THE OPEN

La sélection « Série B » : THE OPEN

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Si aucune date de sortie n’a encore été annoncée pour The Open, ce film post-apocalyptique des plus singuliers, où le tennis devient un art de survie, continue de faire parler de lui dans divers festivals à travers le monde.

Réaliser un film peut être une entreprise risquée, déraisonnable, folle. Qui suit un cinéaste comme Marc Lahore doit emporter ses chaussures de randonnée et son sac à dos, et se préparer à un tournage éprouvant. Car à défaut d’un budget conséquent, les braves et les audacieux doivent tout miser sur leur énergie et leur foi en l’accomplissement de leur projet. Quand on résume THE OPEN au pari technique qu’il représente, on se demande justement quelle part d’énergie, de foi et disons-le franchement d’inconscience, a permis à ce pari d’être gagné et d’aboutir à un résultat aussi intense pour le spectateur. Un tournage aux Iles Hébrides, au nord de l’Écosse (personnellement, je ne pensais même pas qu’il existait un nord à l’Écosse), six techniciens en tout et pour tout, trois comédiens à l’écran, sans oublier le brouillard et la pluie qui répondent également présents au rendez-vous.

Un parallèle évident peut ainsi être établi entre le sujet du film et l’entreprise artistique du réalisateur et de son équipe. Les trois personnages surmontent les conditions rigoureuses d’un décor post-apocalyptique, pour se focaliser sur un seul et unique but : la finale des internationaux de tennis de Roland-Garros. Lahore et ses complices arpentent les îles Écossais aux humeurs sévères, en regardant toujours droit devant eux, vers l’aboutissement d’une œuvre cinématographique. Et pas n’importe quelle œuvre, puisque ils obtiennent ici le résultat cohérent d’un parti-pris d’écriture refusant de cloisonner les intentions du cinéma dit « d’auteur » et les codes de celui dit « de genre ». Cette démarche résolument moderne et affranchie des circuits économiques conventionnels, débouche ainsi sur un film post-apocalyptique intimiste.

THE OPEN

Dès lors, le voyage entrepris par le trio sportif se dessine comme une expérience physique intense, qui n’a pas besoin de surenchérir dans l’action et l’enchevêtrement de tensions dramatiques, pour réussir à apparaître spectaculaire. La simple fragilité de ces corps perdus au milieu de la magnificence du décor écossais suffit à la dimension spectaculaire, car cette scénographie en terre hostile sert avec pertinence la trajectoire de ces guerriers imaginaires. Cette terre verte et grise tenant tête à un ciel menaçant, devient ainsi la chambre d’écho des tourments intérieurs qui agitent nos voyageurs, et les mènent vers leur but : se sentir immense au milieu de l’immensité. J’imagine qu’en lisant cette critique, certains lecteurs se demandent quel est le rapport entre un trip post-apo dans les Iles Hébrides et le tournoi de Roland-Garros. À la limite Wimbledon c’est sur gazon, mais là Roland-Garros c’est de la terre battue, il y a un truc qui cloche, non ? C’est justement dans ce décalage que réside toute la poésie de THE OPEN; puisque de tournoi, il en est avant tout question dans l’esprit des protagonistes, parlant tennis, bougeant tennis, dormant et mangeant tennis à longueur de journée, alors que visiblement le monde autour d’eux subit ou a subi d’autres enjeux.

[bctt tweet= »« Intimiste de prime abord, The Open se relève porté par un souffle romantique. » » username= »LeBlogDuCinema »]

On pourrait croire dans un premier temps que ce scénario sert une mise en scène absurde, comme dans le théâtre de Samuel Beckett ou d’Eugène Ionesco, où les gestes ne sont que les répétitions pathétiques des idées désespérées et dénuées de lucidité. Mais le talent de Marc Lahore réside au contraire dans le potentiel d’immersion de ses images, dans sa capacité à nous faire croire à beaucoup avec peu. On se prend donc d’empathie pour ses guerriers-rêveurs dont la grâce est d’avoir su s’inventer leur zone de guerre à eux, pour ne pas se laisser détruire par la zone de guerre dont ils devraient subir l’implacable réalité. Et autour d’eux apparaît progressivement le rêve, superposé au décor réel, qui au lieu de clouer les personnages dans des chorégraphies ridicules, les porte dans l’énergie de leur identité, leur dignité de corps libérés par le mouvement. Pour preuve de ce glissement poétique, se pose soudain le moment où la musique remplace le tennis, où l’hymne Amazing grace devient à son tour un acte de ferveur, une performance physique émanant d’un corps au bord de la rupture, et pourtant traversé plus que jamais par les émotions violentes et contradictoires de la vie.

De prime abord, on pourrait croire que THE OPEN est une œuvre minimaliste, cherchant l’économie, voire l’épure dans ses dialogues comme dans son dispositif technique. En réalité, le film trouve sa puissance dans sa dynamique désamorçant progressivement la petite ritournelle absurde que l’on peut anticiper, pour laisser s’installer un souffle romantique qui nous cueille en fin de compte. Créer la tension par une opposition entre deux forces capables de régir la vie d’un humain, d’un côté la cruauté d’une réalité, de l’autre la capacité de cet humain à épouser de manière passionnée l’élan de ses émotions, qu’il y a-t-il de plus de romantique finalement ?

Arkham

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Titre original : The Open
Réalisation et scénario : Marc Lahore
Acteurs principaux : James Northcote, Maia Levasseur-Costil, et Pierre Benoistt
Date de sortie : inconnue
Durée : 1h28min
Synopsis : Les bombes sont tombées, la guerre est totale. André et Stéphanie (n°4, WTA) n’en démordent pourtant pas : Roland Garros, c’est leur vie ; leur raison de vivre, leur histoire. Et ils organiseront leur Open, coûte que coûte, envers et contre tout. Même sans cordages, même sans balles, à la seule force de leur foi. Ils y croient. Si fort qu’ils pourraient même convaincre Ralph, guérillero de la plaine, de se joindre à eux. De poser les armes, reprendre sa raquette... et tenter sa chance en finale. Roland Garros ! Trois misfits, adeptes d’un air tennis aux enjeux titanesques –et pourtant dérisoires–, s’acharnent ainsi à rêver, alors que la vie devient farce, alors que le monde s’éteint.
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intense

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