cadet d'eau douce

CADET D’EAU DOUCE – Critique

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Majestueux à bien des égards, CADET D’EAU DOUCE consacre un artiste, Buster Keaton, une philosophie, burlesque, et une œuvre, magistrale.

Au cinéma, Buster Keaton n’a jamais cessé d’être un enfant. Adorable, mais souvent puéril et défaillant. Un enfant chaleureux, qui devient pitre involontairement, malgré sa quête inespérée d’émancipation intellectuelle. Un enfant intemporel, qui se balade dans les têtes des cinéphiles, qui riaient d’émerveillement lors des multiples et pourtant précises cascades de l’ami de Charlot.

Photo du film CADET D'EAU DOUCE

Dans Cadet D’Eau Douce, Charles Reisner (Le Kid,Le Pélerin, les deux avec Chaplin) lui offre un rôle à contre-emploi, celui d’un extravagant bohémien muni de son béret et de son ukulélé – qu’il utilise superbement dès qu’il en a l’occasion -, venu de Boston pour rendre visite, de manière improbable, à son père, vieux capitaine d’un bateau complètement déglingué.

Le metteur en scène arrive à trouver une importante source d’inspiration cinématographique, avec l’utilisation (comme dans Le Mécano de la « Général« ) d’un très intelligent montage parallèle immersif, qui nous fait basculer d’un point de vue à un autre, à tout moment. Il se rend compte aussi à l’époque, de l’importance de la profondeur de champ, notamment lorsque W. Canfield est amené injustement en prison, avec l’utilisation cruciale au second plan de Kitty King. Keaton, quant à lui, débarrassé de la contrainte de la réalisation, est comme un poisson dans l’eau et s’avère admirable, en enchaînant les gags de cabaret avec une facilité déconcertante. Ils nous impressionnent tant ils arrivent à nous induire en erreur et à servir un récit juste, qui arrive à bon port.

Photo du film CADET D'EAU DOUCE

Cadet D’Eau Douce, outre son aspect comique essentiellement perceptible, est une œuvre engagée et, de surcroît dérangeante. Dérangeante car elle critique virulemment, dans un contexte géopolitique américain morose (un an avant le krach boursier de Wall Street), les mœurs et la société conformiste, patriarcale et individualiste. En effet, le film, s’ouvrant sur un très réussi panoramique sur la « River » lors de l’arrivée d’une belle embarcation, met en place, dès les premières minutes, une différenciation sociale assez ample entre John James King, riche navigateur adulé par la foule, et William Canfield, commandant rustre, usé et jaloux – assez logiquement, il faut bien le dire – de la réussite de son rival vantard.

Cela va tisser un sous-propos intéressant (sur la loi du plus fort, la précarité) durant une bonne partie du film, excepté lors de l’épilogue, où les différents statuts s’évaporent par un cheminement primaire : la survie, et la peur de mourir. C’est ainsi que le personnage prend conscience – en même temps que nous – de sa véritable identité, celle d’un hargneux philanthrope prêt à tout pour réunir « son » humanité fondatrice : son beau-père, sa fiancée, et son père.

L’enfant prodige, qu’on aime tant chouchouter, nous aura baladé pendant un heure. On le remercie, et on n’a qu’une envie : le revoir, et au plus vite !

Pablo C.

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Titre original : Steamboat Bill Junior
Réalisation : Charles Reisner
Scénario : Carl Harbaugh
Acteurs principaux : Buster Keaton, Ernest Torrence, Tom McGuire
Date de sortie : 9 août 2017 (ressortie)
Durée : 1h06min
5
Classique

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