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GRAND ARMY est-elle l’anti-Euphoria ? – Critique

Bien que fortement recommandée par la journaliste culture Jennifer Padjemi, GRAND ARMY aurait facilement pu passer sous les radars. Et pour cause, avec un scénario qui paraît s’arrêter aux clichés lycéens, la série semblait être aussi prévisible que vide. Erreur ! 

Euphoria est un bijou. Il est difficile de le nier. Entre son esthétisme psychédélique, ses dialogues percutants et ses acteurs magnétiques, la série est devenue le symbole de toute une génération. Pourtant, il n’y a pas de série plus éloignée de la réalité des adolescents. En opposition, GRAND ARMY, de Katie Cappiello, propose un point de vue totalement différent sur le quotidien des jeunes de nos jours pour un résultat plutôt prometteur. 

Là où la noirceur d’ Euphoria transcendait les âmes et les esprits, GRAND ARMY vient mettre un terme à cette esthétisation en abordant des sujets difficiles : de la menace terroriste au viol en passant par la quête identitaire. Créée par Katie Cappiello, cette série Netflix suit l’histoire de plusieurs élèves d’un lycée de Brooklyn. Tous issus de milieux variés, ils évoluent pour trouver leur identité au milieu du capharnaüm que sont leurs vies. 

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Dès les premières minutes, la série affiche son ambition en bousculant le quotidien des adolescents avec une événement terroriste qui vient de se produire non loin de là. C’est donc avec un réalisme cru que le scénario va aborder différents arcs narratifs à travers un ensemble chorale pour une fois réellement inclusif. La réussite de GRAND ARMY s’inscrit en effet dans sa façon d’aborder avec sincérité et profondeur tous les personnages présents. Si Joey Del Marco (Odessa A’zion) semble se placer au cœur de la série dès les premières minutes, les autres adolescents ne sont pas pour autant abandonnés ou traités avec superficialité. Dominique Pierre, interprétée par la splendide Odley Jean, incarne une lycéenne Haïtiano-Américaine qui donne une voix à une communauté peu représentée à l’écran. À travers sa relation avec John Ellis (Alphonso Romero Jones II), la jeune femme permet également d’entrevoir une relation amoureuse authentique, éloignée des clichés télévisés. 

Aux côtés de Dominique Pierre évoluent Siddhartha Pakam (Amir Bageria), un jeune garçon d’origine Indo-Américaine qui se questionne sur sa sexualité ainsi que Lelia Zimmer (Amalia Yoo) une jeune Sino-Américaine adoptée par une famille juive à New York. Ainsi, la série donne une certaine prépondérance aux questions sur l’identité, les origines et l’héritage culturel. Néanmoins, un des arcs narratifs les plus puissants de la série reste sa lecture de la culture du viol à travers l’évolution du personnage de Joey.

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Dans GRAND ARMY, c’est Joey, la « fille cool ». Elle est populaire, militante, pompom girl, belle et intelligente. À l’aise avec son corps, elle n’hésite pas à affirmer sa liberté sexuelle. Pourtant, lorsqu’elle est victime de viol, agressée par deux de ses amis, personne ne l’a croit. De quel droit peut-elle se plaindre, elle « l’a bien cherché », non ?

Comme le disait Rosamund Pike dans Gone Girl, être la « fille cool », cela signifie être belle, intelligente, drôle. Aimer les blagues salaces et les concours de rots, boire de la bière et pratiquer la sodomie. Être une « fille cool », c’est s’enfoncer dans la bouche des hot-dogs comme si c’était le meilleur plat au monde tout en s’habillant en 36 car il faut rester sexy. Être la fille cool, c’est être sexy, c’est devoir être sexy. Mais surtout être compréhensive en acceptant que les mecs fassent tout ce qu’ils veulent. Donc si elle est agressée, c’est pas grave, il y a pas de problème. La « fille cool » est si compréhensive…

Dès lors, Joey expérimente une inversion de culpabilité alors que tout son entourage lui fait comprendre qu’elle est responsable de ce qui lui est arrivé. Sous les yeux du spectateur, la jeune fille s’enfonce dans une spirale infernale et donne à voir avec brutalité et réalisme le quotidien d’une victime de viol que personne ne croit…

Si le show aurait pu être critiqué pour sa « capitalisation de sujets touchants » (Elena Pougin) en réunissant tous les enjeux de sociétés liés à la nouvelle génération sous un seul étendard, il n’en est pas moins que les propos sont d’une telle justesse que l’on ne peut qu’excuser cette stratégie. Ainsi, alors que certains voyaient dans GRAND ARMY une imitation délavée d’Euphoria, la série s’inscrit justement en opposition à cette dernière pour un résultat plutôt prometteur.

Sarah Cerange

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Titre original : Grand Army • Réalisation : Katie Cappiello • Acteurs : Odessa A'zion, Odley Jean, Amir Bageria, Maliq Johnson, Amalia Yoo, Alphonso Romero Jones •Date de sortie : 16 octobre 2020• Durée : 9x52 min
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Ultra-réaliste

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