés par le caractère vil de la société qui emploie Jamie Shannon, un mercenaire pourtant rôdé à ce genre d’exercice. En effet, l’objectif n’est point d’instaurer un meilleur système politique au Zangaro, mais bien d’y installer un nouveau dictateur, plus enclin à commercialiser les réserves de platine du pays.
Bien qu’il suive ainsi le schéma classique du film de mercenaires, LES CHIENS DE GUERRE se détache pourtant du lot. Inspiré des commandos envoyés en Afrique pour renverser des gouvernements à partir des années 60, le roman adapté ancre davantage son intrigue dans le réel et choisit de décrire les mercenaires comme des hommes banals, sans conscience politique et aux objectifs uniquement vénaux. Le film reprend ce positionnement. Christopher Walken s’éloigne effectivement des stars d’actioner habituelles et n’incarne pas exactement un glorieux héros.
Anti spectaculaire
En effet, lui comme sa troupe ne paraissent pas tant sympathiques. Laconiques et peu avenants, ils ressemblent aux mercenaires de cette époque, loin des figures interprétées par Richard Burton dans les années 70 ou par Sylvester Stallone dans ses Expendables de nos jours. LES CHIENS DE GUERRE se révèle d’autant plus intriguant qu’il centre essentiellement son propos sur l’évolution du personnage de Jamie Shannon. Lequel ouvre peu à peu les yeux sur la situation politique au Zangaro et se découvre finalement un sens moral.
Pour servir ce but, LES CHIENS DE GUERRE ne comprend étonnement que peu d’instants de guerre et de mitrailles, pourtant caractéristiques du genre. À l’exception d’une scène d’ouverture au sortir d’une première mission et du sanglant coup d’état final, le film prend le temps de développer son personnage principal et de nous décrire le quotidien d’un mercenaire. Peu apte à la vie en société, enfermé dans sa fonction, Christopher Walken ne suscite ni la compassion, ni l’admiration… Et LES CHIENS DE GUERRE se distingue dès lors comme un film de mercenaires à part, aussi singulier que surprenant.
LES CHIENS DE GUERRE ressort dans une version restaurée en Blu-Ray et DVD chez L’Atelier d’images. Cette nouvelle édition comprend notamment un supplément sur les films de mercenaires nommé Quand les mercenaires attaquent, mené par Philippe Lombard.
Lily Nelson