Deux ans après le deuxième volet de La Reine des Neiges, Disney signe son retour avec une épopée teintée d’influences asiatiques. Une aventure de princesse qui révèle l’essoufflement de l’un des plus grands studios, à l’heure de leur 59e classique d’animation.
Il y a de cela fort longtemps, humains et dragons vivaient en harmonie dans le royaume de Kumandra. 500 ans après son passage dévastateur sur celui-ci, une force maléfique transformant les humains en pierre, réapparait. Raya, guerrière orpheline se met en quête du dernier dragon vivant capable de restaurer l’harmonie et la vie sur le Royaume.
A l’heure des innombrables suites et remakes qui alimentent les plateformes de streaming et les sorties en salles, Disney veut surfer sur la nouveauté. Les réalisateurs Carlos López Estrada et Don Hall parlent de « film inattendu », de « bouffée d’air frais dans le genre » quand ils abordent leur film RAYA ET LE DERNIER DRAGON. C’est regrettablement le contraire. Tour d’horizon au sein des 5 terres de Kumandra.
Raya se perd là où La Reine des Neiges 2 (2019) avait su proposer un vent de fraicheur, mature et visuel. Indiscrète, la trame du dernier film des Studios Disney se repose sur le schéma désormais trop classique des films d’animation de ces dernières années. Un personnage – souvent jeune – demeurant au sein d’un univers magique, s’impose personnellement, une quête dangereuse à la recherche d’un objet mystique et légendaire. Et l’exigence que Walt Disney Pictures a développé chez le public est en reste face à ces duplicatas. En effet, on peut facilement citer dans cette veine Vaiana (2016) et l’hameçon miraculeux ou plus récemment Ian et son Germe de Phénix dans la co-création Pixar de l’an dernier : En Avant. Où sont passés les prodigieuses émotions provoquées par l’ingéniosité de Frères des Ours (2003) ou de Tarzan (1999) ? En aucun cas dans RAYA ET LE DERNIER DRAGON à la recherche de morceaux de pierres mystiques.
L’univers de RAYA dispose pourtant d’une large palette de possibilités au sein de son noyau visuel. Le royaume fictif de Kumandra s’inscrit instantanément dans la culture asiatique et son amour pour les dragons. Longtemps représenté dans le cinéma d’animation – merveilleusement chez Dreamworks dans la saga Dragons (2010-19), témérairement dans Chasseurs de Dragons (2008) et majestueusement pour Ghibli dans Le Voyage de Chihiro (2001) – cette créature fantastique est au centre des rêves d’enfants et d’adultes attirés par la fantasy. Les Studios Disney avaient précédemment approché le sujet avec Peter et Elliott le Dragon (1977), la transformation mythique de Maléfique ou déjà au sein de la croyance asiatique avec le flamboyant Mushu. C’est dans la personnalité de Sisu, le dragon de RAYA, que réside l’unique intérêt du film. Immergé – en référence à sa particularité aquatique – dans le monde moderne, la créature de feu bleue du classique d’animation projette une nouvelle vision des créatures magiques. Elle s’exprime dans un langage contemporain, nomme des références connues de tous et prend l’apparence d’une adolescente qui par métaphore, découvre son corps. Permettant ainsi à chaque âge d’y trouver le brin de magie unique aux Studios Disney.
La princesse Raya originaire de Coeur de Dragon, l’une des cinq Terres du Royaume, ne concoure pas dans la même catégorie de louanges. Aventurière type, douteux mélange de Mulan et Vaiana, manque cruellement de personnalité. L’ellipse qui la sépare de son enfance fait souffrir l’image que dégage ce personnage. Sa seule pensée ? Retrouver son père prisonnier dans un corps de roche. Pas d’amis hormis un fidèle animal aux curieux airs de cloporte géant et pangolin. Raya est prisonnière de l’histoire, enfermée dans un corps de guerrière depuis sa naissance.
Certains parleront d’acharnement, d’autres de dévouement et d’espoir, mais ce qui est certain c’est que Disney avait de quoi faire naitre un premier personnage ouvertement lesbien et qu’il est tristement passé à côté. Après les rumeurs infondés concernant Elsa (La Reine des Neiges), les studios aux grandes oreilles laissent percevoir dans RAYA ET LE DERNIER DRAGON, un semblant de volonté non assumé. L’amitié naissante entre Namaari et Raya est hantée par un spectre amoureux légèrement visible et indolore. Générique de fin à l’appui. Amour ou amitié, quelle est la différence ? Rien d’important certes, mais l’ouverture d’une porte était pourtant envisagée. Peut-être est-ce cela qui fait de Raya, une princesse sans réelle émotions. Essai raté, personnage mal écrit, nul ne le saura réellement.
Alors que Encanto, le prochain film d’animation signé Disney devrait sortir en novembre prochain, il est légitime de se demander dans quelle direction les célèbres studios se dirigent-ils. Allons-nous vers des Indiana Jones remixés continuellement ou pouvons-nous encore attendre des chefs-d’œuvre comme le fût Soul (2020) avec Pixar. RAYA ET LE DERNIER DRAGON n’est lui, malheureusement, qu’une légère parenthèse distrayante pour les friands de dragons.
Robin
• Réalisation : Carlos López Estrada, Don Hall
• Casting : Emilie Rault, Géraldine Nakache, Frédéric Chau
• Date de sortie (France) : 14 avril 2021
• Durée : 1h 30min
• Genre : Animation, Fantastique, Aventure • Nationalité: Américain