Les animateurs de l’émission consacrée au cinéma « Judaïclap », diffusée sur radio Judaïca Strasbourg, ont eu la chance de rencontrer les réalisateurs Eric Toledano et Olivier Nakache à l’occasion de la sortie dans les salles de leur nouveau film « Intouchables ».
Retranscription écrite de ce passage radiophonique !
Il s’agit d’un sujet qui n’est pas évident à traiter, pourtant vous n’êtes jamais tombés dans le pathos, ni dans l’humour noir, ou dans la lourdeur. Quelles sont vos méthodes de travail ?
Eric Toledano : C’est au coup de foudre, c’est une histoire qui nous a beaucoup touché tous les deux. On avait une très grande envie de retravailler avec Omar, parce qu’on avait la sensation qu’il n’avait pas été exploité au maximum de ses possibilités. C’est un acteur formidable, très humain, très généraux, intelligent et instinctif. On s’est dit qu’il fallait qu’on trouve un sujet à la hauteur du gars. C’est lui qui nous a motivé au départ. On lui a montré un document sur ces 2 personnes, on a vu sa tête et on a compris qu’il était parfait pour ce rôle.
Puis on a eu une responsabilité morale vis-à-vis de Philippe Pozzo di Borgo, de raconter son histoire. C’est une histoire forte et qui a une dimension très positive. Il garde un espoir, une bonne humeur et un soucis de l’autre, un esprit vif. Cette histoire nous touchait donc on a essayé de la raconter avec ces acteurs formidables.
Dans « Intouchables », vous faites s’opposer, pour mieux se rencontrer, deux mondes, les banlieues (avec Omar Sy) et l’aristocratie, la bourgeoisie riche parisienne (avec François Cluzet). Par ce film, aviez-vous envie de sensibiliser les gens au fait qu’on peut faire se rencontrer et faire vivre ensemble des gens issus de milieux différents ?
Y a-t-il une volonté de faire diffuser le film dans des banlieues, avec des thématiques pédagogiques ?
Eric Toledano : On a projeté le film fin aout en prison. On a entendu une phrase qui je pense nous a fait notre soirée et notre semaine. Un prisonnier nous a dit « vous m’avez libéré pendant 2 heures ».
Olivier Nakache : On n’a pas de volonté de message, on raconte avant tout une histoire. Le film a une portée, chacun y voit ce qu’il veut. On se dit que ce qui nous a touché au début va toucher les gens, les faire rire. On n’a pas envie de dire aux gens que tous les riches doivent faire un tour en banlieue. C’est un constat, pourquoi il a fallu un accident de parapente pour que Philippe (interprété par F.Cluzet) tombe sur Driss (Omar Sy) et que ça fasse une émulation entre ces deux personnages. Chacun était ouvert à l’autre et ça a marché.
Eric Toledano : Il y a plusieurs dimensions dans le film. Il y en a une sur la rencontre, mais il y en a une aussi sur le handicap qu’on trouve intéressante. Pourquoi ils se sont entendus? Parce que l’un n’avait pas de compassion pour l’autre, même si parfois on trouve que la compassion et la pitié sont des sentiments nobles. On a rencontré, pour ce film, beaucoup de gens qui étaient « physiquement diminués ». La principale chose qu’ils nous ont dite est qu’il n’y a rien de plus agréable que d’être regardé sans cette compassion, sans cette pitié.
Je pense aussi que ce sujet a une singularité parce qu’on le traite de façon subversive. On a explosé les codes. Omar peut dire n’importe quoi, ça passe et ça explose les codes du coté du politiquement correct. Son passé banlieusard lui permet de tout faire. François, son coté aristo lui permet de tout réaliser avec l’argent, il peut prendre un jet et partir à l’autre bout de la France s’il en a envie. Il y a plusieurs dimensions, plusieurs portées. Il n’y a pas de message, on raconte une histoire et chacun prend ce dont il a envie. Nous on trouve que l’histoire a du sens, donc elle nous motive.
Olivier Nakache : C’est une histoire vraie, on l’a prise de plein fouet et ça correspondait à ce qu’on avait envie de dire comme 4e film.
Avez-vous envie de continuer dans cette voie, de parler de sujets qui vous touchent comme celui-ci ou avez-vous envie de retourner à des comédies ?
Eric Toledano : On vient de réaliser un virage. On a toujours mis une dimension personnelle dans nos films, même dans « Nos Jours Heureux ». On s’est rappelé de nos souvenirs, c’est pas qu’un film d’été.
Il y a toujours une dimension personnelle dans « Nos Jours Heureux », « Tellement Proches »…
Eric Toledano : On n’a pas le vécu suffisamment intéressant pour toujours raconter notre histoire. Devenir réalisateur, au bout d’un 4e film, c’est essayer de grandir dans ce métier, c’est aussi commencer à s’approprier les films des autres et à savoir les raconter. C’est un chemin, ça dépend du succès d’ « Intouchables ». Si ça marche, ça nous donnera envie de continuer.
Quels sont vos prochain projets ?
Eric Toledano : Le film va sortir aux Etats-Unis, on va essayer de suivre ça.
Vous pouvez retrouver l’intégralité de l’interview en vidéo sur le site de Radio Judaïca Strasbourg ou l’émission en podcast, toujours sur le même site.