Critique du film The Master de Paul Thomas Anderson

[critique] The Master

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Affiche du film THE MASTER

Freddie, un vétéran, revient en Californie après s’être battu dans le Pacifique. Alcoolique, il distille sa propre gnôle et contient difficilement la violence qu’il a en lui… Quand Freddie rencontre Lancaster Dodd – « le Maître », charismatique meneur d’un mouvement nommé la Cause, il tombe rapidement sous sa coupe…

Note de l’Auteur

[rating:8/10]

Date de sortie : 9 anvier 2013
Réalisé par Paul Thomas Anderson
Film Américain
Avec Joaquin Phoenix, Philip Seymour Hoffman, Amy Adams
Durée : 2h17min
Titre original : The Master
Bande-Annonce :

– « C’était vraiment très beau », commence l’un de nous au générique de fin
– « Mais long », ose l’autre
– « Mais beau »
– « Mais long »
– « … »
– « Ça parlait de quoi au fait ? »

The Master, ce serait l’histoire d’un garçon et d’une Nation. Leurs destins mêlés s’éclairent l’un l’autre. Tous deux paumés dans les années 50 de l’après-guerre, traumatisés. Freddie Quell (Joaquin Phoenix) est un très jeune (bien que son âge ne soit pas donné) vétéran. Lorsqu’il part à la guerre, il laisse sa ville natale, son amour d’enfance, une mère psychotique, un père alcoolique et mort. Autant de traumatismes non résolus et accentués par l’horreur de la guerre. Une première ellipse. Freddie Quell réintègre la société civile : il est déphasé, alcoolique et errant. Symbole d’une Amérique sans repère et en pleine reconstruction. Le discours mystique et salvateur (« la Cause ») de Lancaster Dodd (Philip Seymour Hoffman) trouve un écho particulier en cette période. Freddie Quell, prendra Dodd pour nouvelle figure paternelle avec ce que cela comprend de rébellion et d’admiration. Bref, le film conterait le passage (à l’échelle personnelle comme nationale) du temps confus et suiveur de l’adolescence à l’age adulte du maitre de lui-même et de son environnement. Mais ce serait surtout bien plus…

Photo (1) du film THE MASTER

L’image, sublime, a été filmée en 70mm d’où une qualité de détails effarante (aidé en cela par Mihai Malaimare Jr., chef opérateur). Les plans et les séquences sont maitrisés d’un bout à l’autre. Les allergiques au cinéma de la maitrise souffriront, les autres crieront au génie. Le montage est également exemplaire. Une fin de séquence bien maitrisée, quelques secondes de trop qui décuplent la gêne quant au comportement de Freddie et le malaise nous enfonce dans la mousse de notre fauteuil. Les interprétations : deux acteurs et une actrice (Amy Adams) au jeu très marqué, vaguement cabotinant et excessivement investi. Si cette école de jeu ne fait pas l’unanimité, les prestations des trois acteurs principaux en sont les sommets et ici nous adorons (cf. la scène où Joaquin Phoenix doit répondre aux questions de Philip Seymour Hoffman sans cligner des yeux).

The Master est le meilleur film du réalisateur, la quintessence de son œuvre jusqu’alors.

PTA manie allègrement les ellipses ainsi que le mélange du fantasme et de la réalité. L’alcoolisme de Freddie Quell l’immerge dans de profonds sommeils. Un mini-twist final et nous comprenons que les multiples scènes de réveil de Freddie sont toutes fantasmées. Certains critiqueront ici une manipulation du spectateur (la part du rêve est très difficile à déceler) alors que PTA accède à quelque chose de très touchant. Attitude foncièrement empathique, Freddie lui-même ne distingue pas la frontière de la réalité. En une dernière scène, Freddie s’assoupira enfin entre les bras d’une femme modelée dans le sable. Tout ceci n’aurait été qu’une grande rêverie ?

Photo (2) du film THE MASTER

Chaque plan est estampillé « chef d’œuvre ». Tout est là, le cahier des charges est bien rempli (la même impression désagréable qu’après The Tree Of Life), une technique exemplaire, un propos sibyllin, des interprétations Actor Studio Style. Finalement, on se dit qu’entre un chef d’œuvre légèrement enflé et une mascarade, il n’y a qu’une question de posture. Une chose est sûre, The Master est le meilleur film du réalisateur, la quintessence de son œuvre jusqu’alors.

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Rédacteur depuis le 22.04.2011

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  1. J’ai moi aussi été conquis. Après s’être attaqué aux fondements de l’idéal américain dans There will be blood, Paul Thomas Anderson continue son entreprise de destruction des mythes fondateurs dans un film énorme et monstrueux. The Master ne se donne pas, le spectateur lutte avec les images plus de deux heures durant, essayant, comme le réalisateur, comme le « Master » lui-même, de trouver un sens à tout « ça ».

  2. J’ai moi aussi été conquis. Après s’être attaqué aux fondements de l’idéal américain dans There will be blood, Paul Thomas Anderson continue son entreprise de destruction des mythes fondateurs dans un film énorme et monstrueux. The Master ne se donne pas, le spectateur lutte avec les images plus de deux heures durant, essayant, comme le réalisateur, comme le « Master » lui-même, de trouver un sens à tout « ça ».

  3. C’est vrai que si l’on réfléchit objectivement, ce film a tout du chef d’œuvre : une réalisation exemplaire, des acteurs grandioses, un propos profond. Mais le cinéma, c’est aussi du subjectif, du ressenti. Moi je vois surtout dans The Master un film élitiste donc excluant, souffrant de longueurs et de digressions. Quant à la démonstration d’acteur (tu parles d’Actor’s Studio Style et je suis d’accord), elle en devient agaçante. Comme si les acteurs ne jouaient que pour pouvoir se regarder le nombril et décrocher des Oscars…

  4. C’est vrai que si l’on réfléchit objectivement, ce film a tout du chef d’œuvre : une réalisation exemplaire, des acteurs grandioses, un propos profond. Mais le cinéma, c’est aussi du subjectif, du ressenti. Moi je vois surtout dans The Master un film élitiste donc excluant, souffrant de longueurs et de digressions. Quant à la démonstration d’acteur (tu parles d’Actor’s Studio Style et je suis d’accord), elle en devient agaçante. Comme si les acteurs ne jouaient que pour pouvoir se regarder le nombril et décrocher des Oscars…

  5. ! Alerte au tout petit spoiler !

    Oui, je pense effectivement au téléphone au cinéma : Dodd ne l’a jamais appelé.
    PTA multiplie les scènes où Freddie est dans un état de demi-éveil. Lorsque Amy Adams le réveille en pleine nuit, lorsqu’il se réveille sur la bateau après s’être évanoui, sur la plage avec la femme en sable …

  6. ! Alerte au tout petit spoiler !

    Oui, je pense effectivement au téléphone au cinéma : Dodd ne l’a jamais appelé.
    PTA multiplie les scènes où Freddie est dans un état de demi-éveil. Lorsque Amy Adams le réveille en pleine nuit, lorsqu’il se réveille sur la bateau après s’être évanoui, sur la plage avec la femme en sable …

  7. Pour moi c’est son moins réussi, comme si le cérébral avait pris le pas sur l’artiste alors que le 50/50 était justement la perfection de son cinéma (« There will be blood »)… Mais ça reste un bon film… 3/4 de justesse

  8. Pour moi c’est son moins réussi, comme si le cérébral avait pris le pas sur l’artiste alors que le 50/50 était justement la perfection de son cinéma (« There will be blood »)… Mais ça reste un bon film… 3/4 de justesse