12 ans et 23 films : c’est le temps qu’il a fallu au MCU pour boucler un arc narratif débuté en 2008 avec Iron Man. Tout recommencer à zéro et explorer de nouvelles pistes, sans oublier de se renouveler : le pari était risqué pour Wandavision, il est relevé avec brio. Mieux encore : la première série en exclusivité sur Disney + ouvre des pistes attrayantes pour la suite de la franchise.
Dans un hôpital, des patients assistent ébahis au retour d’une multitude de malades, disparus trois années auparavant. Visiblement, la victoire des Avengers sur Thanos n’a pas engendré un retour à la normale pour tous. C’est la première grande idée de WANDAVISION : envisager les séquelles à échelle humaine d’actes disproportionnés, où le héros agit sans prendre conscience qu’il fait partie d’un ensemble plus vaste. Endgame et sa conclusion imaginait une victoire héroïque et scellait le destin de héros ancestraux, en omettant totalement l’impact de cet affrontement sur les populations. Comme dans l’excellente introduction de Batman VS Superman grâce à laquelle on comprenait que les immeubles détruits étaient logiquement habités, WANDAVISION crée des dégâts à taille humaine. Loin de son statut quasi-divin, Iron Man et son sacrifice n’ont pas fait que des heureux et les interrogations mises en avant par le récit ne cessent d’étonner.
notre critique de AVENGERS: ENDGAME
Jusqu’à présent, les séries proposées par le MCU n’avaient pas grand intérêt, tant sur la forme que sur le fond. Feuilleton sans saveur porté progressivement disparu, Agent Carter ou les Agents du Shield n’ont jamais pris conscience du statut plus important qu’elles auraient pu occuper au sein d’un univers qui n’attendait que l’éclosion de son potentiel télévisuel. Wanda Maximoff prend le contre-pied total de ces figures de l’ombre, dont elle faisait jusqu’ici partie. A l’exception de quelques faits d’armes notables, la télépathe a grandi en retrait au sein des avengers. Confinée et effacée au profit d’autres symboles féminins plus évidents, l’héroïne aux pouvoirs dévastateurs a enfin droit à son heure de gloire. Il est ainsi jubilatoire de la voir revisiter l’histoire de la sitcom, lorsque la narration et la mise en scène se calquent de manière surprenante sur des classiques du genre, tels que Ma sorcière bien-aimée, The Dick Van Dyke Show ou Malcolm.
Ainsi, il est difficile de comprendre où et quand se déroulent les quatre premiers opus de cette anthologie. Qu’importe. En laissant libre droit sur le scénario à l’inconnue Jac Schaeffer, Kevin Feige, producteur de la franchise, a réparé, peut-être sans le savoir, les rouages d’une machine enrayée. Hormis la surprise engendrée par la tonalité parodique des gardiens de la galaxie, jamais une œuvre ne s’était démarquée dans l’univers Marvel en prenant parti, que ce soit sur le fond ou la forme. Les exigences du cahier des charges ont visiblement évolué car WANDAVISION ne ressemble à aucune autre pièce du studio.
On se laisse donc porter par cet hommage appuyé à l’heure de gloire du feuilleton, où les réponses arrivent au compte-goutte face aux multiples interrogations : qui est Vision ? Quel rôle joue réellement Wanda ? Qu’est-il advenu des habitants de cette ville ? La mise en abyme est plurielle et évite les pièges dans lesquels avaient sombré d’autres séries Marvel. La réalité à laquelle appartiennent Wanda et Vision s’apparente à une utopie où cohabitent différentes tonalités narratives. De l’auto-parodie au pastiche, les épisodes développent nombre de pistes délectables, formatant ainsi les bases d’un divertissement plus qu’honnête.
La fascination des créateurs pour la sitcom et sa structure se traduit par l’intermédiaire de Wanda, qui élabore son propre phalanstère, reflet de ses obsessions. Bercée par la culture du consumérisme et frappée de plein fouet par les déboires narratifs engendrés par ses semblables, elle décide de quitter le monde des héros pour dominer un microcosme qui lui est propre. On regrette qu’elle soit rattrapée par un antagoniste des plus mièvres, militaire lambda obsédé encore une fois par la création d’une arme de destruction massive. Heureusement, ce développement purement marvélien se fond dans un récit plus vaste et reste secondaire. On préfère ainsi imaginer que Quicksilver / Pietro sera à l’origine de nouvelles pistes créatives. Difficile toutefois d’envisager que la série Faucon et le soldat de l’hiver s’éloigne de ces préceptes douteux. Espérons que Westview ne soit que l’aperçu d’un imaginaire débridé plus grand, où, comme Wanda réalisant son potentiel, le créateur détienne enfin les pleins pouvoirs.
Emeric
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• Créateur.rice.s : Jac Schaeffer
• Acteurs : Elizabeth Olsen, Paul Bettany, Randall Park, Teyonah Parris, Kat Dennings
•Date de sortie : Janvier 2021
• Durée des épisodes : 35 minutes