Michael Haneke dézingue la bourgeoisie dans Happy End, film au titre ironique, rempli d’humour noir, qui continue d’explorer les obsessions du metteur en scène.
Haneke fait du cinéma exigeant. Ce n’est pas une nouveauté. Primo, exigeant de sa part, parce que très pensé, verrouillé et exécuté méticuleusement. Secundo, exigeant pour le spectateur parce qu’il faut être en capacité d’encaisser ce que le metteur en scène autrichien propose. Voir un Haneke, c’est toujours une expérience. Bonne ou mauvaise. Son précédent film, Amour, auréolé d’une Palme d’Or à Cannes était un moment terrassant, pesant, continuant de creuser le sillon voyeuriste d’un homme qui aime nous confronter aux choses que l’on redoute. Déranger, perturber, il sait faire. Et Happy End, son nouveau film ne manque pas de le faire avec son ouverture sous forme de Periscope (l’application qui permet de filmer en direct et de partager avec des gens) où une gamine (on ne le sait pas de suite) filme des éléments de sa vie quotidienne. Sa mère se lave, sans jamais faire attention au fait que sa progéniture soit en train de la filmer. Ensuite, et les choses se compliquent, la jeune fille tue son hamster avec les médicaments de sa mère. Puis elle empoisonne cette dernière. On est interloqué, bousculé, par une telle entrée en matière. D’autant plus qu’au moment de l’introduction, impossible de savoir qui tient le téléphone.![[CRITIQUE] HAPPY END 19 happy 2](https://www.leblogducinema.com/wp-content/uploads//2017/05/happy-2.jpg)
« Haneke livre sa vision très ironique du concept de happy end. »
La surprise fut immense lors de la découverte de ce titre, Happy End. Un titre qui sonne ironique dans la filmographie de Haneke et qui ici ne manque pas d’être détourné, sali, pour dézinguer une bourgeoisie omnibulée par elle-même. Il y a évidement des limites à ce que fait Michael Haneke, surtout lorsqu’il se laisse aller à des pratiques auteurisantes vaines (des scènes remplies de vide ou les discussions sur Facebook), que son rythme patine et qu’il ne peut s’empêcher de nous assommer par la portée symbolique des effets employés. Il y a définitivement toujours du bon et du mauvais dans son travail. Happy End est à mi-chemin. Moins détestable que tout un pan de sa filmographie, tout en étant totalement dans la continuité thématique, formelle – avec les qualités et les défauts inhérents. Il y a tout de même quelque chose de savoureux à voir cette bourgeoisie snobe qui n’arrive jamais à se suicider. Le sens du titre est là finalement : s’ils ne peuvent pas mourir, c’est qu’ils sont déjà plus de ce monde, morts. Et nous, vivants, les regardons s’agiter avec délectation dans leur petit enfer sans intérêt. Le happy-end sauce Haneke c’est ça.
Critique publiée le 24 mai 2017 lors de la projection au Festival de Cannes.
Maxime Bedini
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![[CRITIQUE] HAPPY END 20 happyaff](https://www.leblogducinema.com/wp-content/uploads//2017/05/happyaff.jpg)
• Réalisation : Michael Haneke
• Scénario : Michael Haneke
• Acteurs principaux :Isabelle Huppert, Toby Jones, Mathieu Kassovitz
• Date de sortie : 4 octobre 2017
• Durée : 1h50min
![[CRITIQUE] HAPPY END 17 happy1](https://www.leblogducinema.com/wp-content/uploads//2017/05/happy1.jpg)



