Alors qu’Art le Clown revient semer la terreur dans une nouvelle folie sanglante, TERRIFIER 3 écope d’une interdiction aux moins de 18 ans surprenante. En effet, ce troisième opus se révèle tout aussi gore, trash et peu sérieux que ses prédécesseurs.
Un petit film devenu grande saga
Derrière le phénomène Terrifier se cache son réalisateur, Damien Leone. À l’origine artisan des effets spéciaux au talent remarquable, Leone crée sa créature mythique, Art le clown, en 2008 pour son court-métrage The 9th Circle. Déjà iconisé, le personnage détient un tel charisme qu’il lui consacre un second court-métrage, Terrifier, en 2011. Les courts-métrages où Art apparaît sont ensuite en partie condensés dans l’anthologie d’horreur All Hallows’ Eve en 2013, sous l’impulsion d’un producteur fasciné par cette nouvelle figure démoniaque. En résulte une petite production horrifique assez bancale, mais aux effets gores éblouissants pour ses faibles moyens.
La critique manifeste peu d’enthousiasme. Néanmoins, beaucoup retiennent Art le clown comme une potentielle figure iconique du cinéma d’horreur, à l’image d’un Pinhead dans Hellraiser. Leone entame alors une campagne de financement participatif pour produire le premier long-métrage Terrifier, et ainsi donner toute son aura au personnage. Avec un budget moyen de 55 000 dollars, le film rapporte près de 420 000 dollars au box office américain en 2016. Un succès de niche certes, mais retentissant à l’échelle de ce type de production indépendante. S’ensuit naturellement Terrifier 2 en 2022, également motivé par la réception internationale du premier volet en VOD.
Interdit aux moins de 18 ans
Chose rare pour ce genre de série B, Terrifier 2 a bénéficié d’une distribution en salles au-delà des États-Unis. Sa violence graphique exubérante a notamment pu entrer dans nos cinémas français grâce aux efforts du distributeur ESC, en partenariat avec la plateforme de streaming Shadowz. Un carton plein pour Leone, qui a atteint les 15 millions au box-office mondial avec ses maigres 250 000 dollars de budget. Malheureusement, TERRIFIER 3 risque de ne pas connaître le même succès que son prédécesseur – dans les salles françaises, du moins.
En effet, alors que le deuxième volet de la saga avait écopé d’une interdiction aux moins de 16 ans logique et raisonnable, ce troisième opus a finalement été interdit aux moins de 18 ans, à la grande surprise de ses distributeurs. Une décision étonnante de la part de la Commission de Classification, qui avait pourtant attribué un moins de 16 ans à des films tout aussi violents et bien moins légers, comme The Sadness en 2022 ou Project Wolf Hunting en 2023. La sanction paraît donc bien lourde pour TERRIFIER 3 et inquiétante vis-à-vis de l’avenir du genre en France, qui risque une diffusion plus restreinte et limitée.
Un simple divertissement horrifique
D’autant que l’engouement pour Terrifier 2 était principalement dû aux effets spéciaux du film, toujours plus gores et plus spectaculaires, qui servaient de prétexte à un scénario, certes plus étudié que le précédent, mais finalement assez peu développé. Car l’intérêt de la saga Terrifier réside dans son humour trash et sa surenchère de violence exacerbée. Limiter sa diffusion en salles pourrait donc induire la mise en avant d’œuvres plus lissées et étouffer ainsi les élans créatifs. Une forme de censure donc, alors même que TERRIFIER 3 ne constitue qu’un simple divertissement horrifique, sans grande ambition politique. En effet, Art le clown ne bénéficie pas d’une mythologie particulièrement fouillée.
Alors que le premier volet reste assez succinct sur les motivations de son antagoniste, Terrifier 2 lui offre une acolyte, en la personne de Little Pale Girl, ainsi qu’une final girl emblématique, Sienna Shaw, incarnée par Lauren LaVera. Une mythologie à nouveau exploitée dans TERRIFIER 3, qui prend cette fois-ci place dans le contexte des fêtes de Noël. Un motif récurrent du cinéma d’horreur, qui sert ici à établir une métaphore christique pour élever Sianna Shaw en martyr, émissaire du bien contre le mal. Un procédé qui n’est étonnamment pas sans rappeler la saison 7 de Buffy contre les vampires, où l’héroïne est caractérisée comme sauveuse de l’Humanité face au mal absolu – The First Evil, pour les fins connaisseurs.
Un merveilleux spectacle gore d’une bêtise amusée
Peut-être est-ce cette dimension chrétienne qui a motivé la restriction aux moins de 18 ans. Quoi qu’il en soit, peu original, ce scénario reste tout aussi accessoire que le précédent. Et l’on ne boude pas son plaisir face au déchaînement gore d’Art le clown, déguisé en Père Noël pour l’occasion. Par ailleurs, bien que la nudité soit toujours présente, elle s’étend désormais aux personnages masculins, dans une scène aussi jouissive que perturbante. On apprécie également l’accent mis sur le caractère comique du clown tueur, jusque-là plutôt timide. En tant que pure série B d’horreur, TERRIFIER 3 tient effectivement toutes ses promesses et prouve même que la saga s’améliore un peu plus à chaque nouvel opus.
Toutefois, le recours à une nouvelle antagoniste, dotée de la parole contrairement à Art, paraît assez peu utile – si ce n’est pour expliciter des pans entiers du scénario. Et ce, alors que Terrifier attire moins pour sa mythologie et son récit que pour ses effusions sanglantes. Étalé sur plus de deux heures, le spectacle semble passablement longuet par instants. Un défaut déjà présent dans Terrifier 2, qui souffrait néanmoins d’une mise en abîme beaucoup plus laborieuse. Malgré ses défauts, TERRIFIER 3 n’en demeure pas moins meilleur que ses prédécesseurs. Et pour peu que l’on apprécie sa démesure, il offre un merveilleux spectacle gore d’une bêtise amusée, bien plus inoffensif que certains le laissent entendre…
Lilyy NELSON