Photo de la série THE WHITE LOTUS
Crédits : HBO Max

THE WHITE LOTUS – Saison 2 : Mike White continue de révolutionner le petit écran – Critique

Après une première saison aussi flamboyante, le doute était permis. Les premières informations sur cette seconde saison laissaient penser que THE WHITE LOTUS avait fini de révolutionner le petit écran. Mais malgré un casting semblable et un huis-clos similaire… THE WHITE LOTUS n’a pourtant pas joué la carte du déjà-vu et a su se réinventer en seulement six épisodes.

En août 2020, alors que la pandémie continuait de déformer nos habitudes, HBO cherchait désespérément une nouvelle façon de produire des programmes télévisés. Le COVID-19 ayant provoqué la fermeture de nombreux plateaux de tournage, il était indispensable pour les studios d’imaginer une autre façon de faire rêver le public. Séduit par ce défi, le scénariste et réalisateur Mike White a ainsi sauté sur cette opportunité pour proposer un projet. Il ne le savait pas encore mais il venait de donner naissance à THE WHITE LOTUS, une série qui allait transformer le petit écran pour les années à venir.

Grâce à cette série tournée dans un lieu unique avec un casting réduit et sur une période courte, Mike White a réussi l’exploit de remporter plus de nominations aux Emmy Awards qu’il n’avait tourné d’épisodes. C’est donc sans surprise que cette création, aussi brillante que mordante, fut renouvelée pour une seconde saison. Néanmoins, malgré le retour à la normal de l’industrie hollywoodienne, il a été décidé de reprendre tous les ingrédients qui avaient fait le succès de la série : installer un casting cinq étoiles dans un lieu paradisiaque pour y poser un regard acide sur les rapports de classe et de genre. Une crainte est alors progressivement apparue : celle que cette seconde saison ne se contente de copier ce qui avait fait le succès de la première, le génie en moins. Mais c’était sans compter sur le brio de Mike White

Photo de la série THE WHITE LOTUS
Crédits : HBO Max

Comme le souligne Télérama, c’était une bonne idée « d’avoir quitté Hawaï pour poser ses valises à l’est de la Sicile ». Mais plus qu’un changement de décor, ce choix scénaristique permet d’aborder les dynamiques relationnelles des personnages sous un angle totalement différent. Si l’île de Maui était un décor parfait pour aborder les rapports de classe, les privilèges et le colonialisme, l’Italie permet d’explorer d’autres thématiques. Une plongée dans l’histoire de Taormine (la ville où est située l’hôtel) permet de saisir rapidement ce qui sera au cœur de cette deuxième saison. Populaire au XIXe siècle, la ville est ainsi devenue célèbre en tant que destination incontournable pour le tourisme sexuel en Europe. À l’époque, et contrairement au reste de l’Europe du Nord, le Sud de l’Italie tolérait les relations homosexuelles. C’est donc sans surprise que dès sa sortie de prison en 1897, Oscar Wilde partit s’installer à Taormine. Cette dernière aurait tout aussi bien pu être le sujet de sa célèbre citation « Tout dans le monde est une question de sexe, sauf le sexe. Le sexe est une question de pouvoir ». En effet, déjà à l’époque, ce « paradis gay » cachait des dynamiques de pouvoir complexes et brutales derrière sa beauté apparente.

Après avoir abordé les privilèges et le colonialisme dans sa première saison, THE WHITE LOTUS explore ainsi la thématique du sexe et ses dynamiques de pouvoir. Selon Vulture, si la précédente saison établissait le constat que toutes les relations étaient transactionnelles, cette nouvelle saison va encore plus loin en suggérant aux personnages qu’ils ne trouveront satisfaction qu’en comprenant cette « vérité » sur les relations. Grâce à un rythme subtil et des moments de brio accordés à chaque personnage, THE WHITE LOTUS réussit à montrer leur évolution au fur et à mesure qu’ils prennent conscience de cette réalité. Quelque soit la désillusion relationnelle ou amoureuse à laquelle ils doivent faire face, les protagonistes prennent chacun conscience dans quelle mesure chacune de leurs interactions consiste à obtenir ce qu’ils veulent de l’autre. Qu’il s’agisse de la relation entre Harper (Aubrey Plaza) et Ethan (Will Sharpe) ou encore celle entre Albi Di Grasso (Adam DiMarco) et son père (Michael Imperioli), chacun finit par accepter la réalité transactionnelle de sa relation. Néanmoins, si deux personnages incarnent l’essence même de ces dynamiques de pouvoir c’est bien Lucia (Simona Tabasco) et Mia (Beatrice Grannò), deux jeunes femmes aussi chaotiques que magiques. 

Photo de la série THE WHITE LOTUS
Crédits : HBO Max

Non seulement cette deuxième saison de THE WHITE LOTUS questionne avec brio les rapports de domination et les relations transactionnelles mais son utilisation des symboles embarque le public dans une quête sur six épisodes. Qu’il s’agisse du générique d’ouverture (et son incroyable musique toujours signée Cristobal Tapia de Veer), des testa di moro dans les chambres des couples ou encore du commentaire de Cameron (Theo James) sur les riches, de nombreux indices sont parsemés tout au long de la saison pour permettre aux spectateurs de deviner la narration mais aussi pour les aider à mieux décrypter les dynamiques entre les personnages. Ainsi, bien que profondément frustrant, le décès de l’un des clients de l’hôtel est une façon brillante de conclure cette saison sur les désillusions amoureuses. À travers ce personnage qui a refusé de voir que ses relations étaient transactionnelles, on retrouve également un spectateur, affligé, qui lui aussi a refusé de voir les signes avant-coureurs de cette désillusion qui avaient été semé dès la première saison.

Malgré sa recette déjà utilisée, THE WHITE LOTUS réussit à se réinventer avec brio en allant toujours plus loin dans la complexité de ses personnages et la perfection de ses détails. En ouvrant sa seconde saison avec un mystérieux meurtre et en poursuivant son commentaire sur les riches et les privilèges, Mike White fait perdurer deux thèmes cinématographiques majeurs de 2022. Encore plus riche que la précédente, cette seconde saison pourrait être le sujet de nombreuses thèses analysant ces thèmes, ces références ou ces dynamiques. En attendant ces publications, il ne nous reste désormais plus qu’à attendre la suite puisque la série, déjà renouvelée, continuera bientôt d’explorer un autre cercle de l’enfer : après la luxure et l’avarice, ce sera la religion qui sera au cœur de cette troisième saison.

Sarah Cerange

Note des lecteurs5 Notes
white lotus 0 - THE WHITE LOTUS - Saison 2 : Mike White continue de révolutionner le petit écran - Critique
Titre original : White Lotus
Réalisation : Mike White
Acteurs : Jennifer Coolidge, Michael Imperioli, Aubrey Plaza, Adam DiMarco, Tom Hollander, Sabrina Impacciatore, Haley Lu Richardson, Theo James, Meghann Fahy, Will Sharpe, Leo Woodall
Date de sortie : 31 octobre 2022
Durée : 6x56 minutes
4
Brillant

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SABATINI
SABATINI
Invité.e
28 mai 2023 23 h 41 min

THE WHITE LOTUS… Deux saisons de plaisir, à regarder ces riches américains qui ne parviennent même pas à savourer réellement leur séjour paradisiaque. Les petits problèmes qui jaillissent d’un détail, de l’ennui ou d’autrui. Le tout poussé au paroxysme,. qui évite le tour de force d’éviter la caricature, simplement par une baguette magique : donner toute l’amplitude aux acteurs et actrices talentueux.

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