[critique] The Salton Sea

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Tom van Allen est un jazzman prometteur et surtout un homme heureux, vénéré par sa jeune et belle épouse, Liz. Mais sa vie bascule le jour où celle-ci est froidement assassinée au cours d’un raid anti-drogue.
Pour identifier les coupables, Tom prend le nom de Danny Parker, infiltre le monde des drogués, se fait indic. Devenu accro en peu de temps et manipulé sans ménagement par les policiers Garcetti et Morgan, ce dernier balance les dealers qu’il croise sur son chemin, à la seule exception de son fidèle compagnon, le jeune et naïf Jimmy The Finn.
Grâce à celui-ci, Danny fait la rencontre de L’Ourson, un redoutable trafiquant de drogue, avec qui il conclut un deal de plusieurs centaines de milliers de dollars destiné à piéger les assassins de sa femme. Mais le stratagème ne tarde pas à se retourner contre lui…

Note de l’Auteur

[rating:7/10]

Date de sortie : 28 aout 2002
Réalisé par D.J. Caruso
Film Américain
Avec Val Kilmer, Vincent D’Onofrio, Anthony LaPaglia, Meat Loaf, Danny Trejo, Peter Sarsgaard, Deborah Kara Unger
Durée : 1h43min
Titre original : The Salton Sea
Bande-Annonce :

[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=nKi70hCRBKA&feature=search[/youtube]

Après les films fadasses que sont Paranoïak, L’Oeil Du Mal et Two For The Money (très mauvais, celui-là), on peut officiellement dire de D.J. Caruso que c’est un réalisateur sans personnalité qui ne fera certainement pas date dans l’histoire du cinéma. Il fait son boulot, réalise des films sans âme, et retombe dans l’oubli après que la critique l’ait démoli. Avec un manque de personnalité visuelle pareil, ce n’est clairement pas le genre de réalisateur auquel on va s’attacher, s’intéresser en profondeur et dont on va aller fouiller les débuts de carrière.
Et pourtant, pour une fois, ça vaudrait le coup. Car avant d’être un salsifis en (im)puissance, Caruso a quand même réussi à réaliser un bon film, qui tient la route et qui a tellement de style qu’on en est surpris de voire apparaître son nom au générique. Ce film, The Salton Sea, est un néo-noir sous acide centré sur un personnage à la moralité douteuse, dont on ne sait pas si on doit le plaindre, le mépriser ou l’admirer. Ce personnage s’appelle Danny Parker et, dans la mesure où tout tourne autour de lui, s’interroger sur le scénario revient à chercher à savoir quel genre d’homme il est. La réponse promet d’être complexe, mais on va essayer de faire court.
Danny Parker est un ancien musicien de jazz dont la femme a été butée devant lui sans qu’il ne puisse rien faire, juste parce qu’elle se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment. En guise de deuil, il a découvert la méthédrine, et pour oublier ce traumatisme que sa mémoire refuse d’effacer, il passe ses journées et ses nuits à faire la fête avec ses copains junkies, au point d’en perdre le sens de la réalité et la notion du temps. Comme souvent, le danger des trips prolongés dans les paradis artificiels est que si on se paume trop longtemps dans les labyrinthes de fumée et de poudre, on pourrait bien ne plus retrouver le chemin du retour vers la conscience de soi.

A sa manière, Danny essaie de lutter contre ça, car quelque chose au fond de lui l’empêche de céder totalement à son penchant pour l’autodestruction. C’est là que le personnage devient intéressant, et qu’on peut apprécier la subtilité du jeu de Val Kilmer, qui a à la fois le détachement catatonique du camé et le regard du prédateur en chasse. Bien que la moitié supérieure de son corps soit couverte de tatouages moches, que ses cheveux soient verts et qu’il porte une tête de mort à chaque doigt, tous les soirs le junkie enfile un costar et se transforme en trompettiste adepte de Miles Davis, comme pour ne pas oublier qui il est vraiment. Une sorte de posture de romantique trash, en somme.
Ce rôle de trompettiste dans lequel il se replonge est à la fois une bouée de secours qui l’empêche de perdre les pédales et un poids mort qui le tire vers le bas, puisqu’il représente réminiscence d’un passé qui n’existe plus et qui lui rappelle qu’il a toutes les raisons de se détester tel qu’il est aujourd’hui.
Car quand il est clean, Danny est un rat, une sale balance, un rebut parmi les rebuts. Il monnaie sa liberté avec des flics véreux en dénonçant les dealers dont la gueule ne lui revient pas. Il a conscience d’être une raclure, mais tente de garder un minimum de dignité en payant des cafés à sa voisine battue et en se raccrochant à la seule chose qui lui reste dans la vie : sa soif de vengeance.

Ce qui est vraiment intéressant, c’est qu’en plus d’être un film sur la drogue, on trouve aussi quelques résidus indéniables de substances illicites dans la réalisation, l’écriture et le montage, se manifestant par des éléments incongrus qui sont autant de sautes de folie dans un univers pourtant surplombé par l’ombre de la tragédie : un « film dans le film » d’une fausse séquence de braquage imaginée par une bande de désaxés, un trafiquant d’armes qui parle comme un vendeur de machines à laver, une reproduction de l’assassinat de JFK viennent ainsi nous rappeler que les surprises que nous réserve la drogue ont parfois quelque chose d’assez comique… Quand on ne part pas trop loin dans le bad trip. Car la folie, si elle peut faire rire, reste toujours, par son caractère imprévisible, quelque chose de terriblement dangereux. Le personnage de Pooh Bear, dealer sans nez au tempérament lunatique et explosif, superbement campé par un Vincent D’Onofrio hors de lui, est là pour nous le rappeler.
Ces pépites, qui ont l’air d’avoir été saisies à cet instant précis de la consommation où l’artiste défoncé devient visionnaire sans sombrer dans l’irrationnel, et qu’il touche alors à quelque chose qui se rapproche vraiment du génie pur. C’est ça qui a fait que, l’espace d’un film, Caruso a été un grand réalisateur.
Au final, The Salton Sea est un film sombre et parfois taré sur un type qui tente d’accéder à la rédemption en même temps qu’il effectue une chute vertigineuse vers les tréfonds des Enfers. L’univers de la drogue s’y exhibe sous toutes ses facettes, des petits dealers aux gros trafiquants, de la franche camaraderie aux rivalités de business, sans jamais tomber dans la leçon de morale à deux balles, parce que de toute manière si la morale existe, elle apparaîtrait ici comme complètement hors-de-propos.

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  1. Excellente critique, Julien. Je reconnais n’avoir vu ce film que pour voir Vincent D’Onofrio qui est mon acteur préféré. Au final ça a été une bonne surprise. Val Kilmer y est très bon. Ce mec alterne prestations sublimes et nanars de façon incroyable! ;)
    Et Vincent est génial comme toujours!

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