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Le remake, chevillé au corps de l’horreur – Analyse

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Cette semaine, Ciné+ Frisson entame un cycle de remakes horrifiques. Au programme : VENDREDI 13, I SPIT ON YOUR GRAVE, les deux derniers volets de ÇA et LA COLLINE A DES YEUX. Avec, en guise d’introduction, un sympathique documentaire titré « Remake don’t die ».

Manque d’inspiration pour certains, motivation mercantile pour d’autres… Le remake n’a jamais eu tout à fait bonne presse. Pourtant, le genre de l’horreur s’en est fait une spécialité. Et, comme le souligne le réalisateur Xavier Gens dès l’introduction de REMAKE DON’T DIE, l’horreur relève du cinéma d’exploitation. Une industrie cupide par essence. Le documentaire de Frédéric Murarotto et Guillaume Simon se penche ainsi sur cet effet de répétition, pour chercher à en déterminer les causes. Or, si elles demeurent effectivement mercantiles, on remarque tout de même un certain attrait pour le duplicata chez les spectateurs de l’horreur.

Déverser du fun à l’infini

En effet, tout épisode de VENDREDI 13 se doit de remplir rigoureusement un strict cahier des charges pour satisfaire. Une bande d’adolescents têtes à claques proprement insupportables, un Jason invincible égrainant sa légende, des meurtres tous plus sadiques et spectaculaires les uns que les autres. À ce titre, le remake de VENDREDI 13 premier du nom, réalisé en 2009 par Marcus Nispel, coche bel et bien toutes les cases et déverse son lot de fun à l’écran. Pourtant, si la première séquence paraît inspirée et bien menée, le reste du film déçoit en ne faisant qu’aligner les clichés d’une saga usée jusqu’à la corde.

Photo du film I SPIT ON YOUR GRAVE
Crédits : Family of the Year Productions

De manière effective, bien que le remake soit ancré dans l’horreur, il doit apporter quelque chose à l’œuvre originale. Car, comme l’explique très justement Olivier Alfonso, responsable effets spéciaux et maquilleur émérite, dans REMAKE DON’T DIE : « Si le spectateur commence à chercher les ressemblances avec l’œuvre originale, le film est assurément raté. » On en vient alors à s’interroger sur le I SPIT ON YOUR GRAVE de 2010… Lequel bénéficie d’une réalisation soignée et glaçante, à la limite de l’insoutenable dans son épouvantable scène de viol collectif, étirée sur plus de dix minutes.

Portée sociale

I SPIT ON YOUR GRAVE s’émancipe parfaitement de son aîné, titré Œil pour œil en VF et sorti en 1978. Il le surpasse même en termes de qualité de mise en scène. Pourtant, quelque chose y sonne creux. Peut-être qu’à le revisionner dix ans plus tard, après l’avènement du mouvement #MeToo, on pourrait lui reprocher de passer quelque peu à côté de sa portée féministe… Effectivement, REMAKE DON’T DIE s’empresse de nous rappeler à quel point les films d’horreur constituent une « caisse de résonance sociétale ». Et Xavier Gens de souligner qu’au-delà du fun, « tous les grands films de genre sont sociétaux et politiques ».

Photo du film LA COLLINE A DES YEUX
Crédits : Twentieth Century Fox France

Ce constat, Alexandre Aja l’a très bien compris et a su tirer son épingle du jeu avec son remake de LA COLLINE A DES YEUX, sorti en 2006. Considéré par un consensus unanime comme supérieur à l’original de Wes Craven, le film enrichit en effet grandement son propos en y apportant un sous-texte politique. La barbarie qu’il dépeint échafaude en filigrane une critique de la politique nucléaire américaine et, plus largement, du militarisme. Comme il l’explique lui-même dans REMAKE DON’T DIE, ce premier succès, tant critique que commercial, vaudra à Alexandre Aja de nombreuses propositions pour des projets similaires.

Photo du film ÇA CHAPITRE 2
Crédits : WARNER BROS. ENTERTAINMENT INC. / Brooke Palmer

Or, dans l’industrie hollywoodienne, les films et leurs auteurs se trouvent bien souvent broyés par des logiques commerciales froides et implacables. Dans REMAKE DON’T DIE, Alexandre Bustillo et Julien Maury, réalisateurs français du Leatherface de 2017, témoignent d’avoir été « embauchés pour prendre des images » et qu’une fois prises, ces images ont été passées sans scrupule à la moulinette des studios, sans aucun droit de regard. Dans une autre mesure, le ÇA deuxième du nom de Andrés Muschietti prête à confusion.

Devenir culte

Il n’y subsiste en effet plus rien de la charmante épopée horrifique eighties du premier volet. Le métrage se noie dans une surenchère d’effets numériques et surexpose grossièrement son antagoniste Pennywise. À se demander si un studio n’aurait pas sciemment forcé le trait. Et ce, de manière démesurément appuyée… Pourtant, le premier ÇA rebootait cet univers sous les meilleurs auspices en 2017. Interrogé à ce sujet dans REMAKE DON’T DIE, Andrés Muschietti évoque toute la portée nostalgique de la mythologie créée par Stephen King et son souhait de retranscrire l’attachement populaire si particulier au personnage de Pennywise.

Photo du film ÇA
Crédits : WARNER BROS. ENTERTAINMENT INC. AND RATPAC-DUNE ENTERTAINMENT LLC. / Brooke Palmer

Plus qu’un remake, le ÇA d’Andrés Muschietti est d’ores et déjà considéré comme un monument du film de genre. Et si Olivier Alfonso déplore le manque de symbolisme sur la pédophilie déjà sous-entendu dans l’original, Alexandre Aja voit en cette nouvelle occurrence de Pennywise un « boogeyman ultime ». Plus encore, « un remake exceptionnel des Griffes de la nuit« . Et l’on peut effectivement distinguer dans le ÇA de 2017 une révérence grandiose au cinéma d’horreur des années 70 et 80. Or, comme le confirme la tendance de l’elevated horror, au-delà du remake, l’avenir de l’horreur se situe désormais dans l’hommage.

Lily Nelson

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