Souffrant d’un scénario simpliste et indigne de son casting, ce thriller pseudo-horrifique accumule les clichés et dérange par l’ambiguïté de son propos.
Dès l’introduction, une voix-off redondante nous avertit : le film visitera les zones inexplorées de l’Amérique profonde, des régions rurales méconnues de l’Ohio. Autant dire qu’on aurait préféré ne jamais y mettre les pieds. Willard, soldat meurtri par les affrontements dans le Pacifique, y retourne et désire inexplicablement fonder un foyer sur ces terres. Dénué d’une quelconque forme d’empathie, le vétéran éduque son fils en lui expliquant que pour s’imposer en société, il faut distribuer des coups à la chaîne, qui plus est au rythme d’une B.O qui restera longtemps dans les mémoires tant elle se répète pour dissimuler la mièvrerie de cet ensemble indigeste.
Évidemment, comme la voix-off le sous-entendait dès l’introduction, toute forme de violence se paie et la mère au foyer décède subitement, victime du sort divin. On l’envie presque d’échapper à la suite. N’est pas Sam Mendes qui veut et les scènes où Arvin prie avec son père tirent davantage vers la parodie, tant les personnages semblent déshumanisés, perdus dans cet enfer. On regrette aussi la Louisiane qu’arpentaient Rust et Martin dans la première saison de True Detective. La métaphore filée du sort divin y était traitée de manière sous-jacente jusqu’à resurgir dans l’ultime dialogue. Comme pour Arvin, les héros mettaient un terme à leur quête identitaire suggérant une once d’espoir, après avoir parcouru un purgatoire terrestre.
Dans LE DIABLE TOUT LE TEMPS, les protagonistes rendent les coups sans réfléchir à ce que leur impose le destin. L’allégorie divine disparaît progressivement ou prend des tournures burlesques inadéquates (Robert Pattinson n’a jamais été aussi peu crédible en pasteur manipulateur). Arvin tourne le dos à l’église et élimine froidement l’ensemble de ses détracteurs sans connaître véritablement la rédemption attendue. Il se contente de répéter les actes précédemment exécutés par son père, incapable de questionner la violence qui nourrit son quotidien. Il faut dire qu’il n’est pas non plus aidé par la profondeur d’esprit de ses opposants. Des lycéens pervers dénués d’éducation aux tueurs en série arpentant les routes, le film ne dresse pas un portrait glorieux de l’Ohio et on est bien content de venir à bout de ces 2h18 pour quitter ces abîmes.
Au contraire de Cronenberg dans A History of violence, Antonio Campos ne questionne pas la logique de ces personnages animés par la haine et l’envie d’en découdre. Là où Cronenberg laissait le temps de mûrir au contact de la violence en la questionnant, Campos laisse agir bon gré mal gré, au fil des envies. S’il y a un message sous-jacent à lire, celui-ci manque de clarté et ce n’est pas la lourdeur du thème au violon redondant qui redorera son blason. Le mauvais goût dont il fait preuve est déconcertant, surtout lorsqu’il rythme des scènes de torture au rythme d’une country mélodieuse. On en oublie le personnage joué par Jason Clarke, potentiel échappatoire de ce vacarme mais rapidement exclu du récit au profit d’une intrigue inutile et lassante. Une pierre de plus à l’édifice Netflix, qu’il convient d’éviter.
Emeric
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