L'HOMME IRRATIONNEL
Crédits : Sabrina Lantos

L’HOMME IRRATIONNEL, un Woody Allen surprenant – Critique

Nous souhaitons recueillir votre avis sur votre façon de nous lire. Merci de prendre 2 minutes de votre temps en cliquant ici !


IRRATIONAL MAN sera donc le 45ème film de papi Woody (80 ans), et le sixième de la décennie, après You Will Meet a Tall Dark Stranger , Minuit à Paris , To Rome with Love , Blue Jasmine et Magic in the Moonlight – sur ces 5 films, seul Blue Jasmine se démarquait vraiment des autres, abordant de façon surprenante le drame social, et mené par une hallucinante Cate Blanchett. En outre, bien que Woody Allen propose systématiquement quelque chose de novateur dans chacun de ses films, cela relève, récemment, plus de la fantaisie que d’une volonté de renouvellement.

Si comme nous, vous vous êtes faits une image très précise du film, construite à partir des dernières œuvres (ou déceptions, c’est selon) du réalisateur… nous vous conseillons de COURIR VOIR LE FILM !
Votre plaisir – ou tout du moins, votre étonnement – n’en sera que plus grand.

Attention, ce qui suit contient de petits spoilers.

Si comme nous, vous vous êtes faits une image très précise du film à partir du trailer, courrez-y ! Votre plaisir n’en sera que plus grand.

L’HOMME IRRATIONNEL n’a absolument rien d’une rom-com « à la Woody Allen », intello et légère. Par contre, le réalisateur explore toujours le passionnant thème de la manipulation, en vogue dans son cinéma depuis un moment… Sauf que cette fois-ci, papi Woody va plus loin. C’est donc avec plaisir qu’on retrouve la fausse légèreté, le ton désabusé, l’agressivité et enfin la violence d’un Match Point.

Les premières secondes du film nous avaient mis la puce à l’oreille : pas de ce jazz typique, silence.

Pourtant, le film prend la forme exacte qu’on supposait, celle dévoilée par la communication du film et résumée ci-dessus.
Soit la présentation très emphatique d’Abe, intello dépressif alcoolique – typiquement le genre de personnalité torturée qui ferait craquer n’importe quelle étudiante; il sympathisera rapidement avec la toute fraîche et intelligente Jill, typiquement le genre de nana charmante pour qui n’importe quel quadragénaire en crise craquerait. Leurs interactions sont par conséquent aussi charmantes qu’inintéressantes. Elles représentent exactement ce qu’on attend d’un Woody Allen : d’excellents dialogues, au service d’acteurs parfaitement dirigés.
On notera à ce sujet, que malgré notre haine vouée au sur-jeu habituel de Joaquin Phoenix, il est ici beaucoup plus subtil et fait preuve d’une intelligence de jeu bluffante. Emma Stone est quant à elle, fidèle à elle-même.

Bref malgré les avertissements répétés d’Abe, on croit savoir où se dirige le film…  Jusqu’à cette scène, cette phrase – entendue dans le trailer et autour de laquelle le film est centré :

« Come and sit down with me » (Jill)
[…]
« it was at this moment that my life came together » (Abe)

À partir de là, IRRATIONAL MAN joue ainsi la carte du progressivement dérangeant/malsain en initiant une partie miroir de la première, où les émotions se transforment petit à petit en leurs exacts opposés. Celles des personnages, les nôtres. Un plan se met en place, celui de décontenancer le spectateur par un certain jusqu’au-boutisme. Et pour le coup, Woody Allen s’amuse vraiment avec nos perceptions et prend autant plaisir à nous dérouter que nous, à nous faire balader par l’intelligent script du film. On ne peut, toutefois, s’empêcher de constater une certaine prévisibilité, une fois qu’on a compris le truc – la limite d’un film par ailleurs, enfin surprenant pour « un Woody Allen« .

Un mot sur la réalisation, aussi élégante que constante par rapport aux films précédents. C’est toujours beau (merci Darius Khondji) mais aussi toujours mis en scène sans éclat. La bande-son joue en outre avec les codes Allen-ien en introduisant quelques dissonances renforçant l’aspect contradictoire du film.
Au final, l’irrationnel dans IRRATIONAL MAN, c’est peut-être Woody Allen : alors qu’on pensait pouvoir catégoriser son cinéma… Avec ce cru 2015, voilà qu’il réussit à nous surprendre, à nous perdre. Et c’est fichtrement génial !

Georgeslechameau

Note des lecteurs3 Notes
4

Nos dernières bandes-annonces