Affiche du film FROM BEYOND
Crédits : D.R.

FROM BEYOND, revisiter Lovecraft en série B – Analyse

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Deuxième adaptation de Lovecraft par la société de production Empire Pictures, FROM BEYOND a longtemps peiné à trouver une reconnaissance comparable à la renommée de  son prédécesseur, Re-animator. Créatif, coquin et amusant, le film de Stuart Gordon détient pourtant tous les ingrédients d’une savoureuse série B des années 80.

La formule Lovecraft par Empire Pictures

Au milieu des années 80, la société de production Empire Pictures connaît son premier grand succès avec Ghoulies, rip-off insipide des Gremlins de Joe Dante. Ce premier braquage d’un million de dollars au box-office permet à la société de Charles Band de produire deux films à l’aura désormais culte : Trancers de Band himself, mais aussi et surtout, Re-animator de Stuart Gordon. Adapté de la nouvelle Herbert West – Reanimator de Lovecraft – l’une des premières incursions du zombie en littérature – le film se distingue comme une série B typique des années 80, avec ce qu’il faut d’effets gores et d’érotisme pour galvaniser son audience.

Avec son budget de 900 000 dollars, Re-animator engrange 2 millions de dollars au box-office. Suffisamment rentable pour donner envie à l’Empire de Band de renouveler l’expérience. Stuart Gordon et son acolyte Brian Yuzna travaillent donc sur la même formule. Cette fois-ci, il est convenu d’adapter De l’au-delà, une autre nouvelle de Lovecraft, où un scientifique et son assistant tentent de stimuler la glande pinéale du cerveau humain à l’aide d’une machine expérimentale. Et ce, dans l’espoir de percevoir des dimensions parallèles, imbriquées dans notre réalité. Au casting, même tambouille : on retrouve Jeffrey Combs et Barbara Crampton, déjà co-stars de Re-animator.

Revisiter Lovecraft

Là encore, le récit de Lovecraft est transposé au contexte, alors contemporain, des années 80. Si Re-animator s’émancipait déjà de son matériau littéraire, la nouvelle De l’au-delà offre encore davantage de liberté. Plus courte et resserrée sur l’expérience menée par les deux scientifiques, elle décrit un hui-clos fantastique qui ne court que sur une quinzaine de pages. De quoi laisser le champ libre au scénariste Dennis Paoli pour broder une histoire autour. Et l’auteur choisit de démarrer son récit après la malheureuse expérience, dont seul l’assistant du professeur a réchappé. Ses explications rocambolesques sur la mort de son supérieur l’envoient alors directement à l’asile psychiatrique.

Et c’est là qu’entre en scène Barbara Crampton, dans le rôle d’une brillante psychiatre, déterminée à prouver la sanité d’esprit de son patient. Si la posture de Crampton en scientifique accomplie ne manque pas d’intérêt, le film ne tarde pas à la déshabiller et même à la faire enfiler une tenue de cuir sado-masochiste du meilleur goût. Un écueil qu’avait su éviter Re-animator. L’absurdité de cette scène matérialise l’outrance de la série B des années 80, qui entendait aguicher le spectateur autant par le gore que par l’érotisme. Une posture mercantile, certes, mais qui prête ici bien plus à sourire qu’à se révolter. Car FROM BEYOND nous en donne effectivement pour notre argent. 

Le haut du panier

Sur ses aspects gores, le film fait la part belle au body horror suintant, particulièrement cher à Brian Yuzna. Décapitation étrange, déformations grandiloquentes, tout vise à la surenchère, avec profusion de créatures parmi les plus lovecraftiennes. Car malgré le recul pris par rapport à l’œuvre originale et sa mise en abîme outrageusement eighties, FROM BEYOND parvient à retranscrire la patte de Lovecraft et à la rendre reconnaissable. Il se permet, de plus, d’y ajouter une réflexion sur les traitements psychiatriques, encore barbares à cette époque. Néanmoins, s’il demeure jouissif, il n’égale pas pour autant la saveur de Re-animator. En effet, bien que l’on puisse reconnaître toutes ces qualités à FROM BEYOND, on ne peut s’empêcher de le comparer à son prédécesseur. 

Et force est de constater qu’il ne se hisse quasiment jamais à son niveau. Moins fou, dans un décor peu fourni, il s’amuse davantage à déployer ses effets qu’à raconter réellement son histoire de savant fou foutraque. De même, malgré son excellent casting, avec un Ken Foree formidable en policier incrédule, ses personnages restent sans relief, là où Re-animator surprend davantage dans son écriture. Toutes ces raisons expliquent certainement le succès relatif de FROM BEYOND et l’abandon du projet d’adapter davantage de nouvelles de Lovecraft chez Empire. N’en reste pas moins un film particulièrement fun et régressif, dans le haut du panier des séries B de son époque.

Lilyy Nelson

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