Anne-Gaëlle Daval
© Stéphanie Ayache

[INTERVIEW] Anne-Gaëlle Daval – De plus belle

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Initialement créatrice de costumes, Anne-Gaëlle Daval a longtemps travaillé sur la série Kaamelott avant de se lancer dans la réalisation. Pour son premier long-métrage, De plus belle, elle s’offre un casting prestigieux et nous conte, de façon originale et émouvante, le cheminement d’une femme qui apprend à s’aimer et s’accepter telle qu’elle est. Touchés par la justesse de l’ensemble, nous avions envie d’en savoir plus sur ses motivations et son parcours d’écriture.

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Qu’est ce qui vous a motivé à passer de costumière à réalisatrice ?

L’envie de créer des costumes de cabaret. Plutôt que d’attendre une commande, j’ai préféré écrire mon film.

 

Y avait-il un lien avec les cours de danse et d’effeuillage burlesque, aujourd’hui souvent utilisés comme révélateurs de féminité ?

Pas du tout, je sortais de dix ans de chevalerie avec Kaamelott, à faire des peaux de bêtes et des armes, j’avais envie de paillettes !

De plus belle - Anne-Gaëlle Daval

Quel message avez-vous souhaité véhiculé à travers De plus belle ?

« Ne vous inquiétez pas, ça va aller ! ». Je voulais dire ça aux aux femmes en général qui sont soumises à des diktats que l’on ne comprend pas : forcément il faut être belle, il faut être compétitive, il faut tout réussir… Je voulais leur dire de ne pas s’inquiéter car on en est toutes là : on ne sait pas faire. Personne ne sait faire, à n’importe quel stade de la vie, quel que soit son physique, quel que soit son âge, même celles qui donnent l’impression de savoir faire. 

 

Aviez-vous un besoin particulier de parler de la maladie et plus précisément du cancer du sein ?

Non, en réalité il s’agit plutôt d’un prétexte scénaristique pour aborder la féminité et donner une dimension dramatique au personnage et à son évolution. Si j’avais voulu faire un film sur le cancer du sein je n’aurai pas fait ce film là, j’aurai pris le sujet à bras le corps. Toutefois je trouvais intéressant de parler de l’après maladie. Quand on a eu beaucoup de choses à faire, qu’on a eu un combat à mener, qu’on a été très entouré, que fait-on après, lorsque l’on rentre chez soi et que l’on est guéri ? L’hôpital est en endroit où l’on est complètement centré sur soi-même, ce qui est rare dans la vie quotidienne. Les aides soignantes sont formidables, on est dans un environnement hyper « cocoonant » dont on peut être nostalgique à la sortie, d’après mon expérience personnelle.

 

A travers le personnage ambivalent de la mère de Lucie qui aime sa fille tout en la bousillant à coups de remarques assassines souhaitiez vous alerter sur les mères toxiques ?

Je pense que l’on est toxique à partir du moment où l’on est une mère, celle-ci pas plus qu’une autre.

 

Le fait d’être mère de deux filles vous a t-il poussée à vous interroger sur votre propre féminité et sur ce que vous alliez ou non leur transmettre ?

Oui clairement. Quand on commence à écrire un scénario on est en vrai période de recherche, on est plus attentif à ce qui nous entoure, tout est matière à réflexion. Mes filles étaient pré-adolescentes, je les regardai devenir des jeunes filles et je me disais pour la première fois qu’il fallait que je leur apprenne à se maquiller. Je me suis demandée quelle était la place de la mère. On devient une femme par mimétisme par rapport à sa mère, du coup je me suis demandée comment devient-on une femme au contact d’une mère qui n’a pas elle-même conscience de sa féminité ?

 

Vous avez trouvé la réponse ?

Oui, en tombant sur des femmes telles que Dalila qui nous apprennent (référence au personnage du film interprété par Nicole Garcia), ou sur d’autres personnes, des copines, des articles dans les magazines… Mais il faut rester conscient que le maquillage et tout l’attirail c’est pour rigoler ! Une fois qu’on a franchi les étapes de la féminité on peut en jouer, s’amuser ou s’en foutre, comme Dalila. 

De plus belle - Anne-Gaëlle Daval

Vous avez écrit le rôle de Lucie pour Florence Foresti qui paraît à contre emploi par rapport à son image de comique sûre d’elle. Est-ce la fragilité que vous perceviez derrière la façade qui vous a conduit à ce choix ou au contraire l’assurance du discours assez féministe qu’elle défend ?

Pour ce que je percevais d’elle. Justement je crois que le film fonctionne parce que je n’ai aucun discours féministe. S’il y a une chose que je déteste c’est la revendication, ça me fait fuir ! Je ne me reconnais pas du tout dans tous les mouvements féministes. 

 

Néanmoins votre film porte de vrais messages pour les femmes…

Tout à fait mais sans être revanchard. Il est très important que nous, les femmes, arrêtions d’être dans la revanche. On ne gagnera jamais aucun combat comme ça. Notre force n’est pas du tout là dedans, elle est d’être différente des hommes. Notre force n’est pas d’être à l’égal des hommes mais « montées » différemment, nous avons des forces qu’eux n’ont pas. En aucun cas on ne passera de messages par la revendication ou en tous cas par la violence.

 

Lorsque Matthieu Kassovitz est arrivé sur le casting, vous avez réécrit, avec son concours, son personnage. Etait-ce parce que vous aviez une vision différente des hommes par rapport à la séduction ?

Pas du tout, au départ la romance entre Lucie et Clovis n’était pas le thème central du film, c’était plutôt le parcours de Lucie, l’enjeu amoureux permettait simplement de l’obliger à progresser. Il ne s’agissait pas d’une comédie romantique mais d’un parcours de femme par rapport à l’acceptation de ce qu’elle est, ni plus ni moins. J’avais déjà Florence Foresti, ce qui était déjà un gros challenge pour un premier film, je n’aurai jamais imaginé avoir Mathieu Kassovitz ou Nicole Garcia. Quand Mathieu a accepté le projet, j’ai donc revu la structure de mon scénario pour lui offrir un vrai rôle, plus conséquent.

 

Enfin, dans votre film, l’héroïne ne s’autorise à entamer une relation avec un homme qu’à partir du moment où elle est parvenue à s’accepter telle qu’elle est. Pensez- vous que ce soit une condition sinequanone pour construire une relation durable ?

Il paraît… En tous cas ça me paraît tout aussi essentiel pour une femme que pour un homme.

Propos recueillis par Stéphanie Ayache

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