Lynne Ramsay
© Getty Images - Steve Sands

CANNES 2017 : You Were Never Really Here de Lynne Ramsay

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YOU WERE NEVER REALLY HERE est le nouveau film de Lynne Ramsay.

Pas vraiment d’informations sur le film en dehors d’un minuscule synopsis (un vétéran de guerre tente de sauver une jeune fille d’un réseau de prostitution), ainsi que la photo de tournage ci-dessus issue de Getty Images, mettant en avant son acteur principal Joaquin phoenix… En revanche, l’annonce du film en sélection officielle au prochain Festival de Cannes est l’occasion de revenir sur les trois précédents longs-métrages de Lynne Ramsay, à savoir  RatcatcherMorvern Callar et We need to talk about Kevin.

Trois films extrêmement singuliers, tant les uns par rapport aux autres que dans le paysage cinématographique.

Ratcatcher (1999), en se situant dans l’Écosse prolétaire des 70’s, s’attachait à capter ces soubresauts infimes qui transforment lentement mais surement, l’innocence inhérente à l’enfance en conscience du monde, des autres, et de soi. Morvern Callar (2002) se focalisait sur une femme et sa volonté d’émancipation, symbolisée par la « disparition » de l’Homme au profit d’une liberté et d’une indépendance (économique, administrative, émotionnelle et affective, sexuelle) aussi salutaire que fantasmée. Tandis que We Need To Talk About Kevin (2011) proposait de désacraliser l’enfance, l’instinct maternel, les notions de transmission et d’éducation. Ratcatcher impressionnait par sa composition de cadres servant à représenter une misère sociale que ne renierait pas Ken Loach, tout autant qu’un certain onirisme particulièrement contrastant. Cette maîtrise s’opposait à la caméra folle, libre et dépaysante de Morvern Callar qui, quant à elle, évoluait esthétiquement à mille lieux des tableaux impressionnistes de We Need To Talk About Kevin… Dans les trois cas, les seuls points communs apparents sont : l’ambiguïté, dérangeante mais présente chez les trois protagonistes, ainsi qu’une certaine propension à la métaphore morbide (morts, suicides et meurtres un peu hors-sujets), avec ce que cela implique de décrédibilisation purement scénaristique.

Pourtant, avec du recul, il y a une certaine logique introspective chez Lynne Ramsay. Ses films, réalisés respectivement à 31, 33 et 42 ans, correspondent peut-être à cette prise de maturité inhérente à la trentaine-quarantaine, où l’on idéalise encore l’innocence via une certaine nostalgie, puis où l’on se prépare au début de l’évanescence de la jeunesse et aux prises de responsabilité – comme Morvern. Puis, dix ans, un mari, et des enfants plus tard, l’occasion de s’interroger sur les causes et conséquences un peu taboues de ces fameuses responsabilités qui font d’une femme une Femme, imposant au passage tout un tas de règles sociales relativement immuables. À ce titre, We need to talk about Kevin, est donc clairement LE film de la maturité, cette oeuvre capable de poser un regard cynique, acerbe, cruel mais indéniablement sincère sur un petit monde individualiste bouleversé par l’intervention de l’Autre ; le mari comme l’enfant. Pas étonnant, vu la richesse du sujet, que Lynne Ramsay ait travaillé son film de façon à suggérer, notamment par un sens de la composition colorimétrique et géométrique ainsi qu’une science du montage assez dingues, un tas de choses de l’ordre du regret, de la perte, ou du deuil… à propos de la liberté féminine.

Puis, bien que cela soit relativement hors-sujet, on ne pouvait pas ne pas mentionner l’hallucinante performance de Ezra Miller, surnageant au dessus d’un casting pourtant parfait et adéquat (Tilda Swinton, John C.Reilly, ou encore tous les enfants).

GIF : we need to talk about kevin de lynne ramsay
Ezra Miller dans WNTTAK, immense.

Du coup, pour faire lien avec YOU WERE NEVER REALLY HERE, on va se permettre quelques comparaisons à Spielberg, Paul Thomas Anderson, et Jane Campion.

Spielberg, pour ce surprenant « esprit Amblin » dans Ratcatcher, mais également pour ces changements radicaux de ton, de forme et de thématiques en cours de filmographie, témoignant d’une passionnante maturité cinématographique et personnelle qui on l’espère, se poursuivra avec YOU WERE NEVER REALLY HERE.
PTA, déjà parce que l’évolution du travail formel entre le premier et le troisième long métrage de Lynne Ramsay rappelle celle entre Hard Eight et The Master, puis parce qu’à la façon d’un certain Inherent ViceYOU WERE NEVER REALLY HERE devrait s’inscrire dans la continuité d’obsessions d’auteur plutôt que simplement dans le genre polar. Enfin, Jane Campion parce qu’après avoir observé avec une certaine acuité la Femme dans toute son ambiguïté, il semblerait (d’après le synopsis), que Lynne Ramsay s’interroge enfin sur l’Homme – son influence réciproque sur la femme, et particulièrement sur la femme-enfant. On pense donc au combo Piano / Holy Smoke / In The Cut.

Dans tous les cas, on en saura plus sur YOU WERE NEVER REALLY HERE ainsi que sur sa passionnante réalisatrice Lynne Ramsay, lors de sa présentation au Festival de Cannes, à partir du 18 mai 2017 !

Georgeslechameau

Note des lecteurs0 Note
RATCATCHER :
★★★★☆

MORVERN CALLAR:
★★★☆☆

WE NEED TO TALK ABOUT KEVIN:
★★★★★


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