THE GIRLFRIEND EXPERIENCE
© 2016 Transactional Pictures of NY LP. All Rights Reserved

[CRITIQUE] THE GIRLFRIEND EXPERIENCE – Saison 1

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THE GIRLFRIEND EXPERIENCE
THE GIRLFRIEND EXPERIENCE
• Diffusion : 10 avril (USA) / 11 avril (France)
• Créateurs : Amy Seimetz, Lodge Kerrigan, Steven Soderbergh
• Acteurs principaux : Riley Keough, Mary Lynn Rajskub, Paul Sparks
• Diffuseur : Starz (USA) / OCS MAX (France) • Format : 13x30min
7.8
Note rédacteur

A priori, l’idée d’une série adaptée du film de Steven Soderbergh, The Girlfriend Experience (2009), était loin de nous convaincre. D’une part parce que le matériau d’origine, n’est pas d’une grande qualité. Soderbergh semblait notamment tourner autour de son sujet mais sans jamais aller au bout ni en s’y confrontant frontalement. D’autre part, parce que ce procédé d’adaptation des films en séries, de plus en plus récurrent désormais, apparaît comme une facilité et se rajoute au manque d’originalité des séries télévisées depuis plusieurs années (voir notre article).

Fort sceptique donc avant de découvrir la série, nous voilà largement convaincu après une poignée d’épisodes, des qualités indéniables de la THE GIRLFRIEND EXPERIENCE, qui parvient à dépasser l’œuvre qu’elle adapte. Aussi bien en termes de réalisation, bien plus cohérente et sans tabou, que dans la manière dont elle aborde son sujet avec un personnage principal singulier car loin de certains codes sociétaux.

Christine (Riley Keoug) est étudiante en droit et s’apprête à effectuer un stage dans un important cabinet d’avocats de Chicago. Avery (Kate Lyn Sheil), son amie de l’université, lui raconte ses missions d’escort girl en dehors des cours. Intriguée par cette activité consistant à agir comme la petite amie éphémère de riches clients, mais sans jamais juger son amie, Christine se laisse initier à cet univers.

Photo de la série THE GIRLFRIEND EXPERIENCE
© 2016 Transactional Pictures of NY LP. All Rights Reserved

La froideur. C’est peut-être le premier terme à employer à la vue de cette série proposée par la chaîne américaine Starz (Flesh and Bone) et diffusée en France sur OCS MAX à partir du 11 avril. Une froideur palpable devant l’ambiance générale, marquée par une absence de couleur (teintes de noir, gris, blanc et bleu pâle) au sein des bureaux ou des amphithéâtres dans lesquels se trouve Christine la plupart du temps. Mais également la froideur de ce personnage. Il y a quelque chose de déconcertant à voir cette femme se lancer dans cette activité atypique sans nécessité financière. L’insouciance de la jeunesse et la recherche d’expériences ne sont pas non plus ses motivations. Christine agit avant tout en suivant son envie presque pulsionnelle et sa curiosité. Et c’est là que THE GIRLFRIEND EXPERIENCE déroute et fait preuve d’une vraie audace. Car la série nous emmène loin du moralisme habituel. Christine est une femme qui ne croit pas au mariage et ne veut pas d’enfant. Une femme qui n’a pas besoin d’avoir des sentiments pour coucher avec un inconnu, mais qui le fait juste pour assouvir son plaisir. Il y a quelque chose de moderne qui ressort même de cette attitude non dictée par les règles sociales. Et pourtant, ce n’est pas faute de se remettre en cause. Christine se voyant comme une sociopathe en raison de son manque de réactions et son soi-disant égoïsme – ce n’est pas le cas, il n’y a qu’à voir la faiblesse qu’elle affiche lorsqu’elle sera confrontée à la femme d’un client. En tant qu’escort girl, « tu peux choisir d’être ce que tu veux » lui dira Avery. Une phrase qui prend sens et donne dès cet instant la crédibilité, la compréhension et l’empathie nécessaire.

« THE GIRLFRIEND EXPERIENCE parvient à prendre le meilleur du film de Soderbergh et à se séparer de ses faiblesses pour toucher à l’excellence. »

L’aboutissement de THE GIRLFRIEND EXPERIENCE est de développer alors cette psychologie du personnage jusque dans ses relations sexuelles. Des passages durant lesquels Christine garde un certain contrôle. D’abord au quotidien, avec cet homme choisi dans un bar, à qui elle se contente de dire à l’oreille « je veux coucher avec toi ». Agissant pour son plaisir avant tout, elle dirige la scène et lui impose de la regarder se toucher. Peu lui importe alors qu’il se masturbe à son tour. Par la suite, avec ses clients, elle se soumettra un temps seulement. Encore dans l’inconnu, il est logique de la voir se faire dicter la position sexuelle à adopter, avec pour aboutissement un rapide orgasme masculin. Mais bien vite, et c’est toute l’intelligence de la série, qui s’attèle à représenter ce plaisir et par extension l’orgasme féminin (chose rarement vu aussi bien à l’écran car n’ayant en aucun cas pour but d’être la symbolisation d’un fantasme masculin), Christine (ou plutôt Chelsea, son nom d’escort) reprend le dessus, au sens propre comme au figuré.

Avec un personnage aussi détaché, mais parfaitement en adéquation avec son milieu (monde financier et du droit, elle privilégie, dès ses entretiens, l’efficacité à l’humain), il y avait bien sûr le risque de rendre la série totalement opaque. Au contraire, THE GIRLFRIEND EXPERIENCE provoque une fascination ininterrompue. Ceci provenant déjà par le naturel de son interprète principale, Riley Keough (petite fille d’Elvis Presley). Même en arborant un visage souvent fermé, presque insaisissable, l’actrice parvient à rentrer dans toutes les subtilités de son personnage entre chaque scène. Criante de vérité lors d’une simple conversation avec sa mère, faisant preuve d’aucune pudeur en lisant les messages coquins de son amie Avery, ou en nous révélant d’un seul regard l’absence de sentiment pour son premier client. Que cela soit dans une représentation d’étudiante à l’allure frigide que de femme fatale désirable, Riley Keough domine à l’écran.

Photo de la série THE GIRLFRIEND EXPERIENCE
© 2016 Transactional Pictures of NY LP. All Rights Reserved

A l’image du film dont elle est issue, THE GIRLFRIEND EXPERIENCE n’est pas dans la gratuité et utilise ce sujet pour représenter avant tout notre époque et notre société. Cette société du libre accès par exemple : « Je trouve tout ce que je veux sur internet » dira Avery lorsque Christine la questionnera sur la manière dont elle a connu ses premiers clients. On est dans le « je veux, j’ai », donc dans la compulsion et non pas dans le désir, ce qui définit exactement le caractère de Christine. Mais aussi une société où l’humain et la morale deviennent secondaires ; Christine reste sans pitié avec un client qui n’a plus les moyens de la revoir, elle reste dans ce professionnalisme froid, adopte les mêmes principes que lui enseigne son patron, et apparaît monstrueusement intrigante. En cela la série parvient à prendre le meilleur du film de Soderbergh – qui traitait déjà de la crise et du rôle de la finance -, et parvient à se séparer de ses faiblesses pour toucher à l’excellence. La présence du réalisateur à la production de la série se ressent logiquement jusque dans la réalisation, à la fois sobre et d’une richesse impressionnante. Une caméra souvent posée, prenant de la distance quand nécessaire, jouant sur des effets de flou, adoptant un sens du cadre précis et une efficacité du montage. Une mise en scène maîtrisée qui développe sensiblement l’atmosphère particulière de la série. Cela jusque dans les scènes de sexe où la caméra n’hésite pas à se placer au plus près du visage de Christine. Des séquences ni embellies ni dans un réalisme pur qui en viennent, comme la série dans son ensemble, à nous captiver. Nous sommes plongés dans cette expérience, imprégnés d’un désir aussi étrange que séduisant.

Pierre Siclier

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