On l’a appris ce matin, Bernardo Bertolucci, réalisateur du Dernier tango à Paris et de Novecento, s’est éteint des suites d’un cancer. Le cinéma italien perd l’un de ses derniers grands maitres.
Né en 1941, Bernardo Bertolucci démarre sa carrière en tant qu’assistant de Pier Paolo Pasolini sur son film Accatone. En 1964, il réalise Prima della rivoluzione, film phare annonçant déjà les mouvements de mai 1968. Communiste convaincu, amoureux éperdu de la Nouvelle Vague, il rendra en 2003 un bel hommage à mai 1968 avec The dreamers (Les innocents avec Louis Garrel et Eva Green).
Après avoir co-écrit avec Dario Argento et Sergio Leone (à l’honneur à la Cinémathèque de Paris en ce moment, jusqu’au 27 janvier) Il était une fois dans l’Ouest, il réalise en 1970 Le conformiste, histoire d’un fasciste chargé d’éliminer son professeur de philosophie, militant antifasciste. Adapté d’un roman de Moravia et mettant en scène Jean Louis Trintignant, Stefania Sandrelli et Dominique Sanda, Le conformiste est peut être l’un des plus grands films de Bertolucci, film profondément énigmatique et magnifiquement réalisé.
En 1972, Bertolucci signe le film qui le fit connaitre mondialement et qui créa un véritable scandale : Le dernier tango à Paris. Film subversif illustrant l’un des fantasmes du cinéaste (faire l’amour à une inconnue), Le dernier tango à Paris est aussi un film profondément nihiliste. Les scènes érotiques ont marqué une époque (le film fut censuré un peu partout) et aujourd’hui même sans l’avoir vu tout le monde connait la “scène de beurre“. Bertolucci n’hésite d’ailleurs pas à manipuler ses acteurs pour obtenir ce qu’il souhaite à l’écran – Marlon Brando à qui il demande de se livrer sans fard et surtout Maria Schneider qui restera traumatisée toute sa vie par cette fameuse scène de sodomie.
Fort de ce succès teinté de scandale, en 1975, Bertolucci réunit l’argent de 3 majors américaines et réalise son chef d’oeuvre, 1900 (Novecento) fresque historique de plus de cinq heures sur l’histoire du communisme en Italie avec Robert de Niro et Gérard Depardieu dans les rôles principaux.
Dans les années 80, il réalise l’un de ses grands succès couronné par pas moins de 9 oscars : Le dernier empereur, premier volet de sa trilogie orientale complétée par Un thé au Sahara et Little Buddha.
Bertolucci laisse derrière lui une oeuvre éminemment politique, subversive, charnelle et sous le signe de la révolte, oeuvre récompensée en 2011 par une Palme d’or d’honneur au Festival de Cannes. Son dernier film Moi et toi, loin d’être son meilleur film ou son ultime testament, est un joli portrait d’une adolescence éprise de liberté et de changement, un thème cher à Bertolucci. Pour preuve, l’une de ses très belles scènes, où cachés dans une cave en attendant d’affronter à nouveau le monde extérieur, un frère et une sœur s’enlacent au son de Space Odity de David Bowie.
Anne Laure Farges
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