Photo du film FOG
Crédit : Splendor Films

FOG, histoire d’un échec… en demi-teinte – Analyse

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Cap sur Antonio Bay, son petit port de pêche, son phare typique, ses plages, ses plaines… Et ses fantômes de marins en colère. Ressorti dernièrement dans les salles, le quatrième long-métrage de John Carpenter continue de faire l’effet d’un pétard mouillé. Dès sa sortie en 1980, FOG a connu une réception mitigée, qui se perpétue au fil des années, malgré une réhabilition toute relative.

Le miracle d’Halloween

En 1978, John Carpenter avait opéré un coup de maître. Avec son faible budget de 350 000 dollars, Halloween était devenu le film le plus rentable de l’histoire du cinéma indépendant avec des recettes s’élevant alors à 47 millions de dollars. Avant le tournage, le réalisateur était parvenu à convaincre ses producteurs d’investir une grande partie du budget dans une caméra Panavision Panaflex dotée d’un stabilisateur Panaglide. Ce luxueux équipement offrait alors une fluidité inédite dans la prise de vue. Si cet objet n’explique pas tout à fait le succès d’Halloween, il en fut toutefois en partie responsable. En effet, son usage permit à Carpenter de sublimer ses vues subjectives, qui font – aujourd’hui encore – la grande force du film.

L’inventivité d’Halloween et la subtilité de son antagoniste, décrit moins comme un homme que comme une idée du mal, ravit également la critique, pourtant peu amatrice de films d’horreur d’exploitation. Il y eut, bien sûr, quelques voix pour questionner le message moral du long-métrage – le qualifiant, au choix, d’apologie de la violence ou de brûlot réactionnaire – mais, dans l’ensemble, Carpenter s’en sortit avec les honneurs. Tant et si bien qu’à la sortie de FOG deux ans plus tard, la critique l’attendait au tournant. Or, après un tournage pénible et une post-production complexe, le film déçoit la presse. Tandis que le public, lui, reste au rendez-vous, avec un box-office de 21 millions de dollars pour seulement 1 million de budget.

Photo du film FOG
Crédits : Splendor Films

Vite écrit et vite tourné

FOG est né d’un deal commercial entre John Carpenter et la société de production AVCO Embassy Pictures. Embauché pour tourner deux longs-métrages après le triomphe d’Halloween, le réalisateur s’associe à nouveau à Debra Hill, son ex-compagne – déjà à l’œuvre sur ses deux précédents films – pour rédiger un scénario inspiré du film de science-fiction britannique, Terreur sur le Trollenberg de 1958. Dans cette réalisation de Quentin Lawrence, les monstres se dissimulent dans un épais brouillard au pied d’une montagne suisse. D’où l’idée de faire de la brume presque un antagoniste en elle-même, partie intégrante des fantômes marins de FOG. Après une quinzaine de jours d’écriture, le tournage débute en avril 1979, soit moins d’un an après la fin de celui d’Halloween.

La logique commerciale dans laquelle s’inscrit la production de FOG explique la mise en œuvre rapide du projet. Or, si Carpenter a l’habitude de travailler ainsi et se révèle même plus que compétent pour gérer un budget limité et des délais raccourcis, peut-être que FOG aurait mérité une écriture plus approfondie. En effet, dans sa chronique parue en 1979, Robert Ebert, critique américain respecté, souligne les points communs entre le scénario de ce nouveau film et celui d’Halloween : « L’action prend place dans une petite ville américaine. On nous présente quelques habitants, notamment des femmes isolées. Puis, une menace est établie. Et le reste du film est consacré à observer la menace éliminer ou ne pas éliminer ses potentielles victimes. »

Photo du film FOG
Crédits : Splendor Films

De l’idée

Or, FOG se distingue d’Halloween par un rythme plus lent, voire même ennuyeux. Puisque la menace en question ne prend réellement corps que dans le dernier quart du film. En plus d’une écriture quelque peu bâclée, cette chute rushée s’explique certainement par les déboires techniques rencontrés sur le tournage. En effet, l’ambitieux effet de brume luminescent imposa une machinerie lourde encore peu usitée à l’époque. D’autant que le vent perturbait grandement la prise de vue, faisant se dissiper trop rapidement la fumée, avec de faibles chances de la rediriger correctement. Face au résultat visuel peu concluant, Carpenter dû remonter et remixer son film, et même retourner certains plans, entraînant des dépenses faramineuses pour le studio.

Ce pari technique confère cependant au long-métrage une atmosphère vaporeuse particulière. Si, de l’avis général, FOG n’est certainement pas le meilleur Carpenter, on y décèle tout de même un certain talent de mise en scène. Même Robert Ebert ne s’y est pas trompé : « FOG est enthousiasmant, dans la mesure où il prouve une nouvelle fois tout le talent de réalisateur de John Carpenter. Il a choisi, je pense, de raconter la mauvaise histoire, mais il n’empêche qu’il la réalise avec brio. » D’où peut-être la dimension culte allouée au film, qui séduit également par les personnages d’Adrienne Barbeau, la gardienne de phare animatrice de radio, et de Jamie Lee Curtis, l’auto-stoppeuse entreprenante, à mille lieues de Laurie Strode dans Halloween.

Photo du film FOG
Crédits : Splendor Films

De nos jours, FOG se distingue comme l’un des films les moins adulés de son auteur. Pourtant, il conserve bel et bien sa patte, malgré ses aspects moins brillants. Il est également le témoin d’un temps où Carpenter était encore bankable : on s’en souvient peu, mais le réalisateur va ensuite s’enliser dans une série d’échecs commerciaux à la réception tardive. Eternel incompris, John Carpenter rejoint, pour une fois, l’avis général et considère, de son propre aveu, FOG comme un classique, mais plus précisément, comme « un classique mineur de l’horreur ». La messe est dite.

Lilyy Nelson

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