Adaptation du célèbre jeu vidéo éponyme, FIVE NIGHTS AT FREDDY’S ne parvient jamais à choisir entre le registre de la comédie fantastique et du film d’horreur. En résulte un spectacle inégal, un brin longuet et au potentiel gâché.
Newbie at Freddy’s
Peut-on consommer FIVE NIGHTS AT FREDDY’S comme un film d’horreur populaire sans le background du jeu ? Telle est la question que s’est posée notre rédactrice à l’entrée dans la salle. Car oui, l’autrice de ces lignes n’a jamais posé les mains sur la série de jeux vidéo culte débutée en 2014. En réalité, la question est vite répondue, puisque le film installe suffisamment son univers pour que le spectateur néophyte ne s’y sente pas perdu – bien qu’il soit possible qu’il ne saisisse pas les références, habiles ou non, à l’œuvre adaptée. Il faut dire aussi que le premier jeu Five Nights at Freddy’s se résume en quelques lignes : vous incarnez Mike, le gardien d’une mystérieuse pizzeria fermée depuis plusieurs années et vous devez survivre pendant cinq nuits aux attaques des personnages animatronics démoniaques qui s’y baladent.
Le champ d’action était donc vaste pour développer une histoire autour de ce postulat de départ. Peut-être même trop vaste. En effet, pour créer de l’enjeu, le film nous raconte l’histoire de Mike, jeune adulte orphelin, qui pour conserver la garde de sa petite sœur, accepte le fameux job de gardien de nuit chez Freddy Fazbear’s Pizzeria. Outre les phénomènes étranges, il s’aperçoit que lorsqu’il s’endort là-bas, les souvenirs de l’enlèvement de son petit frère deviennent chaque nuit un peu plus précis. Jusqu’à rencontrer, en rêve, cinq mystérieux enfants. Dans la franchise vidéoludique, le personnage de Mike se résumait à sa fonction de gardien. Or, qu’on y ait joué ou non, on sent ces histoires d’enlèvement et de garde d’enfant entrées au forceps dans une intrigue qui n’en avait peut-être pas besoin.
Scooby-Doo, where are you?
D’autant que le plus grand défaut de FIVE NIGHTS AT FREDDY’S réside en une longueur éprouvante de 2h50. Alors qu’il aurait pu constituer un divertissement sympathique dans la veine des grands blockbusters comico-fantastiques, tels que S.O.S Fantômes ou Monster Squad, il navigue entre deux eaux, indécis, entre la comédie familiale et le film d’horreur pur jus. Puisqu’étonnement, FIVE NIGHTS AT FREDDY’S reste assez gore compte tenu du public visé. Malheureusement, il ne s’agit que de quelques fulgurances qui entrecoupent le drame familial au premier plan. Drame familial pourtant survolé, et expédié en quelques éléments de résolution. L’ensemble donne l’impression que deux films cohabitent et que l’un parasite l’autre. On quitte effectivement trop souvent la pizzeria pour suivre les déboires familiaux des deux frère et sœur, pourtant largement dispensables.
FIVE NIGHTS AT FREDDY’S souffre de vouloir remplir à tout prix ses deux heures pour étirer en longueur l’intrigue principale, à savoir le mystère entourant les animatronics tueurs de Freddy Fazbear’s. Le tout, pour retarder une conclusion peu surprenante, avec le reveal d’un antagoniste dissimulé sous un masque de lapin jaune – clin d’œil évident au rôle de Matthew Lillard dans les adaptations filmiques de Scooby-Doo au début des années 2000. Car, dans le fond, ce FIVE NIGHTS AT FREDDY’S n’est rien d’autre qu’un long épisode de Scooby-Doo. Une inspiration pas si malvenue, puisque la pizzeria, avec son décor flashy et délabré, rappelle effectivement l’univers de train fantôme kitsch du célèbre dessin animé. En soi, regarder un épisode de Scooby-Doo n’est jamais une expérience désagréable. On ne peut donc s’empêcher de penser que FIVE NIGHTS AT FREDDY’S aurait dû recentrer son intrigue sur ces aspects.
Loin du ratage complet
Car le film d’Emma Tammi est ponctué d’instants de bravoure où les aspects comiques et horrifiques font mouche. De plus, si la réalisation n’est pas des plus remarquables, elle n’en reste pas moins correcte, dans la moyenne du grand divertissement actuel. FIVE NIGHTS AT FREDDY’S se révèle tout de même loin du ratage complet, et cela tient notamment à ses rôles secondaires. Là où Josh Hutcherson, dans le rôle de Mike, se révèle quelque peu agaçant, on boude rarement son plaisir devant un Matthew Lillard cabotineur au possible. De même que Mary Stuart Masterson incarne une parfaite tante acariâtre, prête à tout pour récupérer la garde de sa nièce, afin d’empocher les aides de l’État. Autant d’éléments qui évoquent, encore une fois, les comédies fantastiques à la sauce Famille Addams de la fin des années 90 et du début des années 2000.
De plus, les animatronics n’en demeurent pas moins effrayants, et les meurtres qu’ils perpétuent comptent parmi les aspects les plus réussis du film. Peu employé à attaquer dans le jeu vidéo, le cupcake mécanique, avec sa mâchoire déployée comme un piège à loup, donne lieu à quelques unes des meilleures scènes d’attaque. Dommage que le film ne nous en donne jamais assez. En résulte une grande frustration. Car FIVE NIGHTS AT FREDDY’S témoigne de réelles qualités et aurait pu constituer un spectacle grand public tout à fait honorable. Peut-être qu’à vouloir séduire à la fois le tout-venant et les fans du jeu vidéo original, il s’est pris les pieds dans le tapis et ne savait plus tellement quelle histoire raconter pour satisfaire les deux audiences. Dommage. Car le potentiel était bel et bien là.
Lilyy Nelson