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ARRAS FILM FESTIVAL : compte rendu du jour 6

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9 novembre : jour 6 du festival;

L’arrivée ce matin en gare d’Arras était pour le moins contrariée par les nouvelles toutes fraîches américaines ainsi qu’une pluie battante. Heureusement l’accueil du Village des Festivals nous plonge dans une autre ambiance : celle d’un événement mettant les films à l’honneur et par là, une autre vision du monde nécessaire et réconfortante.

[divider]LA MÉCANIQUE DE L’OMBRE de Thomas Kruithof[/divider]

Le premier film au programme du jour était une avant-première en résonance avec l’actualité puisqu’il s’agit d’un thriller politique se déroulant en pleine période pré-électorale. LA MECANIQUE DE L’OMBRE, réalisé par Thomas Kruithof avec François Cluzet et Denis Podalydès.

la-mecanique-de-lombreDuval, un comptable au chômage ex-alcoolique est embauché par un mystérieux Clément (Denis Podalydès) pour retranscrire des écoutes téléphoniques. Le voici donc enfermé, seul dans un appartement, respectant à la lettre des consignes précises. Acculé, Duval accepte cette mission mais très vite se retrouve au centre d’un complot politique cynique et dangereux.

LA MECANIQUE DE L’OMBRE s’inscrit dans le film de genre et prolonge la tradition de thrillers politiques machiavéliques à l’instar de Ghost writer de Polanski. La mise en scène un peu trop appuyée par moment reste néanmoins efficace et François Cluzet porte le film à lui seul. Pas un plan sans son visage à l’expression inquiète. L’intrigue elle-même nous maintient en haleine sans être pour autant très alambiquée. Quant à Podalydès, il est formidable en homme d’affaire impitoyable.

Courte pause le temps d’un café avant la deuxième séance : LE TROU (1960) de Jacques Becker en version restaurée dans le cadre de la sélection « Films d’évasion » avec une belle surprise en avant programme, une archive de l’INA d’une interview de José Giovanni – l’auteur du livre éponyme adapté par Becker – par Bertrand Tavernier. Ce dernier qui vient d’ailleurs de rendre un vibrant hommage à Becker dans son Voyage à travers le cinéma français. La boucle est bouclée !

[divider]LE TROU (1960) de Jacques Becker[/divider]

20133349-jpg-r_1920_1080-f_jpg-q_x-xxyxxLE TROU c’est l’histoire vraie de quatre prisonniers bientôt rejoint par un nouveau, Gaspard, préparant méticuleusement leur évasion. Co-écrit par José Giovanni, le film est un hymne au désir de liberté des hommes et à leur humanité. La mise en scène est prodigieuse et Becker filme chacun des gestes avec soin et authenticité. Chaque étape de leur tentative d’évasion est relayée de façon quasi documentaire. Ainsi voit-on Geo, Monseigneur, Manu, Roland et Gaspard dans leur quotidien carcéral, partager leur repas, enchaîner les cigarettes (sauf Manu qui ne fume pas), s’atteler à creuser un tunnel, scier les barreaux, inventer un sablier… La notion de temps semble alors aussi se dissiper pour nous spectateurs. Et les protagonistes font preuve d’une telle ingéniosité et d’une telle obstination qu’on est terrifié à chaque fois que les matons s’approchent de la cellule.

Mais LE TROU c’est aussi l’histoire d’une amitié hasardeuse, d’une confiance fragile et jamais certaine, d’une solidarité dans l’épreuve de la captivité. Les acteurs sont tous formidables et le talent incontestable de Becker pour nous attacher à chacun des personnages nous plonge complètement dans leur univers. A cela ajoutons les gros plans très utilisés visant à la fois à rendre compte de chaque geste, chaque expression mais aussi à traduire ce sentiment d’étouffement, de surveillance et d’angoisse. Un chef d’oeuvre absolu à voir ou revoir !

Sous les arcades d’Arras se nichent de nombreux restaurants et le Village des Festivals propose une restauration sur place. Ca tombe bien la pause repas s’impose. Une salade, un éclair, un café et c’est reparti !

[divider]COMMENT J’AI RENCONTRÉ MON PÈRE de Maxime Motte[/divider]

La troisième séance de la journée était l’avant-première d’une comédie de Maxime Motte, réalisateur originaire du nord, COMMENT J’AI RENCONTRÉ MON PÈRE avec Isabelle Carré et François-Xavier Demaison.

comment-j-ai-rencontre-mon-pereElliot et Ava sont les parents adoptifs du petit Enguerrand. Ce dernier passe son temps à rêvasser le retour improbable de son père biologique décédé. Quand un jour, il découvre sur la plage un immigré fraichement débarqué, il reconnait en lui son père et le ramène chez lui. Elliot, toujours désireux de satisfaire son fils et de gagner sa reconnaissance accepte de le cacher. Il enchaîne maladresses sur maladresses pour tenter d’aider Kwabéna avec l’aide de son père (Albert Delpy), tout aussi irresponsable que lui.

Les nombreux rebondissements sont assez réjouissants et donnent lieu à des scènes bien rythmées et des personnages hauts en couleur. COMMENT J’AI RENCONTRÉ MON PÈRE est une comédie plutôt réussie qui parvient à nous amuser tout en abordant des sujets graves comme celui du sort des migrants ou de la quête d’origine. Un feel good movie à ne pas bouder !

Notre première journée s’est terminée en beauté avec le ciné-concert de LE FANTOME QUI NE REVIENT PAS de Abram Broom, film muet russe de 1929, programmé dans les « films d’évasion ».  Le film était mis en musique et interprété devant les festivaliers par de jeunes musiciens de la région sur une composition improvisée collectivement, et orchestrée par Jacques Cambra.

[divider]LE FANTOME QUI NE REVIENT PAS (1929) de Abram Broom[/divider]

le-fanto%cc%82me-qui-ne-revient-pasL’histoire se situe dans une prison panoptique où sont incarcérés des prisonniers condamnés à perpétuité. José Real en fait partie depuis dix ans mais lorsqu’il incite les autres à se révolter, le directeur de la prison décide de lui accorder une journée de liberté que lui octroie la loi pour l’abattre. José part en route pour retrouver les siens mais le chemin est long et plein d’embûches.

Il y aurait beaucoup à dire sur ce film méconnu et néanmoins d’une puissance visuelle étonnante. La scène de début où les prisonniers se révoltent est d’une modernité absolue tant dans la mise en scène, que le découpage et les plans choisis. Ceux de la femme de José courant annoncer à tout le village le retour de son mari sont également renversants. La caméra la précède, tout aussi chancelante qu’elle. Les choix de cadrage et de décor (le directeur de la prison difforme ressemble à un cafard minuscule sur son fauteuil démesurément grand pour lui) comme les effets utilisés (dont le célèbre effet Koulechov) traduisent formidablement les différentes notions d’espace abordées, de la captivité impitoyable aux grands espaces prometteurs de liberté. Dehors comme dedans, José est poursuivi par ses fantômes, réels ou oniriques. LE FANTÔME QUI NE REVIENT PAS est un film d’une force inouïe. Un grand film à découvrir absolument !

Bilan de cette première journée au Arras Film festival : de belles projections, une sélection intéressante mais aussi l’occasion de découvrir des films méconnus. Une journée intense et prometteuse. Vivement la suite !

Anne Laure Farges

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