Avec sa sortie retardée à cause du rachat de la Fox par Disney, UNDERWATER apparaît comme le premier gros rendez-vous de ce début d’année, la déception n’est qu’à la hauteur de l’attente qu’il a suscité.
Un vaste projet industriel vire à la catastrophe lorsqu’un violent séisme endommage gravement une station sous-marine située à plus de 10 000 mètres de profondeur. Piégé dans les profondeurs abyssales, un groupe de survivants mené par Kristen Stewart et Vincent Cassel va tout faire pour s’en sortir. Dès les premières minutes, le film s’emballe dans une course folle contre la mort qu’il espère tenir jusqu’à la fin. L’ambition est claire, UNDERWATER est un survival sous-marin et c’est la seule chose qui intéresse William Eubank. Il s’agit de prendre le chemin le plus court vers l’action, l’horreur et l’expérience survivaliste, quitte à délaisser une chose pourtant essentielle, le scénario.
Il en résulte des personnages totalement vides et inintéressants. Dévitalisés de toute substance, les acteurs cabotinent à la recherche de quelque chose à jouer et la seule survie ne paraît même plus suffire à motiver l’existence de leur personnage. Un vide présent dans la séquence inaugurale, l’humanité semble déjà avoir déserté la station subaquatique, Kristen Stewart est alors seule, abandonnée au néant. Le film cherche sans jamais y parvenir, un but à atteindre, quelque chose à sauver. Il avance comme ses protagonistes, à l’aveugle, perdu dans des ténèbres sans fond.
Alors oui, on distingue clairement les références à Cameron, Abyss, Alien, tout ça tout ça… Le personnage qu’interprète Kristen Stewart est un rappel évident au Lieutenant Ripley. Mais que fait-on de cette mythologie invoquée ? Au final pas grand chose, du blabla pour alimenter des discussions de cinéphiles fétichistes qui s’agenouillent devant des icônes. Évidemment il y a tout de même des choses à sauver, quelques rares moments d’envolée pour nous faire croire que le film remplit ses ambitions. Les effets visuels sont bluffants, la manière dont l’eau est rendue omniprésente est incroyable, la pesanteur, le travail sur les décors etc. Mais quel ennui !
L’intrigue sombre avec le reste de l’équipage, ne reste plus qu’une seule espérance pour sauver le film, la promesse de la grosse bébête qui attend patiemment dans l’ombre. Alors on se laisse prendre au jeu du procédé et on attend sagement, prêts à accueillir la peur et l’effroi. Si de rares visions parviennent à nous dresser les poils à travers quelques tableaux impressionnants, UNDERWATER se contente du programme habituel, sans grande surprise, ni grosse frayeur.
Et même ce qui aurait dû être le plus réussi est raté. L’horreur n’est jamais à la hauteur, le moindre jump scare est prévisible et les situations ont un arrière goût de hareng réchauffé. À chaque exploration sa nouvelle épreuve, à l’issue de laquelle le groupe déplore la perte d’un membre. La mécanique se répète ainsi jusqu’à une certaine lassitude. Mais tout ça importe peu, car on ne sait plus très bien ce qu’il y avait à sauver, l’équipe elle même l’ignore. Quelques lignes de dialogues lors du dénouement pour essayer d’esquisser un personnage qu’on a vu mille fois, tenter de lui donner une direction, un itinéraire, mais c’est déjà trop tard, tout le monde s’en fout, le réalisateur s’est noyé depuis longtemps.
Le sensation de claustrophobie est tellement bien rendue que le film finit par nous asphyxier. Le déploiement d’effets auquel William Eubank à recours est plus proche du parc d’attraction que d’une réelle mise en scène. À défaut de nous transmettre un véritable vertige face au vide abyssal, le constant mouvement de caméra ne parvient à nous en restituer que les haut-le-cœur.
Le tout patauge dans de navrantes conventions de genre, jusqu’à un épilogue désespérant de niaiserie. Cette fois-ci nous ne sommes plus chez Cameron mais Michael Bay, parce qu’à Hollywood tout passe, à un moment ou un autre, par de grosses explosions. Les fantômes d’Hiroshima doivent nourrir des fantasmes inconscients de pleine puissance dans l’imaginaire américain. À l’heure où Trump bombarde à tour de bras le moyen Orient, cette obsession mortifère se charge d’un amer cynisme. Dans une bien-pensance arriviste, le film bricole un discours prétendument écologique dans lequel la créature de fin n’est rien d’autre que le reflet des stations sous-marines, ces véritables monstres d’acier, symboles de l’orgueil surdimensionné d’une humanité qui est l’unique cause de sa propre perte.
Hadrien Salducci
• Réalisation : William Eubank
• Scénario : Adam Cozad, Brian Duffield
• Acteurs principaux : Kristen Stewart, Vincent Cassel, T.J Miller, Jessica Henwick, John Gallagher Jr, Mamoudou Athie
• Date de sortie : 08 janvier 2020
• Durée : 1h35min