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Copyright Mars Films

[CRITIQUE] IT COMES AT NIGHT

Malgré son épure et une certaine élégance, It Comes at Night n’offre pas grand chose exceptée une forme et une morale cinglante.

Avec son deuxième long-métrage, IT COMES AT NIGHT, Trey Edwards Shults (Krisha) prend ses distances du cinéma d’horreur mainstream des productions Blumhouse (Insidious, Get Out) et Platinum Dunes (American Nightmare, Ouija). Produit par des indépendants de qualité, Animal Kingdom (It Follows, Paterson) et A24 (Spring Breakers, Under the skin, The Witch), ce thriller horrifique avait de quoi intriguer, notamment avec la présence au casting de Joel Edgerton (Midnight Special, Loving) et de l’étoile montante, Riley Keough (Magic Mike, Mad Max: Fury Road, American Honey).

On reconnaît d’ailleurs au jeune Shults, à peine 30 ans, un véritable talent de cinéaste de genre. Délaissant les sempiternels et forcément éculés jump-scar, il parvient à instaurer une atmosphère tendue par un jeu d’apparition qui consiste à faire jaillir des points de lumière dans la noirceur d’une pièce, d’un couloir ou d’une forêt, par l’entremise d’une simple lampe torche qui laisse une impénétrable et diffuse zone d’ombre et donc de hors-champ. Épurée et élégante, sa mise en scène ne cherche pas à tous prix des effets horrifiques clinquants et bruyants qui sont habituellement le lot de ce type de film.

Photo du film IT COMES AT NIGHT

Shults prend également le parti pris scénaristique de laisser l’univers apocalyptique sous silence, de conserver un mystère autour de cette fameuse « contamination », de la garder pour ainsi dire en hors-champ, afin que les deux familles soient aussi dépourvues que le spectateur lui-même. Le choix du décor unique – un huis clos dans une maison perdue au milieu de la forêt – est un cliché du genre qui, pour une fois, a de la suite dans les idées. Cette maison en bois est une sorte de forteresse, hiérarchisée et aménagée de sorte qu’on puisse y vivre durablement et potentiellement paisiblement. Mais elle regorge néanmoins de couloirs et de pièces où l’on peut sournoisement épier ses « voisins », et possède sa propre « frontière », porte d’un rouge sang, que l’on ne doit jamais s’amuser à franchir, en particulier la nuit, par peur de l’extérieur et de l’étranger. Encore une fois, la mise en scène de Shults fait tout pour nous y perdre, n’en donnant jamais une cartographie éclairée à la manière d’un Polanski façon Rosemary Baby où l’agencement des pièces de l’appartement des Woodhouse reste encore aujourd’hui une véritable énigme.

Photo du film IT COMES AT NIGHT

Conscient que son exercice de style repose essentiellement sur ses non-dits et ses ellipses scénaristiques ou scénographiques, Shults laisse presque trop de « portes ouvertes » et finalement ne s’intéresse que partiellement à ses personnages : aux visions cauchemardesques d’un fils  à la libido frustré (Kelvin Harrison Jr.), au comportement d’un père paranoïaque et autoritaire à la morale douteuse (Joel Edgerton, bourru et inquiétant) ou encore au rôle de la mère (Carmen Ejogo), complètement vampirisée par les deux hommes de la maison. Si bien qu’IT COMES AT NIGHT, après avoir fait l’étalage d’une véritable acuité pour les ambiances nocturnes, visuelles ou sonores, réelles ou cauchemardesques, récite son guide du parfait survival movie sans grande originalité. On a le droit à la scène du chien qui se perd en pleine forêt et dont les aboiements s’arrêtant nets provoquent la stupeur générale ; à la scène des rednecks qui s’attaquent aux héros ; aux scènes d’exécutions sommaires car contamination oblige – scènes qui sont généralement suivies d’une scène de repas au silence embarrassant ; jusqu’au climax final, le « pétage de plombs » du daddy, pas si cool que ça.

Bref, il y a une certaine pauvreté de contenu, y compris sur la thématique de la peur de l’inconnu et de la survie, qui est inhérente à l’approche formelle du film qui, dans son entreprise de déshumanisation totale, n’offre aucune emprise à son spectateur. Une âpreté visuelle et thématique qui ravira certainement les spectateurs appréciant ces ambiances sibyllines et réifiées (The Witch). Pour les autres, ceux qui aiment davantage les films d’horreur triviaux et ostentatoires (The Visit, Split), la déception n’en sera que plus grande. Mais la vraie bonne nouvelle, c’est qu’il existe un renouvellement chez les cinéastes de genre avec une toute nouvelle génération de cinéastes prometteurs : Jeremy Saulnier, Andrés Muschietti, Robert Eggers, David Robert Mitchell, Trey Shults, Jordan Peele, Fede Alvarez, Julia Ducournau, Dan Trachtenberg

Antoine Gaudé

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Titre original : It Comes at Night
Réalisation : Trey Edwards Shults
Scénario : Trey Edwards Shults
Acteurs principaux : Joel Edgerton, Riley Keough, Christopher Abbott
Date de sortie : 21 juin 2017
Durée : 1h37min
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